Comme les lecteurs le savent, notre but à l’IDL a toujours été de vous aider à gérer votre épargne intelligemment pour que vous puissiez devenir LIBRES.
A cet effet, j’ai présenté il y a quatre années environ une sorte de portefeuille type auquel j’ai fait très peu de changements depuis et dont les performances me paraissent convenables
Aujourd’hui, je voudrais revenir sur une autre notion fondamentale et la voici : Une épargne bien construite doit avoir au moins deux compartiments.
- L’épargne d’investissements ou de long terme. C’est celle qui doit vous permettre de vivre convenablement lorsque vous ne serez plus en âge de travailler. Le portefeuille type IDL essaie de vous aider à gérer cette épargne.
- L’épargne de précaution, contre les chocs inattendus : vous tombez malade, vous perdez votre emploi… De façon générale, les spécialistes vous disent qu’il est bon d’avoir si possible environ six mois de dépenses prévisibles dans des placements totalement sûrs et qui doivent être gérés indépendamment de l’épargne d’investissement. Pourquoi ? Parce que, comme le disait Chirac, les emmerdements volent toujours en escadrille. Vous allez perdre votre boulot en même temps que les marchés financiers vont se casser la figure. Et du coup, vous vendrez au pire moment tout ou partie de votre épargne d’investissement, ce qui risque de compromettre une heureuse retraite.
Et donc, dans une stratégie d’épargne à long terme, la première des choses qu’il faut se constituer c’est, paradoxalement, un stock d’épargne à court terme qui devra rester investi dans des actifs extraordinairement liquides et présentant très peu de risques à la baisse.
Classiquement, l’épargnant dans cette optique achète des bons du trésor à 3 mois émis par le Trésor Local, ou laisse l’argent en cash dans sa banque sur un livret d’épargne. Et donc, l’épargnant ne gagne rien… mais ne perd rien non plus.
Mais il y a sans doute mieux à faire, au moins avec une partie de cette épargne de précaution, ce qui m’amène à vous parler de la théorie des parités des pouvoirs d’achat qui régit les relations du taux de change entre deux pays.
Cette théorie soutient que le taux de change entre deux monnaies dans un système capitalistique ouvert varie toujours sur le long terme en fonction du différentiel d’inflation entre les deux pays.
La logique est simple : pour des produits non périssables, il ne peut y avoir qu’un seul prix pour un litre de lait, une tonne d’acier ou une Peugeot dans une zone économique de libre-échange.
Vérifions en considérant le taux de change entre l’Allemagne et la Grande- Bretagne depuis cinquante ans.
La ligne rouge en haut est simplement le ratio entre l’indice des prix à la consommation au Royaume Uni et l’indice des prix en Allemagne depuis 1973.
La ligne bleue est le taux de change entre les monnaies des deux pays.
Trois constatations s’imposent immédiatement
- L’inflation a été beaucoup plus forte en GB qu’en Allemagne.
- Et du coup le Mark (euro) est beaucoup monté vis-à-vis de la Livre depuis 1973.
- Le taux de change (Ligne bleue) revient toujours sur la ligne rouge (confirmation de l’arbitrage pour revenir à un prix unique).
La question se pose donc immédiatement : quand la ligne bleue s’écarte de façon excessive de la ligne rouge, n’y a-t-il pas une tres forte probabilité qu’un retour vers la moyenne se produise ce qui me permettrait de prendre des positions sans grand risques ? La réponse est oui.
C’est ce que je m’attache à montrer avec le graphique du bas qui donne les écarts en % entre la ligne bleue et la ligne rouge.
Et il semble bien que quand le taux de change est au dessus de + 13%, ou en dessous de – 13 % par rapport à son niveau d’équilibre ( la ligne horizontale à 0 %), prendre un pari que cet écart va revenir à zéro a payé, à chaque fois…
Il est amusant de constater que les grandes occasion d’achat sur la livre sterling se sont produites trois fois sur quatre pour des raisons politiques
- Le FMI à Londres
- La réunification allemande
- La Grande Crise financière
- Le Brexit
Et à chaque fois, il fallait faire l’inverse de ce que les médias disaient.
En fait, lire les journaux et prendre en compte la politique est la façon la plus certaine de se ruiner.
A chaque fois, quand la livre a été sous-évaluée par plus d’un écart type, il fallait faire le contraire de ce que vous disaient les journalistes, c’est-à-dire acheter.
Et la même chose est vraie pour le Mark allemand. La réalité est simple : si le politicien ou le journaliste ont compris quelque chose, c’est que c’est déjà dans le marché…
Revenons à nos moutons.
Je suis un épargnant français et je cherche un placement avec tres peu de risque et qui me permettra d’avoir une meilleure rentabilité sur mon épargne de précaution. Vendre l’euro pour acheter la livre est neutre. Que faire ?
Voici une idée : acheter les bons du trésor suédois qui rapportent du 4. 1 % et vendre les bons du trésor français qui rapportent du 3.8 %.
Si tout se passe bien, et que la ligne noire revient sur la ligne bleue, je vais me faire un petit 10 % (de 0.089 à 0.099) qui ne demandera rien à personne…
Et comme les fondamentales de la Suède sont bien meilleurs puisque la Suède a une tres faible dette étatique, des excédents budgétaires, des comptes courants excédentaires, une monnaie flottant librement…il n’est pas impossible que je passe de sous-évaluée pour la couronne a surévaluée, ce qui me ferait un autre 10 %.
Mais ce second 10 % serait de la spéculation…
Parier sur le retour à la moyenne d’un taux de change en se fondant sur la parité des pouvoirs d’achat est donc une bonne façon d’avoir une meilleure rentabilité sans vraiment augmenter son risque.
La question suivante est donc : quelles sont les monnaies sous-évaluées en parité des pouvoirs d’achat en ce moment ?
- Le yen, bien sûr. La sous-évaluation du yen est tout simplement grotesque.
- La couronne suédoise
- La couronne Norvégienne
Et quelles sont les monnaies surévaluées ?
- Le dollar US contre tout le monde
- L’euro contre tout le monde sauf le dollar US.
Conclusion
Il existe des solutions pour l’épargne de précaution des lecteurs qui ne passent ni par le dollar, ni par l’euro et qui utilisent des supports de bien meilleure qualité.
Ces solutions reposent sur une théorie qui a fait ses preuves
Autant mettre tout ou partie de son épargne de précaution dans ces actifs.
Auteur: Charles Gave
Economiste et financier, Charles Gave s’est fait connaitre du grand public en publiant un essai pamphlétaire en 2001 “ Des Lions menés par des ânes “(Éditions Robert Laffont) où il dénonçait l’Euro et ses fonctionnements monétaires. Son dernier ouvrage “Sire, surtout ne faites rien” aux Editions Jean-Cyrille Godefroy (2016) rassemble les meilleurs chroniques de l'IDL écrites ces dernières années. Il est fondateur et président de Gavekal Research (www.gavekal.com).
Michael
14 février 2024Et le franc suisse?
M-S
13 février 2024Suite à la scission de Sodexo, je voulais savoir si vous conserver Sodexo et Pluxee dans le portefeuille IDL. Cordialement.
Florian
11 février 2024Des supports avec peu de frais pour garder son épargne de précaution a proposer pour acheter les monnaies sous-évaluées en parité des pouvoirs d’achat ?
Soufiane
10 février 2024Malheureusement en pratique je ne vois pas du tout comment se positionner sur les obligations suedoises (pas d’etf ou autres a ma connaissance). Reste le cash. Mais alors de l’euro ou de l’usd a 3% ou plus est peut etre plus interessant
Yves
8 février 2024Pourriez vous nous parler un jour de l’investissement en private equity ?
Karl Descombes
6 février 2024Le diable est dans les « détails ».
Ne pas oublier de prendre en compte:
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1) le risque de blocage de transfert de capitaux
Ce n’est pas tant hypothétique que cela.
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En cas de crise grave, c’est déjà prévu par l’UE. Je vous invite à relire l’Article 66 (ex-article 59) de l’UE.
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Mais avant cela, le système bancaire sera dissuasif et punitif. C’est déjà partiellement le cas.
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Ne pas mettre ses oeufs trop loin de l’Europe et de ses intérêts stratégiques internes.
Ou être prêt à aller dépenser son argent là où il a été basculé.
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2) les frais de transactions internationales et de garde
Un simple exemple: sur l’Amérique du Sud, un aller-retour de capitaux, cela coûte entre 8 et 15% en frais bancaires!
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Soit autant que ce qu’il y a à gagner sur les courbes de l’article en 5 ans !
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Pour moi l’international ne se conçoit que sur des gros coups. Des X fois quelque chose.
Pas des + 15%.
Il faut que la rentabilité dépasse largement la volatilité sur le change cumulée avec les frais.
Sinon c’est de la roulette russe ou du divertissement façon casino, comme on veut voir les choses.
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Où alors, l’international est pour parquer de la valeur en prévision d’une émigration.
Mais c’est un autre sujet.
eol
8 février 2024Transferwise, le bitcoin, etc vous permettront d’avoir des taux de transfert en amérique latine proche de 0%
Micat
6 février 2024Ma vision s’améliore à chaque nouvel article… Merci.
Pour aller plus loin, j’utilise un compte type Wise pour gérer simplement les devises étangères, mais je cale pour les obligations d’états en SEK… une suggestion?
Michel Higuet
6 février 2024En Belgique précompte mobilier de 30% sur les intérêts mais si c’est via un fond ou ETF c’est 30% sur la plus value…
Philippe
5 février 2024Obligation Etat Norvege 4,1% / an
Obligation Brésil 10%
Paco
5 février 2024Je lis : « la logique est simple : pour des produits non périssables, il ne peut y avoir qu’un seul prix pour un litre de lait, une tonne d’acier ou une Peugeot dans une zone économique de libre-échange. »
Le litre de lait est donc un produit non périssable ? Vous avez toute ma confiance pour la gestion des avoirs financiers, pour ce qui est de celle du frigidaire … 🙂
Cordialement
Gabriel
9 février 2024Un litre de lait UHT (celui qui se trouve majoritairement en supermarché) est non périssable.
Un litre de lait frais est périssable
Tourecanyan
5 février 2024Je suis en CHF depuis 1 an (de 1 à 0935 ce jour) aucun regret.
Robert
6 février 2024Je suis en CHF depuis des années, aucun regret non plus…
amoreau
10 mars 2024Bonjour, Novice en placement je souhaiterai placer en CHF sans le risque d’une récupération par l »état
Merci de votre aide
Cordialement
Hervé
Roger
5 février 2024Billet du lundi sur une actualisation des PPA bienvenu et toujours très éclariant.
Après vos premiers articles sur le Yen et la Livre Sterling et je l’ai mise en place et suis assez satisfait. Encore merci pour ces leçons d’économie très utiles.
Francois Benoit
5 février 2024C’est quelque chose a suivre de près quand même. Je rentre en 2020 en obligations SEK, je dois sortir en 2022 sinon je me prend une baisse de -5% en 2023 en taux de change. Comment peut-on faire le graphique parité pouvoir d’achat pour suivre cela?
Michel Higuet
6 février 2024En 2023 rien ne oblige à convertir en EU, vous pouvez rester et réinvestir en SEK ( sauf si vous avez besoin de votre argent ).
Gabriel
9 février 2024Si je ne fait pas d’erreurs, ce genre de graphiques est disponible sur Neystor, service proposé par Richard Détente et conçu en lien avec les équipes Gavekal
Christian T
5 février 2024Et le rouble ? Merci !
Bernard B
5 février 2024Merci pour cette analyse détaillée et pertinente. Comment se positionne le franc suisse vis à vis de l’épargne de précaution ?
L G
5 février 2024Vous ne présentez que trois monnaies sous-évaluées et deux sur-évaluées. Comment mesurer les autres monnaies ?
Charles Heyd
5 février 2024J’ai déjà dit ici et répété combien j’admire vos graphique mais là j’ai une question sur le dernier; si j’achète maintenant la couronne suédoise, pas celle de Charles III, dans combien temps avec mon épargne de précaution, puis-je éspérer récolter quelques gwenecks (monaie bretonne!) car la dernière fois que cela s’était présenté c’était il y a plus de 10 ans? Sur le fond je n’ai rien à dire sinon à approuver.
Alain B
5 février 2024Très pertinent. Merci beaucoup