Il existe historiquement deux critiques de l’homme-machine, une de droite et une de gauche. Mais il n’y a pas de raison que nous ayons à choisir. Il nous faut au contraire prendre acte des deux, et les lier dans une unique vérité, qui fera tomber le masque du mensonge.
La critique de droite, fondée sur l’enseignement actuel de l’Église catholique, décrit l’anéantissement de la filiation naturelle, les assauts contraceptifs de la chimie contre les corps féminins, l’apologie cachée de l’eugénisme abortif, la publicité pour l’euthanasie, la réduction des relations humaines à un vaste égoïsme baptisé désir, enfin tout ce qui touche au corps dans son expression communautaire.
La critique de gauche, inspirée d’un christianisme plus lointain qu’elle peine à reconnaître, met en évidence la vassalisation biométrique du corps, les attaques qu’il subit par la destruction de son environnement, sa conformation au modèle économique du moment, enfin tout ce qui touche au corps dans sa dimension métaphysique.
Il n’y a pas de raison que nous ayons à choisir entre ces deux critiques. Au contraire, nous pensons que c’est seulement en les assumant toutes deux qu’on se donne la possibilité de corriger leur partialité. Nous pensons que face aux hommes-machines, la réponse tient en deux mots : « écologie humaine ». Deux mots simples qui nous ouvrent pourtant les portes d’une réflexion éthique générale qui saura ne rien oublier, ni des moyens, ni des fins pour résister à la colossale entreprise à moitié inconsciente qui menace à la fois la vie de l’humanité et la perpétuation de la création. Pris dans le délire actuel d’un monde qui ne se reconnaît plus de barrières sinon techniques, et parfois financières, et barrières qu’il ne supporte jamais que le temps de résoudre l’équation qui lui permettra de les déplacer un peu plus loin, il n’est rien de plus rageant que de considérer ces deux moitiés de critique perpétuant leur faux antagonisme historique. Rien de plus rageant que de voir le partisan de la décroissance moquer l’évêque africain qui s’oppose à la promotion permanente du préservatif par des agences occidentales auprès de son peuple ; rien de plus rageant que de voir le militant pro-life faire l’apologie des OGM. Il est vrai que la première qualité de notre époque réside dans sa capacité de flicage généralisée et que quitte à prendre des coups à la contester, on est naturellement porté à limiter son champ d’action. Attaquer sur tous les fronts, c’est, croit-on, ou réduire la portée de sa critique ou brouiller inutilement les pistes. Or, il n’est rien de plus utile qu’une contre-offensive englobante quand l’ennemi porte le fer frontalement. C’est véritablement l’humain qui est en jeu aujourd’hui et se taire sur le moindre point serait criminel.
Il n’est rien de plus important en pareille situation que de parvenir à désigner entièrement l’ennemi. Or, il est évident que le relatif antagonisme qu’ont développées chacune des traditions relève autant de jeux de langage que de leur collusion, parfois active, souvent passive, avec le système qu’elles dénoncent. On a cru aux vertus de la dialectique et que cette dialectique s’exerçait principalement au milieu de deux visions du monde, progressisme libéral ou progressisme dirigiste-collectiviste, lesquelles gardaient une part de liberté vis-à-vis d’elles-mêmes en laissant jouer une contestation interne. En réalité, c’était créer un seul camp dominant qui englobait, coupé en deux donc inoffensif à force d’agressivité déployée pour rien, son véritable ennemi. On a taylorisé la critique, l’a segmentée, coupée en petits morceaux, tronçonnée, saucissonnée, on lui a fait accroire qu’elle n’existait pas comme pensée cohérente ou du moins qu’elle ne pouvait avoir d’efficace qu’en corrodant des secteurs réduits du système qu’elle attaquait. On le sait, comme pour l’autre, la plus grande ruse de la technique est de faire croire qu’elle n’existe pas : qu’elle n’existe pas comme anthropologie concurrente, raisonnée, qui va vers sa fin, qui emploie des moyens que l’on peut nommer et qui emporte avec elle une eschatologie. Les deux critiques séparées souffrent intrinsèquement, alors qu’elles ont vocation à l’universel, et souffrent secrètement, d’être limitées chacune à un champ.
L’esprit du capitalisme est ce qui nous domine durant toute cette époque : sa perversité est telle que, quand bien même nous le critiquions, nous faisions toujours encore partie de son dispositif. Par exemple, la droite, et parmi elle beaucoup de chrétiens, même quand elle constatait le vide que cet esprit imposait à l’expression communautaire des corps, était tellement habitée par la peur de passer sous le joug de son voisin tyrannique, le communisme athée, qu’elle commença de qualifier le capitalisme de moindre mal pour, petit à petit, tomber amoureuse sans s’en rendre compte de son efficace matérialisme. Génération adultère, tributaire d’antiques traditions, ne voulant en aucun cas renoncer à posséder un dieu, elle adora l’argent, avec une sincérité dans sa foi à faire pleurer un anachorète. Et par exemple, la gauche, et parmi elle beaucoup de chrétiens, quand elle adopta le socialisme progressiste comme paradigme, ne fit en réalité qu’apporter du grain à moudre à la grande machine qui constitue le fonds ultime du capitalisme, savoir les rouages de la production illimitée. La gauche adulant la révolution perpétuelle ne faisait que préparer des déserts immenses où la graine de l’ivraie du capitalisme, qui produit l’assuétude, pourrait tomber quand le temps serait venu et, croissant solitaire, enfin préparer l’avenir qui est à l’homme-machine.
La fragmentation de la critique nécessaire de ce monde a au moins l’avantage par l’impuissance dont elle fait preuve de mettre en lumière les carences de chacun de ces deux langages séparés. Si les deux fers ne sont pas portés en même temps sur la plaie, nulle guérison n’est à entrevoir : l’obligation de dépasser les fausses lignes tracées à la craie par la domination se dévoile alors comme un devoir supérieur. C’est ce à quoi nous appelle l’histoire récente, où l’on n’a jamais imposé que des pansements temporaires aux plaies les plus vives, pansements vite emportés, cicatrices vite décousues par un nouvel emballement du système.
S’agissant de l’homme, la droite tient pour la vie, la gauche pour la liberté. Et, par un contrepoint qui n’est paradoxal qu’au premier regard, s’agissant du réel non humain, c’est-à-dire de l’environnement et de la création, alors la droite tient pour la liberté et la gauche pour la vie. Ce chiasme met au jour, plus sûrement qu’aucune image, la logique interne de chacune de ces contradictions. Pour nous, c’est aux quatre coins de cette croix que nous voulons regarder, et ne perdre aucun horizon de la réalité. C’est la vraie perspective que de se tenir dans ce centre vers où se déploient tragiques quatre voies.
Auteur: idlibertes
Profession de foi de IdL: *Je suis libéral, c'est à dire partisan de la liberté individuelle comme valeur fondamentale. *Je ne crois pas que libéralisme soit une une théorie économique mais plutôt une théorie de comment appliquer le Droit au capitalisme pour que ce dernier fonctionne à la satisfaction générale. *Le libéralisme est une théorie philosophique appliquée au Droit, et pas à l'Economie qui vient très loin derrière dans les préoccupations de Constant, Tocqueville , Bastiat, Raymond Aron, Jean-François Revel et bien d'autres; *Le but suprême pour les libéraux que nous incarnons étant que le Droit empêche les gros de faire du mal aux petits,les petits de massacrer les gros mais surtout, l'Etat d'enquiquiner tout le monde.
Le Rabouilleur
11 mai 2022L’homme-machine aura toujours besoin d’huile de coude pour fonctionner correctement.
René Descartes (1596 – 1650)
whitelander1
11 mai 2022C’est oublier qu’en physique moderne qui explore des conditions très déséquilibrées et des systèmes chaotiques, le temps Lyapunov (du nom du mathématicien russe Alexandre Liapunov) désigne une période où un certain processus qu’il soit physique, mécanique, quantique voire biologique, se développe ay delà des limites de prévisibilité précise ou probable et entre dans ub monde chaotique.
En d’autres termes, le temps Lyapunov s’écoule irréversiblement dans une seule direction et par conséquent ne consiste pas en une trajectoire définie une fois pour toutes dans l’espace quadri-dimentionnel, mais en « évènements », en mouvements complètement imprévisibles qui sont arbitraires. Ce qui remet en cause le prédictif ci-dessus de « l’homme-machine » qui plus est, nie la présence de l’Esprit, fut-il éonique dans la matière !
whitelander1
12 mai 2022Il faut remonter au XVIIIème siècle, au siècle dit des Lumières pour découvrir « L’Homme-Machine » du médecin-philosophe français Julien Offray de la Mettrie (1709-1751) aux positions matérialistes , qui rejette toute idée de Dieu. Alors que la Loi divine est celles des trajectoires linéaires, où la droite exclut la gauche et où le sommet st incompatible avec le fond. Les nouménalistes avec leur logique singulière furent les premiers hérauts de la dégradation spirituelle.
Frank Deljeune
11 mai 2022In 1954, the British mathematician Alan Turing published a paper with heading. « Can the machine think » His conclusion was that by the end of the century it would be difficult to distinguish,´in the process of thinking as defined by the commonly used vocabulary’, whether it emanates from a human or from a machine. Indeed humans are increasingly becoming machines, mainly through the influence of media conditioning – and behave like Pavlov dogs. But conversely “Deep Blue”, à machine, is today the world chess champion.
Harari, in his book “Homo Deus” states that the human being is now able to be God by himself, but at the same time the “Data »‘ i.e. information accumulated into computers in form of data, is superseding the human and will enslave humans the same way that humans have enslaved animals.
Hence the ethical issues you – and all of us – are dealing with are minor when compared to the Human destiny, whether you are a believer or not.
nikoopol
12 mai 2022i.a. auto apprenante ou pas, il y aura toujours pour elle un petit quelquechose qu’elle ne comprendra pas d’elle, il en est de même pour l’Homme sur lui méme.
Le processus de langage est déjà acquis pour les « machines » mais ce n’est que ressemblance.
Steve
11 mai 2022Bonjour
Réduire l’humain au biologique et à son utilité sociale, qu’elle soit marchande ou politique signe le fascisme, de droite ou de gauche…..
Au delà des fixations idéologiques, il se pourrait bien que l’on puisse discerner la « droite » de la « gauche » simplement par le fait qu’un humain abordant une problématique par la « droite » le fasse du point de vue des droits et libertés de l’individu dans la société et l’humain abordant cette problématique par la « gauche » le fasse du point de vue du collectif, de l’intérêt général.
Et il n’y a pas de juste milieu, de ligne bien droite au centre, qui ne serait alors qu’une raie avec un trou….
Puisque vous citez le christianisme, sa position est de rappeler sans cesse que l’humain diffère de l’hominidé, du primate, en ce qu’il se rapporte à une transcendance.
Cette transcendance trouve son application dans l’histoire de notre société occidentale par la révélation du Sinaï: la Constitution, les 10 paroles, ne vient pas de l’Homme mais de ce qui le transcende, elle échappe donc aux caprices et humeurs du Prince du jour. Le contre exemple, c’est le code d’Hammourabi, antérieur à cette Loi , qui contient des adresses semblables mais qui est le fait d’un Prince et donc peut être aboli par le Prince suivant. Ce qui empêche toute pérennité et croissance d’une société.
C’est uniquement le fait de considérer qu’un humain, quel que soit son statut social puisse être en relation avec une transcendance dépassant l’homme, qui empêche l’absolutisme criminel qu’il soit de gauche ou de droite, politique ou marchand.
Et c’est pourquoi le fascisme qui croît se fait l’adversaire résolu et forcené de toute religion. L’ Eglise catholique étant la plus visée en raison de son passé impérial et de ses propres faiblesses humaines ( admises chez les politiques mais pas chez ceux qui font profession de gardiens des vertus!)
Toute la rhétorique fasciste est fondée sur la réduction au biologique et à l’utilitaire .
Cordialement
nikoopol
10 mai 2022Pour compléter Germain…
S’il faut se construire un plan pour ne perdre aucun horizon, je trace un trait entre survivalisme et positivisme [E PHILIPPE+HULOT sic.], puis je place le point (final) du « transhumanisme »[onfray].
L’homme machine ? notion qui suit le darwinisme social… c’est passé! je suis TODD, RN-LREM deux pôles opposés d’un même phénomène social, le temps de l’Homme, considérer ceux qui sont « expérimentés », prendre le temps… même de penser, cela ne tient plus (ou pour peu).
L’influence, n’est pas une dictature contraignante jusqu’à imposer « aux sujets » (style totalitarisme du XX siécle), il ne vise qu’au maintien d’une hégémonie du verbe.
Les conflits d’intéret ne sont plus scandaleux.
Sur ou hyper-réalisme :
« ce n’est pas d’aujourd’hui que les H fonctionnaires se sucrent, alors votons pour le meilleur »; « soit mais ce n’est pas le plus compétent »; « tu rigoles il a réussi à convaincre les investisseurs étrangers de souscrire, plus, à la dette nationale », « dans ta boite et pour l’état tu défends la rigueur, tu es sur ce que tu dis ? »
Frank Deljeune
13 mai 2022C’est quand même contingey, tout ça, non ? Qui se souviendra de ces oiseaux dans 10 ans ? Et même dans 5 ?
germain
10 mai 2022Existe-t-il encore en France, une France de gauche et une France de droite? Je n’en suis pas si sûr. Les Français dans leur majorité sont des trouillards, ils ont peur du chiffon rouge agité par le pouvoir énarchique jacobin: en 1940, en France, 40 millions de pétainistes! en 1944, 40 millions de gaullistes pour faire court!
La société française d’avant mars 2020 honorait, à peu près, des valeurs défendues par le Code Civil de Napoléon, à savoir le droit à la vie privée (qui agonise aujourd’hui), le droit de propriété (qui aussi agonise aussi vu la confiscation des biens meubles et immeubles des russes, et je ne parle pas des oligarques russes).
Aujourd’hui les acquis juridiques du Français sont remisés dans la brouette d’internet, le monde des nouvelles technologies, et dans le virtuel ou le mensonge systémique(la société méta au système schizophrène).
Les élites françaises veulent rendre virtuel nos droits individuels par l’oubli et l’indifférence médiatique pour renverser la liberté de penser, de se déplacer, entre autre. Les élites instillent la peur et la langueur chez leurs concitoyens pour mieux les contrôler et les mener à l’abattoir.
Au regard des derniers résultats électoraux, Macron a été élu avec 33% des électeurs, deux électeurs sur trois ont voté contre « jupiter » ou se sont abstenus. Néanmoins, cela fait des millions d’agneaux qui ont choisi d’aller à l’abattoir, leurs opposants s’y refusent et veulent continuer la lutte…Ils refusent surtout que les mougeons ne les entraînent dans leur exécution sanglante.
Philippe
11 mai 2022La trouille règne depuis la grande secousse de 1974. De Gaulle parti c’est le déclin a grands pas ; il faut » remercier » Giscard pour son merveilleux » emprunt » indexé sur ‘ or qui a plombé la dette publique et a conduit aux privatisations sous Mitterrand-Chirac . De la chute du communisme en URSS , la France a été incapable de nouer une alliance solide avec Moscou . C’est l’Allemagne inféodée aux USA qui a décidé de ne pas donner naissance a la grande europe de Brest a Moscou . La suite se déroule maintenant avec cette guerre qui était déjà dans les cartons de la CIA depuis 2004-21012 . Ceci pour contredire les deux visions de l’homme machine . La technique est adorée a gauche comme a droite : il s’agit de produire plus a moindre cout et de rendre la vie plus confortable . A ce point de confort technique , reste un seul probléme encore non résolu : la vie quasi-eternelle grace a la technique génétique ( cellules souches remplaçant les cellules mortes ) . Ce progrès technique est en route et effacera les ultimes vestiges religieux .
Pièces & Main d'oeuvre
10 mai 2022Pour creuser plus encore le sujet: https://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=plan