28 octobre, 2015

On enterre peut être le scénario de la déflation un peu vite

Les économies ralentissent partout. Cela n’empêche pas les marchés de se réjouir des derniers propos de Mario Draghi, président de la BCE. On est toujours dans le keynésianisme primaire qui consiste à penser que c’est l’Etat ou la Banque Centrale qui créent de la richesse. Pourtant l’observation de la réalité montre que les banques centrales sont impuissantes pour faire face à une croissance atone.

L’endettement mondial a progressé de 40% du PIB mondial depuis 2007. La politique de « taux zéro » pratiquée par toutes les banques centrales ont maintenu en vie des sociétés mal gérées qui auraient du disparaître et des gouvernements peu courageux qui n’ont pas su faire de réformes… 

L’hyper inflation qui devait être la conséquence logique de politiques monétaires très laxistes n’a pas eu lieu. La quasi totalité des économistes l’anticipait pourtant. Il faut donc bien maintenant se poser la question de la vigueur des pressions déflationnistes…

Les sociétés de matières premières connaissent en ce moment une crise de solvabilité qui est loin d’être terminée. Elle sera proche de la fin quand nous assisterons à des mégafusion du type BHP + Billiton et Exxon + Mobil. Des pays sont désormais dans une situation budgétaire compliquée. Le déficit de l’Arabie Saoudite, victime de la chute de ses recettes pétrolières inquiète le FMI. A la tête du troisième fonds souverain mondial, elle a été obligée de retirer 70Md$ aux sociétés de gestion à qui elle avait confié des fonds à gérer. Les sociètés les plus exposées à ce mouvement sont les très grandes sociétés de gestion : Blackrock gère 4800 Md$, Vanguard 3100, State Street 2400, Fidelity 2100 et Allianz 2000.

L’euthanasie du rentier va donc continuer. Observons que les obligations ont réalisé une performance supérieure à celle des obligations depuis douze mois et surtout n’oublions pas que cet été certains ETF se traitaient avec 40% de décote tant la liquidité des marchés avait disparu !

On a du mal à voir « la France apaisée » de Monsieur Hollande…

La pression fiscale s’est alourdie en France de 58 Md€ en plus sur les ménages en six ans. Les régimes de retraites sont en quasi faillite. Sans alignement des régimes publics sur ceux   aux mêmes conditions et sans report formel de l’âge de départ à la retraite pour tout le monde, le système ne fera qu’accumuler les déficits au cours des prochaines années. Rappelons une fois de plus le courage de l’association « Sauvegarde des retraites » qui se bat contre les mesures de spoliation des régimes de retraite du privé. Les derniers accords sur l’Agirc-Arrco, présentés par les media comme un « sauvetage », ne feront en fait qu’aggraver un peu plus les différences de traitement qui prévalent, en matière de retraites, entre les deux sphères publique et privée.

Les « économies » réalisées par la Sécurité Sociale, ne sont si on les regarde de près que des économies en trompe l’œil

Quant aux chiffres du chômage, un peu moins mauvais le mois dernier, ils n’ont aucune chance de s’améliorer si les mauvaises performances du bâtiment continuent. La responsable principale est bien évidemment Cécile Duflot, ancienne ministre en charge du bâtiment qui a largement contribué à casser le marché. Il est totalement anormal d’avoir eu sept ans de recul consécutifs du marché de l’immobilier. En matière de justice l’impuissance publique devient préoccupante. En ce qui concerne les participations de l’Etat, il est le pire de tous les actionnaires

L’Europe aura encore droit à un nouveau « softpatch monétaire »…

L’Europe est plus exposée aux marchés émergents que les Etats Unis. Les pays qui ont le plus fort taux de dépendance en chiffre d’affaire étant les Pays Bas (24% de l’indice), l’Espagne (22%), la Grande Bretagne (15%). L’Allemagne est à 10% et la France à 9%. Tout le monde a compris qu’il y aurait encore un « softpatch monétaire » de la BCE cet hiver. Elle n’a en effet pas d’autre choix que d’amplifier encore sa politique de rachat d’actifs

En Allemagne, même si Volkswagen représente 10% des exportations allemandes, il ne faut pas enterrer trop vite les exportateurs allemands. L’excédent des paiements courants de l’Allemagne est toujours de 8,5% du PIB avec un excédent budgétaire pour la quatrième année consécutive. Les marges de manœuvre sont donc grandes. La seule inquiétude pourrait être le développement des mouvements anti islam qui manifestent ensemble, selon Die Welt, contre la politique menée par Angela Merkel

L’économie chinoise décélère mais n’implose pas

C’est l’impression de panique donnée par les dirigeants chinois pendant l’été qui a fait dire à certains que la Chine était en faillite. Pour eux, la Chine serait une boite noire car le gouvernement mentirait sur les chiffres. Quand on regarde les chiffres, on ne constate pas de baisse des volumes d’importation sur le pétrole, le minerai de fer ou le cuivre. On voit que les services sont en forte croissance autour de 12%. La consommation se tient bien. La transformation de la Chine en empire économique se poursuit.

L’excédent commercial chinois est toujours aussi important car tout ce que la Chine importe vient de baisser de moitié.

La première émission en Renminbi effectuée à partir de Londres pour la « People’sbank of China » a été couverte plus de six fois, offrant un rendement de 3,1%. Cette émission sera suivie par celles de Agricultural Bank of China et China Construction Bank. Si le RMB fait partie des monnaies de réserve c’est environ 1000md$ qui devront s’investir sur la devise chinoise. Les obligations en devise chinoise constituent une opportunité d’investissement intéressante. L’accès à ce marché étant difficile pour les particuliers, il vaut mieux investir dans un fonds.

Aux Etats Unis, le scénario d’une hausse rapide des taux s’éloigne alors que la croissance faiblit. Le dollar a cessé de monter. Les salaires commencent à progresser.

La dynamique du marché actions est devenue négative. La volatilité extrême des ETF inquiète beaucoup les investisseurs….

Les banques européennes poursuivent leur chemin de croix

Les banques européennes sont malades de l’hyperrégulation. Elles manquent de visibilité en matière réglementaire. Le régulateur américain a été particulièrement dur avec les banques européennes, surtout la BNP. La Société Générale va diminuer de 20% le nombre de ses agences. HSBC va supprimer dans les mois qui viennent 50 000 emplois. Deutsche Bank doit procéder à près de 6Md€ de dépréciations dans ses comptes. Le Crédit Suisse va procéder à une augmentation de capital de 6,5Md CHF. Comme toutes les banques en Europe le groupe cherche à avoir plus de capital, moins de risques et moins de coûts.

Pendant ce temps, les banques américaines dominent les marchés. Les résultats de Morgan Stanley ont toutefois été bien inférieurs aux prévisions des analystes. Dans l’histoire, on a rarement vu les marchés actions monter quand les banques n’allaient pas bien…

Auteur: Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Bordeaux, titulaire d’une licence en droit de l’Université de Paris X. Il a été successivement fondé de pouvoir à la charge Sellier, puis associé chez Nivard Flornoy, Agent de Change. En 1987, il est nommé Executive Director chez Shearson Lehman Brothers à Londres en charge des marchés européens et membre du directoire de Banque Shearson Lehman Brothers à Paris. Après avoir été directeur général associé du Groupe Revenu Français, et membre du directoire de Aerospace Media Publishing à Genève, il a créé en 1996 Concerto et Associés, société de conseil dans les domaines de le bourse et d’internet, puis SelectBourse, broker en ligne, dont il a assuré la présidence jusqu’à l’ absorption du CCF par le Groupe HSBC. Il a été ensuite Head of Strategy de la société de gestion Montpensier Finance.

5 Commentaires

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  • Marquais des Lambert

    10 novembre 2015

    La déflation aurait de telles conséquences que les gouvernements raisonnables (je ne parle pas du notre bien-entendu) feront tout pour éviter ce scénario auprès duquel le naufrage du Titanic n’est que divertissement.

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  • riz

    2 novembre 2015

    Si on observe le cas du Japon un surendettement aboutit à la déflation , un vieillissement accéléré de la population aussi .Le cas de la Grèce est aussi intéressant déflation par la dette , l’atrition économique (baisse des salaires car révélation de la non compétitivité du pays) . Pour l’Espagne aussi si l’on continue de nous focaliser sur les salaires on a une déflation car la monnaie à l’instar de la Grèce ne peut plus s’adapter .Donc oui déflation par une inadaptation de la structure économique (euro , déclin du à un socialisme exacerbé, déflation par les impôts excessifs qui étouffent l’économie équivalent à une dévaluation interne par les impôts) .Déflation du prix des matières premières nous entrons dans une ère de surabondance des matières premières car crise de surproduction, économies d’énergies avec la décarbonisation à venir le prix du pétrole ne peut plus remonter car capé par les pétroles de schiste où les points morts viennent de s’abaisser et rentables à partir de 50$ pour une mise en production ultra réactive en 2 mois (réouvrir un puits de schiste) .Déflation par les taux d’î c’est bien la preuve que nous sommes en déflation sinon les taux ne seraient pas aussi bas , un krach oblig et paf nous versons dans une hyper déflation .Déflation de part l’ouverture de la concurrence internationale avec peu à peu suppression des droits de douanes , émergence d’une Inde industrielle avec des coûts très bas dans les années à venir .Déflation de part la robotisation à venir (explosion dans les 5 ans à venir) .
    Déflation dans la guerre des monnaies où les règles sont non coopératives .
    La reflation marche mal (QE inefficients , hausse des impôts , baisse des taux à zéro ….) .

    Il faudra donc mettre des taux d’î à -5% et vous en faites pas le crédit va repartir , faire une guerre , annuler toutes les dettes par autorité et la déflation par la dette s’amenuiser , fermer les frontières , augmenter les salaires si c’est possible mais ça dur qu’un temps, taxation de l’épargne (comptes bancaires) .
    On le voit aux Etats Unis qui ont toujours 10 ans d’avance sur nous les salaires des jeunes sont inférieurs du fait de la disparition de mini jobs dans le commerce, numérique oblige , on a des emplois fantômes où le numérique permet d’échapper à l’impôt, cotisations de toutes sortes ce qui à terme mettra à mal le système de retraite et santé .Les Etats perdent la main sur la fiscalité, les rentrées fiscales où la concurrence est désormais mondiale surtout avec le numérique , elle pourrait perdre la main sur les emplois fantômes aussi d’où le regain de surveillance .
    La déflation a plus de chances de l’emporter sur l’inflation dans le contexte actuel mais puisque le « politique » (Etats, banques centrales etc …) font ce qu’ils veulent au final s’ils veulent vraiment de l’inflation c’est possible de la faire revenir .

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  • Roger Duberger

    28 octobre 2015

    Merci pour ce billet,
    Je suis d’accord avec vous, mais je ne pense pas que l’on entre en déflation dans les prochains trimestres. Il me semble que la baisse des matières 1ères (pétrole, minerais) est déflationniste, mais d’ici un an ou un peu plus le cours du pétrole et des minerais devrait remonter. Je pense que l’opep, les émirs et les russes vont trouver un point d’accord pour un pétrole plus cher. Tout le reste suivra. Par ailleurs, la population mondiale augmente et avec elles les besoins d’infrastructure, donc la croissance n’est pas terminée.
    En France, et dans d’autres pays d’Europe, il y a eu une bulle immobilière qui se dégonfle, en France on a tout fait pour paralyser le marché de l’immobilier (réforme des plus values avec des délais plus longs, ce qui a diminué le nombre de mutations, donc moins de droits de mutation pour les collectivités, moins de travaux de remise en état etc…Cela allait commencer avec Sarkozy qui voulait interdire aux propriétaires la déduction des travaux d’amélioration !!!! (nous sommes menés par des ânes) On sait bien que les bailleurs sont peu enclin à faire des travaux, alors si on refuse la déduction de ces frais !? Finalement, les politiques essaient de relancer les économies occidentales par du Keynésianisme et de la dette, j’ai le sentiment que plus on fait de la dette et plus cette relance est faible (comme la loi des rendements décroissants) mais est-ce que l’on va et pourra rembourser cette dette ? ou on va faire défaut et voler un peu plus les épargnants ?

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  • Gerldam

    28 octobre 2015

    D’après ce que vous dites, il semble que, si on a quelque bien, il vaut mieux être liquide en ce moemnt et attendre le prochain krach pour racheter des actifs dévalués.

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  • nolife

    28 octobre 2015

    Bonjour,

    « Observons que les obligations ont réalisé une performance supérieure à celle des obligations depuis douze mois et surtout n’oublions pas que cet été certains ETF se traitaient avec 40% de décote tant la liquidité des marchés avait disparu ! »

    N’est-ce pas plutôt « actions depuis douze mois » ?

    Sinon pour l’absence de liquidté, C. Parisot évoquait au contraire une surliquidité, par exemple comme ils ont tellement de liquidité, certains gérants décident d’acheter une thématique et l’a font décollé puis quand la mode change, ils la retirent et comme ils y avaient tellement de liquidité dessus elle subit une grave décote

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