16 décembre, 2019

Sans rééquilibrage des retraites on ne pourra pas reprendre le contrôle des finances publiques

 

 

La France ne pouvait pas être le seul pays du monde à ignorer les lois de la démographie. A juste titre le système de retraite français a été qualifié par Emmanuel Macron  en « état de mort clinique ». Seuls les socialistes en 2012 voulaient encore faire croire aux français qu’il était possible de rétablir la retraite à 60 ans, comme l’avait fait François Mitterrand en 1982. Le système français qui était censé être le meilleur du monde devant être renfloué tous les cinq ou six ans en fonction de l’évolution démographique, il fallait faire quelque chose.

 

Après des mois de cacophonie où Jean-Paul Delevoye, le haut-commissaire aux retraites entré au gouvernement, est même allé jusqu’à expliquer devant un public de jeunes de Créteil que la solution pour équilibrer le système de retraites était d’accueillir massivement des immigrés. Pour faire bonne mesure et sans doute bonne figure, il a même ajouté que les musulmans d’aujourd’hui étaient les juifs d’hier !

 

Edouard Philippe a enfin expliqué cette semaine l’architecture générale de son nouveau système de retraite qui remplacera le système actuel à partir de 2025. La réforme « systémique » qui consistait au départ à uniformiser simplement l’ensemble du système de retraites a pris un tour « paramétrique » où l’on a abordé les problèmes d’âge de départ, de durée de cotisation, de montant des pensions… Le futur régime universel de répartition par points devait être simple, il est devenu très difficile à comprendre. L’équilibre financier ne sera pas atteint en 2025.

 

Les décisions annoncées

 

Le gouvernement a évité le report de l’âge légal de la retraite pour se concentrer sur la mise en place d’un régime universel par points. Alors qu’il fallait repousser progressivement l’âge légal en le décalant chaque année pour atteindre 65 ans d’ici une douzaine d’années

Le gouvernement  pour ne pas toucher à l’âge légal de la retraite a mis en avant le concept « d’âge pivot » qui est devenu ensuite « l’âge d’équilibre »…

 

Il fallait corriger des injustices comme la différence de traitement entre le public et le privé. Le niveau des injustices des régimes spéciaux a été mis en avant car L’Etat verse chaque année plus de 7Md€ pour financer les pensions de la RATP et de la SNCF.

Un retraité de la RATP a droit à 3700€ de retraite pour une carrière complète. Environ 59% des besoins de financement des retraités de la RATP sont couverts par des subventions publiques.

Un retraité de la SNCF perçoit 2636€ pour une carrière complète. Il perdrait jusqu’à 36% de sa pension si on appliquait les modalités de calcul en vigueur dans le privé !

Un agent de l’Etat ou un employé public ne contribue qu’à hauteur de 13% au coût global de sa retraite. Ce qui fait que la facture de l’Etat dépasse les 50Md€ (56,3 Md€ en intégrant les régimes spéciaux)

En revanche un retraité du régime général se voit attribuer 1900€ en moyenne pour une carrière complète.

 

L’Etat finance la plus grande partie des retraites de ses agents. Les pensions civiles et militaires représentent pour 2020 un budget de 57,4Md€ dont seulement 7,3Md€ proviennent des cotisations des agents. Au total cela représente 75% des rémunérations alors que dans le secteur privé les pensions versées sont de l’ordre de 28% des rémunérations.

 

La date d’application est toujours un problème. C’est Emmanuel Macron qui a mis sur la table « la clause du grand père » qui reviendrait à appliquer les nouvelles règles aux nouveaux entrants à partir de 2025. L’application effective de la réforme ne se produirait alors que dans 43 ans !

 

Un système universel par points avec une caisse unique a été retenu pour les revenus allant jusqu’au plafond de la sécurité sociale (40 524€). La valeur du point sera fixée chaque année par les partenaires sociaux.  Les primes des fonctionnaires donneront lieu à cotisation. Cela représente en moyenne 22% de leur rémunération. La transition prendra 15 ans

 

Le taux de cotisation des salariés du privé, du public et des régimes spéciaux seront à terme identiques avec le même taux de 28,12% jusqu’à 120 000€ de revenu brut annuel. Au dela il faudra payer une « cotisation de solidarité » de 2,81% le donnant droit à aucun droit supplémentaire.

 

Les régimes complémentaires seront maintenus. Les 27 md€ de réserves constituées par les professions libérales resteront leur propriété.

 

Les régimes spéciaux intégrés progressivement dans le droit commun après une phase de transition. Les économies de l’ordre de 6Md€ dégagées permettant de revaloriser les petites retraites et de porter la pension minimale agricole à 85% du SMIC.

 

Une pension minimum de 1000€ net par mois pour une carrière complète au smic sera garantie.

 

Un régime de retraite par capitalisation abondé notamment par la CRDS n’a en revanche pas été retenu. A côté du régime de base par répartition il fallait instaurer un système par capitalisation. Il permet aux Danois d’avoir un taux de remplacement de 71,6% pour un taux de cotisation de 12%, aux hollandais de 68,2% pour 16% de cotisation. En France le taux de remplacement n’est que de 60,5% pour un taux de cotisation de 25,4%… !

 

Il faut se demander pourquoi ceux qui manifestent et bloquent le pays par la grève sont les agents du service public qui sont les seuls à ne pas craindre le chômage, ce qui n’est pas le cas de tous les salariés et des commerçants qui souffrent de leurs agissements. La retraite par points était pourtant une idée de gauche. Il est très curieux de constater que la gauche est devenue la grande opposante à la réforme par points. En attendant, la France reste le champion du monde des jours de grève à laquelle est venu s’ajouter la violence des casseurs. La « convergence des luttes » fait toujours recette auprès de l’extrême gauche. Qui n’hésitera pas à gâcher les vacances de Noël des Français » . Le secrétaire général de la CGT-Cheminots a prévenu qu’il n’y aurait « pas de trêve de Noël  »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Auteur: Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Bordeaux, titulaire d’une licence en droit de l’Université de Paris X. Il a été successivement fondé de pouvoir à la charge Sellier, puis associé chez Nivard Flornoy, Agent de Change. En 1987, il est nommé Executive Director chez Shearson Lehman Brothers à Londres en charge des marchés européens et membre du directoire de Banque Shearson Lehman Brothers à Paris. Après avoir été directeur général associé du Groupe Revenu Français, et membre du directoire de Aerospace Media Publishing à Genève, il a créé en 1996 Concerto et Associés, société de conseil dans les domaines de le bourse et d’internet, puis SelectBourse, broker en ligne, dont il a assuré la présidence jusqu’à l’ absorption du CCF par le Groupe HSBC. Il a été ensuite Head of Strategy de la société de gestion Montpensier Finance.

7 Commentaires

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  • calal

    18 décembre 2019

    « Qui n’hésitera pas à gâcher les vacances de Noël des Français” . Le secrétaire général de la CGT-Cheminots a prévenu qu’il n’y aurait “pas de trêve de Noël ”

    Dans un pays dechristianisé ,rien ne justifie des vacances de noel ou une « treve de noel ».

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    • Charles Heyd

      18 décembre 2019

      Dans l’éducation (nationale) on a d’ailleurs déjà « rebaptisé » la dénomination des vacances scolaires (vacances d’hiver ou de printemps ou autres).

  • Normandie

    17 décembre 2019

    Et pourquoi ne pas inclure dans cette pseudo réforme, les retraités privilégiés irresponsables actuels,(EDF, SNCF, RATP, politiques, hauts fonctionnaires…), eux qui ont toujours votés pour leur pomme.
    Ils se sont gavés, et ont laissés tout les problèmes, conséquences de leur très mauvaise gestion et de leur manque de vision et de bon sens, aux générations suivantes et a la partie du secteur « vraiment privé », qui n’est en aucun cas complice de leurs choix.

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  • Bondin

    17 décembre 2019

    Très bonne synthèse.
    On peut juste ajouter que nous payons – très cher – des décisions ineptes et démagogiques prises en 1982 !!!
    Quand on pense que certains voient un grand président en la personne de Mitterrand, ça laisse songeur

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    • Garofula

      18 décembre 2019

      Il paraît grand par contraste avec les quatre présidents fainéants qui ont suivi, un nabot surplombant des nains.

  • Roger

    17 décembre 2019

    Bonne synthèse éclairante sur les retraites. On peut aussi penser que le système à point correspond plus à la diversité des carrières dans le privé et devrait contribuer à faciliter la mobilité des personnes (pas seul critère) dans le public ou la diversité des régimes indemnitaires empêche tout redéploiement des effectifs d’une administration à l’autre. A défaut de pouvoir réduire rapidement les effectifs de public, cela aurait au moins le mérite de pouvoir les réallouer là ou sont les besoins. On peut toujours rêver 🙂

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  • breizh

    16 décembre 2019

    le montant de la retraite d’un agent de la RATP donne également une bonne idée du montant de salaire (traitement) moyen.

    Pour le reste, sans capitalisation, c’est mort de toute façon.

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