27 février, 2013

Les mauvais signes s’accumulent pour l’économie Française

La sphère publique n’a toujours rien compris à la troisième révolution industrielle. C’est le message qu’a fait passer Christian Saint Etienne économiste au CNAM invité  cette semaine par l’Institut des Libertés pour présenter son dernier livre « France : état d’urgence. Une stratégie pour demain ». Pour lui, l’effondrement de notre compétitivité et de nos performances s’accélère. L’état d’esprit de la population par rapport au travail a complètement changé depuis la mise en place de la loi sur les 35 heures. Le principe de précaution instauré en 2005 pourrit l’action collective. Toutes ces erreurs obligent de taxer toujours plus ceux qui tirent la machine. Cela ne peut pas marcher. Opposer les « riches » et les « pauvres » est le degré zéro de l’action politique…

Les experts en hollandisme nous expliquent depuis des semaines que le moment de la baisse des dépenses publiques devrait en fin arriver. On peut en douter sur trois faits qui méritent un commentaire cette semaine car ils permettent d’éclairer la réalité qui est le sujet qui nous préoccupe : la nomination de Ségolène Royale à la BPI, la suppression du jour de carence pour les fonctionnaires et le rétablissement du Tribunal d’Instance à Tulle !

La Promotion Voltaire de l’ENA était déjà surreprésentée. François Hollande a placé ses camarades de promotion à tous les étages de l’administration et de la vie politique. Personne ne doute de la qualité du millésime de cette promotion, mais la nomination de Ségolène Royal au poste de numéro deux de la Banque Publique d’Investissement (BPI) est un mauvais signe. Les interférences entre la politique et la gestion des banques n’ont jamais donné de bons résultats, ni en France ni à l’étranger. Le Crédit Lyonnais sous la direction de Jean Yves Haberer avait pris l’habitude de dire oui à tous les dossiers qui étaient présentés par le pouvoir socialiste de l’époque. Pendant quatre ans d’un règne sans partage il a poursuivi sans dévier le but qu’il s’était fixé « avoir le plus gros bilan du monde » Cela a produit l’une des plus grandes débâcles bancaire européenne. L’établissement a du faire  l’objet d’un « plan de restructuration » entièrement payé par le contribuable français.  L’état a injecté 45 MdF en 1994, 4MdF en 1995 et 98 MdF en 1996 ! La faillite de Dexia est de même nature. Le mélange entre la banque et la politique donne de très mauvais résultats. Il a été nécessaire pour la France et la Belgique de garantir pour 90Md€ d’engagements de la banque ! En Italie Monte Dei Paschi di Siena est aussi un bon exemple. A force d’être dans sa région toujours le prêteur et l’employeur de dernier ressort, l’établissement a fait faillite. Le crédit ne relève pas de la politique mais du métier de banquier !

Un seul membre de la promotion Voltaire de 1980, Henri de Castries président d’Axa est sceptique. Compte tenu de la politique qui est menée par son camarade de promotion, il doute de la capacité de la France à conserver des taux bas sur les marchés.

Les langues se délient également dans les rangs des économistes qui ont soutenu publiquement François Hollande : Daniel Cohen, notamment professeur d’économie à l’École Normale Supérieure,  explique que le problème est maintenant de savoir si la France ne joue pas avec sa crédibilité. Qui lui fera confiance dit il si elle ne tient pas elle même les objectifs qu’elle s’est fixée.

Le jour de carence sur les arrêts maladie des fonctionnaires prévoyait depuis 2012 qu’ils n’étaient pas payés le premier jour de leur arrêt maladie. Cela avait permis de réduire un peu l’écart avec les salariés du secteur privé qui doivent attendre trois jours pour percevoir des indemnités. Le gouvernement a décidé cette semaine de supprimer le jour de carence des fonctionnaires. C’est un mauvais signe.  Cela coûtera 60M€ à l’état employeur et 70M€ aux hôpitaux. On croit rêver que cette décision ait été prise au moment où il faut réduire les dépenses publiques. La décision du gouvernement est particulièrement inopportune écrit l’éditorialiste du Monde. La France est incapable de voir la réalité en face et de penser le long terme.  Le gouvernement ne sait que lâcher du lest en faveur de sa principale clientèle électorale, dont le salaire net moyen est pourtant  de 2377€ par mois contre 2041€ pour le secteur privé !

Le rétablissement du Tribunal d’Instance à Tulle est aussi un très mauvais signe. Il avait été très difficile de moderniser la carte judiciaire française. Le fait que François Hollande par clientélisme électoral le rétablisse montre à quel point la Corrèze semble pour le président plus importante que la France !

Quant à la place accordée par le gouvernement et les media au père qui vitupérait en haut de sa grue « contre les bonnes femmes du gouvernement » , on aurait aimé un peu plus d’intérêt pour le suicide par le feu d’un chômeur en fin de droits. Il est vrai qu’il y en a 1000 de plus par jour ! Thiérry Breton président d’Atos et ancien ministre de l’économie estime qu’il y aura malheureusement 250 000 chômeurs de plus à la fin de l’année. Une fois de plus, il tire la sonnette d’alarme sur la bulle d’illusion des taux. La France a une dette de 1800Md€ dont la durée de vie moyenne est de 7 ans , ce qui nécessite d’emprunter chaque année entre 200 et 250Md€ auprès d’investisseurs étrangers qui détiennent à hauteur de 65% la dette française. Pour tenter de rester dans les clous, le gouvernement aura besoin d’au moins 10Md€ de recettes supplémentaires en 2014. En attendant des mesures concrètes sur la baisse des dépenses publiques on va désindexer les aides publiques  qui ne seront plus revalorisées au rythme de l’inflation et fiscaliser les prestations sociales ….On voit que la « stabilité fiscale » qui avait été promise par François Hollande n’est plus qu’un vieux souvenir et que la France est dirigée par une équipe qui préfère ouvrir les sujets sociétaux plutôt que d’affronter la crise économique.

Comme le dit Patrick Artus directeur de la recherche et des études de Natixis tout se dégrade dans l’économie française mais rien n’attire l’attention pour le moment…

 

Les incertitudes sur la politique des banques centrales grandissent

L’or ne joue plus son rôle d’amortisseur. Les incertitudes ne manquent pourtant pas mais l’or physique (SPDR Gold Shares) a baissé de 12,5% depuis son plus haut d’octobre dernier et les mines d’or (Market Vectors Gold Mine) ont cédé 30% pendant la même période. La principale raison de ce comportement réside dans la décision de la Federal Reserve américaine. Dans la lecture des « minutes » de sa dernière réunion de janvier, elle  a laissé entendre que sa politique monétaire considérée comme laxiste touchait à sa fin. Les motivations qui attiraient les investisseurs vers l’or sont en train de disparaitre.

 

Aux Etats Unis, Guy Stern le gérant de Standard Life Absolute Return a décidé de réduire substantiellement son exposition aux valeurs américaines. John Praveen de Prudential a quant à lui réduit ses positions en action sur toutes les places. Il y a trop d’incertitudes dit il : l’Italie, l’Espagne, le fiscal cliff américain…

A la Banque d’Angleterre trois membres sur les neuf du Comité de Politique Monétaire se sont exprimés en faveur de plus d’injections de liquidités. Cela a fait immédiatement baisser la Livre Sterling à un plus bas depuis 15 mois. La Banque Centrale Chinoise devrait plutôt resserrer la liquidité de son économie alors que la Banque du Japon s’apprête à faire l’inverse.

Tout cela conduit George Magnus de UBS à prévoir une hausse du dollar. Il fait remarquer que sur la liste des pays susceptibles de faire le moins défaut sur leur dette les Etats Unis sont à la cinquième place, ce qui est plutôt une place enviable. L’euro reste coincé entre le Japon qui dévalue et l’Allemagne qui refuse d’emboiter le pas…

 

Le message paradoxalement positif des élections italiennes

 

En Italie,  Mario Monti a perdu son aura dans la bataille électorale.  C’est probablement un moment historique dans l’histoire de l’Europe, car il rappelle aux technocrates de Bruxelles qui ne sont pas élus que leur gestion dispendieuse est incompréhensible par les électeurs de la majorité des pays européens. Charles Gave président de GaveKal, estime que c’est peut être le signe de la fin du projet de construction de l’Europe et qu’il est temps  de revenir à la démocratie et aux prix de marchés. C’est probablement pourquoi certains gérants comme Marco Bruzzo de Mirabaud Gestion estiment que les entreprises italiennes ont une valorisation qui est 15% inférieure à celle des valeurs de l’Euro Stoxx 50.

 

 

Retrouvez l’intervention de Christian Saint-Etienne ici

 

 

 

[youtube]http://youtu.be/YRsz0FipogU[/youtube]

 

et aussi

 

 

[youtube]http://youtu.be/Q1EKIuVVAJc[/youtube]

Auteur: Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Bordeaux, titulaire d’une licence en droit de l’Université de Paris X. Il a été successivement fondé de pouvoir à la charge Sellier, puis associé chez Nivard Flornoy, Agent de Change. En 1987, il est nommé Executive Director chez Shearson Lehman Brothers à Londres en charge des marchés européens et membre du directoire de Banque Shearson Lehman Brothers à Paris. Après avoir été directeur général associé du Groupe Revenu Français, et membre du directoire de Aerospace Media Publishing à Genève, il a créé en 1996 Concerto et Associés, société de conseil dans les domaines de le bourse et d’internet, puis SelectBourse, broker en ligne, dont il a assuré la présidence jusqu’à l’ absorption du CCF par le Groupe HSBC. Il a été ensuite Head of Strategy de la société de gestion Montpensier Finance.

14 Commentaires

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

  • alex

    4 mars 2013

    Je suis toujours amuse de ceux qui souhaitent « prendre aux riches » et qui, si ces derniers refusent, les taxent de manquer de patriotisme, ou sortent « l elan nationale ». Je me demande toujours dans quelle mesure il est « patriotique » de la part de la classe politique de mener des politiques economiques catastophiques et de pratiquer le clientelisme afin de se faire reelire. Enfin c est tout de meme tres pratique comme argument; « vous ne voulez pas payer pour notre politique? Aaah vous etes un egoiste! ». Ca evite surtout de devoir defendre son programme….

    Répondre
  • le peron

    1 mars 2013

    Bpi ………..un désastre annoncé.

    La France bénéficie de taux anormalement bas

    Les commentateurs donnent diverses explications .

    Je souhaite ardemment qu’ils aient raison.

    Mais j’ai peur que ce soit nos hommes politiques qui aient pu influencer ces taux en vendant tout ce qui pouvait etre vendu y compris l’indépendance de la politique de la France .

    Répondre
  • ch cartwright

    28 février 2013

    La BCE achetera toutes les OAT françaises…..comme la FED qui achete 95% des 30Y US…
    la BCE achetera aussi toutes les obligations italiennes et espagnoles….comme le fait le Japon pour sa dette…
    Seul hic,l’Allemagne aura quitte le navire européen….
    Personne ne veut souffrir….et les politiques ont compris comment se faire elire et réélire…
    Endettons les jeunes ..qui ne protestent absolument pas de se faire voler leur futur a 30 ans….pour financer le rythme de vie de la fonction publique …..
    les bienheureux ..))
    Rappelons que chaque jeune qui rentre sur le marche du travail a 67.000 euros de dette publique a rembourser…..et un salaire de misere )) et le PS va continuer de charger la mule …..comme on le voit

    Répondre
  • alex

    28 février 2013

    Cher Monsieur,

    Merci pour vos interventions toujours interessantes.

    Cordialement,

    Alexandre

    Répondre
  • Pseudonyme Anonyme

    27 février 2013

    Aucun enregistrement disponible de l’intervention, chez vous, de M. Christian Saint Etienne ? A tout le moins, un compte rendu ? Ce serait une appréciable plus-value bien que je conçoive que cela demande du temps.

    Merci pour ce bel article de M. Netter.

    Répondre
    • Pseudonyme Anonyme

      27 février 2013

      Problème de navigateur, milles excuses. Et une liberté de ton qui fait plaisir.

    • idlibertes

      27 février 2013

      Cher Monsieur,

      il est en fin d’article si toutefois les nagigateurs/ etc filtres laissent passer les video sinon en lien sur notre page facebook aussi.
      Cdlt

      Idl

    • pseudonyme anonyme

      28 février 2013

      C’était bien cela. Vous pouvez supprimer mes posts, ils sont inutiles.

  • jcgruffat

    27 février 2013

    Cela s’appelle l’emprunt obligatoire, c’est de l’impot differe..
    Mais de la spoliation garantie..

    Répondre
    • jepirad

      1 mars 2013

      Et alors pour ceux qui le peuvent pourquoi pas dans le cadre d’un élan national. Et puis les impôts et taxes actuelles sont bien obligatoires.
      Comment voulez vous qu’on résorbe durablement la dette. Impossible par la politique de ces dernières années. La méthode de l’emprunt d’Etat est peut-être la seule solution au problème dans lequel nous sommes embourbés.

  • jepirad

    27 février 2013

    Ségolène Royal aurait pu se satisfaire d’un rôle de « consultant » d’autant qu’elle exercera à titre gracieux.
    Pour la journée de carence c’est surtout une question d’équité à l’égard du privé. Il aurait même fallu porter la carence à 3j dans la FP.
    Pour l’Italie pas sûr que les italiens l’aient vu comme cela puisqu’ils reprochent à M. Monti l’austérité.
    (Je me lance) : pour la dette publique française pourquoi ne pas la nationaliser pour moitié en émettant des bons du Trésor (il me semble que l’idée vient de NKM), plutôt que d’engraisser les milieux financiers.

    Répondre
    • VXLV

      27 février 2013

      Et qui les achetera, ces bons du Trésor ?
      Seulement les Français ?

    • Olivier Le Phuez

      27 février 2013

      Est ce que ce n’était l’idée des emprunts « Baladur »? avec à l’époque Ministre du budget N. Sarkozy.

    • jepirad

      1 mars 2013

      Pourquoi pas les français. Le patrimoine représente 7 fois la dette publique, en racheter la moitié n’en représenterait que 8% de celui-ci. Ainsi il suffit de réduire l’impôt sur les sociétés à 15% et supprimer toutes les mesures confiscatoires, d’où compétitivité accrue, relance, création d’emplois, etc…amélioration des recettes, …bref le cercle vertueux, le contraire de la politique qui est menée depuis plus de 15 ans.
      Mais la technocratie et la finance associée ne laisseraient pas faire.
      Donc probabilité d’un tel scénario….0.

Me prévenir lorsqu'un nouvel article est publié

Les livres de Charles Gave enfin réédités!