Par Louis-Vincent Gave, Président de Gavekal, président du Biarritz Olympique.
La chronique du Lundi est d’habitude celle de Charles. Mais ce week-end, Charles avait derby contre l’Aviron. Et au stade d’Aguilera, Charles a attrapé le rhume Irlandais dont les symptômes principaux sont le mal aux cheveux, la langue pâteuse et la voix enrouée. Il s’en remettra et se souviendra que nous nous avons vécu ensemble un grand moment : de rugby, de combats, de liesse populaire, de communion intragénérationnelle et de brassage sociale.
Le rugby
Pour ceux d’entre vous qui ne s’intéressent pas au ballon ovale, l’une des plus grandes rivalités du rugby français (peut-être la plus grande rivalité ?) est le derby basque entre l’Aviron Bayonnais et le Biarritz Olympique. Peu de matchs déclenchent autant de ferveurs, et de division, sur un territoire restreint. Mais ce derby était particulier car si le BOPB (le club dont je suis Président) gagnait, le BOPB remontait en Top 14 après sept ans de Pro D2. Par contre pour Bayonne, une défaite était synonyme de descente en Pro D2 après deux saisons de Top 14. L’enjeu était donc encore plus conséquent que le laurier de champion du Pays Basque…
En m’asseyant à ma place dans la tribune officielle de Biarritz, à coté de Madame le Maire (Maider Arosteguy, LR) et en engageant la conversation, Madame le Maire me déclare « moi, je crois que Biarritz gagnera ce match au tir au but ». Je réponds poliment, mais avec un brin de condescendance quand même : « Madame le Maire, vous savez, les tirs au but au rugby, c’est très rare. Nous ne sommes pas chez les pousse-citrouilles. J’ai fait des centaines de matchs dans ma vie et aucun n’a jamais finit au tir au but». Evidemment, le match s’est finit au tir au but avec des scores de 3-3 à la fin du temps réglementaire, et de 6-6 à la fin des prolongations. Et à la loterie des tirs au but, le raté (cruel pour Bayonne) libera la foule Biarrote dans des scènes de joie tels que je n’en avais jamais vu. Serge Blanco, le « Pelé du rugby », assis a trois place de moi séchait ses larmes de joie. Didier Guillaume, notre ancien ministre de l’Agriculture et abonné au BOPB de longue date, faisait de même. Jean-Baptise Aldigé, le directeur du club, pleurait comme un madeleine… Et le terrain d’être envahie par la foule qui voulait serrer la main, et embrasser ses héros qui se sont battus sans relâche pendant plus de 100 minutes.
Le combat :
Le rugby est parfois un sport de mouvement, parfois un sport de combat. Mais un match qui finit à 6-6 après 100 minutes sur le terrain, alors que le thermomètre pointe à plus de relève principalement de la seconde catégorie. Et dans les matchs de combat, l’équipe qui demeure solidaire prend d’habitude l’ascendant. Or, sur ce match, ni l’aviron ni le BOPB ne prirent l’ascendant car chaque joueur de chaque équipe était bien conscient du poids historique qui reposait sur chaque paire d’épaules. Et aucun joueur, dans aucune des deux équipes, ne s’est défilé. Tout le monde a répondu présent. Après, chacun voit son propre match. Mais pour moi, les grands tournants ont été Gavin Stark (l’ailier Biarrot qui avait planté l’essai de la victoire contre Vannes, après la sirène, en demi-finale) qui rattrape par le bout du short Joe Ravouvou (l’ailier All Blacks-Sevens de Bayonne) et Steffon Armitage, le capitaine Biarrot de 35 ans, qui est le premier à rejoindre les deux flèches et qui gratte une pénalité. Ce même Steffon Armitage qui, à 15 secondes de la fin du temps règlementaire, et alors que Bayonne pilonne la ligne d’essai Biarrote tout en se mettant en position de drop devant les poteaux, gratte le ballon de façon inespérée. Et puis, il y a les soldats de l’hombre. Guy Millar, le pilier droit biarrot qui, après une saison où il a joué 32 matchs, reste 90 minutes sur le terrain… ce qui pour un pilier est tout simplement sans précédent. Ou Johan Aliouat, notre grand deuxième ligne et le joueur de l’équipe qui revient pour finir les prolongations alors qu’il a un bras en écharpe mais parce que son compère de la deuxième ligne, Kevin Gimeno, s’était blessé au genou. Ou encore François Da Ros, notre talonneur de 37 ans, qui lui aussi est resté 60 minutes sur le terrain alors qu’au mois de Juin dernier, François voulait prendre sa retraite… Je pourrai tous les citer tellement je les ai aimé dans ce combat de 100 minutes, ou aucun, malgré la chaleur, malgré les blessures, et malgré la peur, n’ont jamais abandonné. Evidemment, quand on est poussé par tout un pays, l’abandon n’est pas possible.
Un moment de liesse populaire :
Lorsque Steffon Armitage (encore lui) passe la pénalité de la gagne, la pelouse est immédiatement envahit par des centaines de supporteurs en liesse. Et derrière l’explosion de joie, il y a évidemment la liesse du retour en Top 14 après sept ans d’absence, le bonheur de gagner un derby, l’effondrement de la tension suite à un match irrespirable. Et puis aussi, et peut-être surtout, le bonheur de pouvoir vivre des moments de joie, de partage et d’émotions après 15 mois de confinements, de couvre-feux, et autres mesures liberticides. Et dans cette foule qui se précipite pour féliciter nos joueurs, il y a beaucoup de jeunes, et beaucoup de moins jeunes. Il y a des hommes, des femmes et des enfants. Et surtout il y a des gens de toute catégorie sociale. Ce qui dans notre société d’aujourd’hui démarque le rugby de la plupart des autres sports, hobbies et passions.
En effet, à part au rugby, où voyez vous aujourd’hui un brassage du riche avec le pauvre ? Du citadin avec l’agriculteur ? Du noir avec le blanc ? Du musulman avec le chrétien ?
Oui : quand l’équipe de France gagne au foot, la même liesse enflamme les rues de Sarcelles ou de Versailles. Mais Sarcelles reste à Sarcelles et Versailles à Versailles. Ce qui rend le rugby unique est le brassage social, ethnique et culturel qui se fait au sein de chaque équipe ; et que l’on retrouve dans chaque stade.
Sans vouloir me prendre en exemple, il est assez évident que, même si Charles ne l’était pas, je suis moi-même, grâce à la réussite de mes parents, un ‘gosse de riche’. Mais à 47 ans, je joue encore au rugby, non pas parce que j’aime me prendre des coups (ou en donner) mais parce que grâce au rugby, je rencontre des gens, et je me fais des amis, que je ne pourrai jamais me faire autrement. Dans mon club Canadien des Squamish Axemen (le club d’origine de Jamie Cudmore) il y a des bourgeois comme moi. Mais il y aussi dans mon équipe un policier, un pompier, des gars qui travaillent dans le bâtiment, un instituteur, un disc-jockey… des garçons que je ne rencontrerai pas autrement. Et ensemble, nous formons des amitiés, voir même des groupes de soutiens, uniques et forts.
Et Samedi sur la pelouse d’Aguilera, c’était la même chose : des fils de grands bourgeois qui embrassaient comme du bon pain des agriculteurs de soixante ans. Des dames d’un certain âge qui venaient me voir et qui, la larme à l’œil, me remerciait pour le travail accomplit ces trois dernières années. Un jeune homosexuel qui m’expliquait à quel point le fait que le BOPB ait signé un partenariat de sponsoring avec le site de rencontre Grindr était important pour lui…
Dans une France qui, suite à la fin du service militaire, à du mal à regrouper ses jeunes autour d’un projet commun, on pourrait espérer croire que les pouvoirs publics fassent tout leur possible afin de promouvoir l’un des seuls sports ayant une telle capacité de regroupement et de création de cohésion. Malheureusement, on en est loin… Mais cela est un papier pour un autre jour. Aujourd’hui, place au bonheur et à la joie, et honneurs aux joueurs des deux équipes qui ont tout donné sur la pelouse d’Aguilera ce Samedi.
Auteur: Charles Gave
Economiste et financier, Charles Gave s’est fait connaitre du grand public en publiant un essai pamphlétaire en 2001 “ Des Lions menés par des ânes “(Éditions Robert Laffont) où il dénonçait l’Euro et ses fonctionnements monétaires. Son dernier ouvrage “Sire, surtout ne faites rien” aux Editions Jean-Cyrille Godefroy (2016) rassemble les meilleurs chroniques de l'IDL écrites ces dernières années. Il est fondateur et président de Gavekal Research (www.gavekal.com).
lecteur
24 juillet 2021Cela fait penser à Rome !
marc durand
21 juin 2021Si si, il y a y projet commun, le fédé de rugby est la 1ere a autoriser les transgenes.
Ca part en cacahuète.
Une des raisons que je ne regarde plus les sports, c’est qu’ils ne représentent plus, les hommes des arbres, on achete des joueurs étrangers, des hommes des iles.
C’est devenu juste une histoire de pognon, les joueur ne sont plus issus de la ville ou ils sont nee, ou ils vivent, ils viennent que pour le salaire, ils ne représente pas, l’histoire, les traditions …
Philippe
19 juin 2021Bravo pour Biarritz mais vous devez rester sur la cote basque là ou sont les racines du club et le supporters . Sinon le derby local disparait .
gerard piton
19 juin 2021Biarritz n’oubliera jamais votre engagement dans le BO Merci a votre famille
Steve
16 juin 2021Bonsoir
Dans la tradition!
« Honneur aux forts, c’est la loi du sport
Vas-y petit c’est ça le rugby »
( Les Frères Jacques)
Cordialement
franck
16 juin 2021Bonjour,
souvent lorsque les parents n’ont pas été riche dans leur jeunesse et rencontré des difficultés, une part des gènes et de leur éducation est transmise aux générations suivantes ce qui poussent des nouveaux « riches (relativement) » à NATURELLEMENT garder les pieds sur terre ce qui permet de tisser des liens directs ou indirects (billets de Gave ou de ses enfants) entre les gens quelque soit leur statut social et ou « culturel ». Tout le monde en tire profit. C’est du gagnant gagnant.
Quand ceux qui ont un statut plutôt élevé cherche à tirer humblement ceux n’ayant pas les mêmes compétences vers le haut sans rien demander en contrepartie qui plus est !!! vous faites le bonheur de votre entourage et cela renforce finalement tout le monde sur tous les plans !!! moral, culturel, la dignité, amour propre et tout le bazard !!!!
Cordialement
Francesco
16 juin 2021Bravo Charles pour la remontée en top 14 . Combat de titan à Aguilera Que du bonheur
jemapelalbert
15 juin 2021J’ai regardé le match, c’est drôle de voir le maillot avec « Gavekal » dessus !! Bravo et félicitations, c’était tendu …
philaud
14 juin 2021Bravo à Biarritz, dommage pour Bayonne ! Et un préfet qui vient semer la zizanie pour des questions de règlement sanitaire et plus encore. Et parle de « parole donnée et pas respectée » ! Celui on devrait le pendre par les c….les sur la barre transversales des poteaux. Honte à lui.
idlibertes
16 juin 2021Le même préfet qui ,juste avant l’ouverture du match a retiré l’autorisation donnée préalablement de vente d’alcool.
Et le même et seul préfet de France capable de pondre une note un Samedi soir de match à 22h30 avec 3 pages de jurisprudence administrative . Tout est dans la spontanéité.
Hugues
14 juin 2021Victoire inoubliable pour les Biarrots,
Une belle montée en Top 14
Bravo Charles pour votre « solide » descente…
Etienne
14 juin 2021Malgré que vous aillez éliminé Vannes,je suis heureux pour vous !Merci pour toute votre humanité !
Xavier.C
14 juin 2021Une petite pensée pour le Provincial Charles Gave, bravo au Biarritz Olympique
https://juste-milieu.fr/roland-garros-biarritz-bayonne-2-salles-2-ambiances/?j=340295&sfmc_sub=2955591&l=491_HTML&u=10874929&mid=510002345&jb=11003&utm_source=sfmc&utm_medium=email&utm_campaign=38+-+Je+n%27ai+pas+résisté+à+l%27envie+de+vous+écrire+!&isBat=false&d=JUM&sk=eGNsYXVkZTAwQGdtYWlsLmNvbQ==&e=eGNsYXVkZTAwQGdtYWlsLmNvbQ==&j=340295&l=491&b=11003&sid=2955591&senddate=2021-06-14
Ricci Michel
14 juin 2021Je suis fan de rugby!
J’espère que l’on pourra voir un match de vos équipes sur une chaîne télé.
Bonne remise en forme à Mr Charles.
Segurel
14 juin 2021Etre en Top 14, cest bien, y rester c est encore plus complique.
Moskito
14 juin 2021Bel article et je comprend le mal aux cheveux de Charles ! Quelle fête autour du BO, MAGNIFIQUE !!!!!! Belle équipe sur le terrain, de belles valeurs de combat.
GEORGIO
14 juin 2021Je ne connaissais pas le rhume Irlandais ,je regarde les pousse-citrouilles à la télévision et je lis l’institut des libertés et quand
j’ai vu le résultat de ce match j’ai immédiatement pensé à vous . sincères félicitations §
Martinolle
14 juin 2021J ai adoré cette chronique ! Mais je suis fan de rugby , ceci explique cela !
Mais qui signe , ce n est pas clair ! C est bien Louis !?
brandenburg
14 juin 2021« s »est fini » et non « c’est finit »
brandenburg
14 juin 2021j’ai fait une erreur aussi: »s’est fini »
Cheunbaba
14 juin 2021Le rhume irlandais explique bien des erreurs inhabituelles comme « envahit » au lieu de ‘envahie’. Quelle chance d’être dans un tel état qu’il en transforme l’écriture. Cela fait presque partie de l’histoire désormais !
Ok
14 juin 2021Félicitations
J espère qu il ne s’est pas cassé la voix en chantant sur la chanson du groupe Europe the final countdown
Jean Louis lespinasse
14 juin 2021Oui mais l’ambiance d’aguilera n’est rien a coté de celle de Jean Dauger Il suffit d’ecouter les chants. Mais bon ,bravo le BO Un agenais ( ne pas sourire ) fan de bayonne
ange et demon
14 juin 2021après la joie les ennuies
le préfet des Pyrénées-Atlantiques Eric Spitz a annoncé saisir le procureur de la République pour non-respect des règles sanitaires lors de ce match.
que va faire Mme la maire? vous soutenir ou vous tomber dans le dos?
ange et demon
14 juin 2021pardon, oui, bon rétablissement à Mr. Charles Gave
LVG
14 juin 2021Il s’est passe deux choses tres rare Samedi soir.
La premiere est un match de rugby qui se finit aux tirs au but. Rarissime.
Encore plus rare: un prefet qui bosse un samedi soir afin de poster une lettre sur les reseaux sociaux deux heures apres la fin du match…
Je crois ne pas trop m’avancer lorsque j’affirme que l’administration francaise n’a jamais ete aussi efficace!
Amities
LVG
Cheunbaba
14 juin 2021C’est vrai que y-a des gens qui y croient encore à tout cela. Ou qui obéissent bêtement aux ordres… les règles sanitaires… il paraît que l’alcool est un très bon antiseptique. Faudrait consulter le conseil scientifique sur le sujet. Il devrait valider j’en suis certain.
Francesco
16 juin 2021le Préfet mérite un placage à retardement d’anthologie !!!
Benoit
17 juin 2021Excellent ! Quand les 18 mois de confinement ont mis a plat la productivité de l’ensemble de la planète et la motivation des troupes du privé comme celle du public (si elle existait), je m’étonne que celle de nos fonctionnaires se soit soudainement améliorée… Qu’il y’ait des raisons bassement politiques me semble fort peu probable étant donné l’éloignement des prochaines échéances électorales. La simultanéité de 2 évènements fort peu probables indique tout de même qu’il ne peut s’agir de hazard… Bravo au BO et a toute l’équipe. Et bravo a l’IDL. Amitiés.
JeanBart
14 juin 2021Bravo et merci pour tout ce que vous faites pour le BO !
Stephane Henry
14 juin 2021Le plus grand derby de l’histoire du sport francais. Merci.
Neige
14 juin 2021Merci Louis-Vincent de nous faire partager ce moment de liesse populaire et de cohésion sociale.
Tous nos souhaits de bon rétablissement à Charles !
Ma fille vit à Vancouver; petite pensée émue pour cette magnifique province qu’est la Colombie Britannique, la randonnée, les lacs, les ours, les canadiens… que de bons souvenirs!