27 janvier, 2025

Dans la série les mystères financiers, les dividendes du S&P 500 exprimés on Or.

Comme mes lecteurs s’en doutent, je suis fasciné par la sagesse des marchés financiers à générer des valeurs éternelles, des invariants dirait un physicien.[1]

Prenons un exemple : Comme chacun le sait, une société, quand elle gagne de l’argent, distribue une partie des profits en dividendes et ces dividendes grimpent au travers du temps pour les sociétés bien gérées. Aux USA, il existe un indice agrégeant 500 sociétés dont la plupart payent des dividendes car les mauvaises sociétés sont virées de l’indice, ce qui permet à la pérennité des dividendes d’être quasiment assurée.

Et j’ai accès à la statistique du montant annuel du dividende payé par cet indice depuis 1925, alors même que les sociétés composant cet indice ne sont plus les mêmes.

Depuis un siècle, je sais que ce dividende est passé de 40 cents par an environ à $ 52 aujourd’hui, ce qui veut dire que le dividende de l’indice a été multiplié par un facteur de 130 en dollars courants depuis un siècle, ce qui parait être très satisfaisant. Mais, très curieusement, si je convertis ce dividende, qui est exprimé en dollar US, en sa contrepartie en or, je remarque avec émerveillement que le dividende du S&P 500 revient toujours à un gramme d’or.

C’est ce que montre le graphique suivant.

 

Quand j’ai découvert ce fait, il y a quelques temps déjà, j’en suis resté comme deux ronds de flan.

Avant que je n’essaie de fournir une explication, il me faut commenter le graphique.

  • La ligne noire représente les dividendes en dollars courants US, payés année après année par l’indice des actions aux USA.
  • La ligne rouge représente la valorisation journalière de ces mêmes dividendes convertis en Or.
  • Comme le lecteur peut le voir, tant que le dollar était convertible en or, la ligne noire et la ligne rouge étaient les mêmes, sauf quand le dollar a dévalué contre l’or, ce qui s’est passé en Janvier 1934 (Dévaluation du dollar par Roosevelt).
  • Bien entendu, les deux lignes divergent après la rupture du lien entre le dollar et l’or par Nixon.
  • Mais très curieusement, la ligne rouge continue à toujours revenir vers 1 gramme d’or (1) comme elle le faisait avant.
  • Les hachurages gris représentent les récessions aux USA. Ces récessions risquent de faire baisser les distributions de dividendes, et la ligne rouge souvent commence a baisser avant que la récession n’arrive.
  • Les deux lignes horizontales en pointillés marquent les frontières de décision (1 écart type dans chaque sens).

Au-dessus de 1.279, il faut vendre les actions et acheter de l’or, en dessous de 0. 58, il faut faire le contraire. Le dernier signal de vente du marché américain contre l’or s’est produit en octobre 2018.

  • Voici le résultat de ce dernier signal.

L’or a fait beaucoup mieux que le S&P 500 à pondération égale (la ligne rouge), chaque valeur représentant sans arrêt 1/ 500 -ème de l’indice, et a eu exactement la même performance que le S&P pondéré par la capitalisation boursière de chaque valeur (la ligne noire).

Comment expliquer ce phénomène de retour à la moyenne ? Telle est bien entendu la question suivante.

Voici mon explication, mais dont je suis loin d’être sûr… et je serais très heureux si les lecteurs pouvaient en trouver une autre plus convaincante. En tout cas, ça ne peut pas être un hasard statistique.

Imaginons que j’ai fait un héritage considérable (100) qui me permette d’arrêter de travailler alors qu’il me reste x années à vivre.

À tout moment, j’ai le choix

  1. De tout mettre en or et de vendre 100/ x -ème de l’or de départ chaque année, ce qui me permettra de vivre tranquillement, en bon rentier que je suis, sans aucun souci, sauf si je venais à vivre beaucoup plus longtemps qu’attendu, puisqu’après x années, je n’aurai plus rien.
  2. De tout mettre dans le S&P 500, qui va me payer des dividendes équivalents en valeur or de ce que j’aurais touché en vendant mon or, et ces dividendes sur le long terme resteront en moyenne à une valeur or égale en or à x % de mon capital de départ valorisé en or lui aussi.
  3. Je vivrais tout aussi noblement que dans le premier cas, mais à la grande différence que mon capital sera intact (sauf variations du marché) et que je pourrais le laisser à mes enfants. Mais je me fous des variations du marché puisque j’ai mon revenu d’un gramme d’or qui tombe régulièrement.

Et donc le « deal » que propose le marché des actions US semble être le suivant : vous me confiez votre capital et vous aurez le même revenu que si vous aviez gardé votre or, mais, vous pouvez retrouver tout votre capital à tout moment en vendant le S&P.  Mais, historiquement, il valait mieux choisir le S&P que l’or quand le dit marché était très bon marché par rapport à l’or que le contraire, c’est-à-dire quand la valeur des dividendes était supérieure à la valeur d’un gramme d’or…

Pour faire simple : le marché propose au rentier de lui louer son capital pour un loyer égal à ce qu’il toucherait chaque année s’il liquidait petit à petit sa position en or, ce qui revient à me fait passer du rôle de rentier à celui d’entrepreneur en minimisant mes risques au maximum.

Brillant.

Et quand je pense à tous les technocrates qui n’ont qu’une idée, me voler mon argent, je m’émerveille de la bonté du marché qui me permet de vivre de mes revenus sans entamer la valeur de mon capital.

Vous savez quoi ?

Vive le marché.

A bas les technocrates.

 

 

 

[1]  Sur ce sujet, je dois être dans une minorité d’une personne.

 

Auteur: Charles Gave

Economiste et financier, Charles Gave s’est fait connaitre du grand public en publiant un essai pamphlétaire en 2001 “ Des Lions menés par des ânes “(Éditions Robert Laffont) où il dénonçait l’Euro et ses fonctionnements monétaires. Son dernier ouvrage “Sire, surtout ne faites rien” aux Editions Jean-Cyrille Godefroy (2016) rassemble les meilleurs chroniques de l'IDL écrites ces dernières années. Il est fondateur et président de Gavekal Research (www.gavekal.com).

9 Commentaires

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

  • Henry

    1 février 2025

    Pour une fois c’est mal expliqué, j’ai rien compris, 52 $/an de dividende cela veut dire quoi ? la valeur moyenne de l’action pondérée est de X et elle donne 52 $ je suppose ? Alors cela ne reflète que le hasard car si je fais un split de toutes les actions, j’achèterai 0.1 g d’or ?

    Répondre
  • Abel25

    29 janvier 2025

    Article très intéressant, merci pour ces séances de réflexions économiques hebdomadaires.
    Pour pousser plus loin ce qui semble manquer au premier graphique c’est le prix en gramme d’or du S&P lui même. On comprendrait alors à quoi correspond ce gramme d’or de dividende.
    Enfin si je comprends bien, ce que suggère Charles, c’est que l’indice S&P dividende réinvesti, bat l’or. Mais en moyenne de combien de % par an ? Merci.

    Répondre
    • Charles Heyd

      29 janvier 2025

      Je suis d’accord avec vous pour évaluer le « poids » du S&P en or mais pour ce qui est des dividendes, si je comprends bien le billet l’investisseur se repose sur ses dividendes qui lui sont payés et non pas réinvestis sinon il ne touche rien jusqu’à la liquidation totale.

  • lionel

    28 janvier 2025

    Je ne vois pas la même chose. Un ratio qui a varié de 0.2 à 3 sur une si longue période, ça ne sert à rien, il y a trop peu d’occurences pour arriver à confirmer la stratégie.
    Mais cela reste des actifs qui sur le long terme gagnent ou conservent de la valeur et qui sont peu corrélés et donc un portefeuille avec ces 2 actifs a un interet.

    Répondre
  • CharlesM

    28 janvier 2025

    On peut peut-être considérer que le dividende est la prime de risque que le s&p verse par rapport à l’or, tout comme il a une prime de risque sur les treasuries.
    Cette prime semble être de 2.5 % sur le long terme , elle est de 1.22 % aujourd’hui

    Répondre
  • Pétulante

    28 janvier 2025

    Brillant et édifiant ! En France, bientôt nous n’aurons plus rien et nous serons heureux…

    Répondre
  • Yepyep

    27 janvier 2025

    Plus simple et moins prise de tête. Ratio dj/or. Qd sup à 15, vendre actions, achat or. Qd inf à 5, acheter actions, vendre or. 6 opérations en 120 ans. Très peu de commissions et au golf tous les jours.

    Répondre
    • Matthieu Cubeta

      31 janvier 2025

      Vous, vous avez vu la vidéo de grand angle parue il y a quelques années sur le sujet…

  • Sissou

    27 janvier 2025

    Est ce que les dividendes seront équivalents au grammes d’or chaque année? Il peut y avoir des hauts et des bas ?

    Répondre

Me prévenir lorsqu'un nouvel article est publié

Les livres de Charles Gave enfin réédités!