Quel que soit le plan de paix final, pour l’Ukraine et pour la Russie, le plus difficile sera le temps d’après. Reconstruire le pays, gérer les blessés et les veuves, passer à une économie de paix, se repositionner sur la scène internationale. Le chantier est immense.
La paix finira-t-elle par arriver ? Donald Trump semble sur le point de parvenir à ses fins en imposant une paix à l’Ukraine qui scellera la perte des territoires de Crimée et du Donbass. Mais qui peut aussi assurer sa sécurité pour les prochaines années.
Ukraine : gérer la paix
La perte des territoires occupés par l’armée russe ne fait plus débat. Après la paix, l’Ukraine se réveillera sans la Crimée et le Donbass, amputée de près de 20% de son territoire. Des espaces qui sont peuplés de populations russophones et en situation de rébellion depuis 2014. Cette perte territoriale peut être une chance pour l’Ukraine : recentrée sur sa population ethnique, débarrassée de régions séparatistes qui pourrissent la vie du pays depuis plus de dix ans, l’Ukraine sera plus homogène et unie. Elle pourra ainsi se concentrer sur le défi de la reconstruction et sur son intégration dans le nouvel ordre mondial.
Cette reconstruction sera autant matérielle que morale.
Il faudra restaurer les villes rasées et les bâtiments détruits, ce qui nécessite des capitaux et du temps, mais ce qui est finalement le plus simple à mener. À condition que le pays purge ses réseaux de corruption et assure une transparence des fonds engagés et des critères d’attribution des marchés publics.
Mais la reconstruction la plus difficile sera morale. La réintégration des soldats dans la vie civile, le soin apporté aux mutilés physiques et psychologiques, la gestion des veuves et des orphelins. L’Ukraine devra faire avec des classes creuses et des populations réfugiées à l’étranger qu’il ne sera pas aisé de faire revenir et de réintégrer. Ce lien social est néanmoins indispensable pour rebâtir l’Ukraine de demain.
Après la guerre, il faudra aussi à Kiev retrouver la voie des élections, donc du débat démocratique, des médias indépendants, des controverses. Et son corollaire : le droit de regard et d’inventaire sur la façon dont la guerre fut conduite et menée. Quelle place aura alors Zelensky ? Sera-t-il vu comme le héros de la nation ou bien lui reprochera-t-on la perte de territoires ? L’Ukraine n’en a pas fini avec les débats sur la mémoire et l’histoire.
Kiev est déjà inséré dans les relations internationales et pourra aisément reconstruire son industrie, faire revenir des forces vives, attirer des capitaux et des professionnels étrangers. Si le pays a lourdement souffert de la guerre, l’Ukraine a plus d’atouts que la Russie pour assurer sa reconstruction.
Russie : le plus difficile arrive
La Russie a gagné la guerre locale, mais elle a perdu la guerre globale.
Localement, elle ressortira de cette guerre avec la Crimée et le Donbass, territoires qu’elle contrôlait déjà depuis 2014, via les proxys de la rébellion, mais dont elle disposera cette fois-ci officiellement. Dix ans de guerre pour posséder ce qu’elle avait déjà : le gain est maigre.
Au débit de Moscou : les morts et les amputés, frappant de plein fouet une démographie défaillante, annihilant les efforts de Vladimir Poutine pour redresser sa démographie. Sans compter les ingénieurs et les classes éduquées qui sont partis pour échapper à la guerre, et qui ne reviendront pas. La Russie va récupérer les populations du Donbass, mais voit partir ses meilleurs éléments.
À l’échelle mondiale, Moscou a perdu son influence dans les pays baltes. Tétanisés à l’idée de subir le même sort que l’Ukraine, ils ont rompu tous les ponts, chassant notamment les entreprises du port de Riga. Moscou se voit ainsi privé d’un accès à la mer Baltique.
En Asie centrale, même schéma : depuis 2022 celle-ci s’est tournée vers l’Union européenne et la Chine. Les steppes asiatiques ne sont plus l’étranger proche de la Russie. Ce qui est gagné au Donbass est perdu partout ailleurs : l’espace d’influence russe sort rétréci de cette guerre.
Dans les années qui viennent, la Russie va être un objet disputé entre les deux empires : la Chine et les États-Unis.
Pour Pékin, c’est la revanche de Mao sur Staline. La Russie va lui fournir le gaz et l’électricité dont a besoin son industrie pour gagner la course à l’IA et pour multiplier ses innovations. La Russie sera pour la Chine un réservoir de matières premières dans laquelle elle pourra puiser et dont les 120 millions d’habitants vieillissants et amputés des meilleurs éléments ne pèseront rien face au milliard chinois. La Russie a gagné des arpents du Donbass, elle a perdu la ressource majeure de ces années d’IA : de la matière grise.
Pour les États-Unis le plan est clair : empêcher cet assemblage de Pékin et de Moscou ; empêcher que l’énergie russe irrigue l’industrie chinoise. D’où le plan de Trump en apparence favorable à la Russie : il s’agit de maintenir Moscou vers l’Occident pour en faire son vassal.
Si la France disposait d’une politique, c’est la voie qu’elle devrait suivre : tendre la main à la Russie pour l’empêcher de tomber dans l’escarcelle chinoise, rouvrir les voies énergétiques pour que le gaz et le pétrole russes irriguent l’Europe et non pas l’Asie. Encore faudrait-il disposer d’une vision géopolitique, ce qui n’est pas le cas.
Après l’économie de guerre, qui consiste en un keynésianisme débridé, la Russie va devoir atterrir et passer à une économie de paix. Avec quoi ? L’inflation, déjà forte, va être amplifiée, les meilleurs sont partis, les structures industrielles sont vieillissantes.
Si, dans le plan de paix de Trump, l’Ukraine semble défaite, pour l’avenir, c’est la Russie qui est le plus en difficulté.
Auteur: Jean-Baptiste Noé
Jean-Baptiste Noé est docteur en histoire économique. Il est directeur d'Orbis. Ecole de géopolitique. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages : Géopolitique du Vatican. La puissance de l'influence (Puf, 2015), Le défi migratoire. L'Europe ébranlée (2016) et, récemment, un ouvrage consacré à la Monarchie de Juillet : La parenthèse libérale. Dix-huit années qui ont changé la France (2018).
le chinois
8 décembre 2025National Security Strategy of the United States of America
November 2025
https://whitehouse.gov/wp-content/uploads/2025/12/2025-National-Security-Strategy.pdf
Audois
7 décembre 2025Article superficiel de propagande globaliste qui ignore tous les faits qui iraient à l’encontre des présupposés idéologiques de l’auteur. Bref, du vent…
Vel
10 décembre 2025Eh bien développez alors au lieu de critiquer sans une once de démonstration!!
Pascal
6 décembre 2025Encore un article sur la guerre d’Ukraine plus proche de la propagande de LCI que d’une analyse géopolitique factuelle: c’est dommage, pour maintenir votre qualité habituelle, vous devriez vous concentrer sur les sujets que vous maitrisez et éviter les autres.
Amicalement,
Explorer76
6 décembre 2025Vous négligez la démographie chinoise en chute libre et le poids du confucianisme. Quand la Chine sera peuplée de vieillards qu’en fera t’elle? Pareil pour la Russie. L’Europe garde une chance si elle redresse sa démographie et abandonne le socialisme. La France a une carte à jouer en nettoyant sa fiscalité et son système scolaire en restaurant la libre concurrence et en éliminant subventions et assistanat.
Rob
7 décembre 2025« L’Europe garde une chance si elle redresse sa démographie et abandonne le socialisme. La France a une carte à jouer en nettoyant sa fiscalité et son système scolaire en restaurant la libre concurrence et en éliminant subventions et assistanat. »
Comme diriDe Gaulle » vaste programme… »
Patrice Pimoulle
8 décembre 2025A Rob: c’est le gaullistenChirac qui a mis le socialisme en place en vue d reprendre La Francafique a Giscard,. Rate. Alors de Gaullem cous comprenez…
Vel
10 décembre 2025Mais vous n’avez toujours pas compris le dessein de Macron et de l’Impératrice de la norme?? Laissez tomber la carte à jouer, vous ne voyez pas ce qui est devant vous.
Guillemet
19 décembre 2025Avec des »si », on peut toujours rêver !
Dimitracopoulos
6 décembre 2025Je suis perplexe, l’inversion discours. À chaque paragraphe il y a matière à discussion et à contestation prendre une heure pour tout détailler. Vacciner pendant cette période trouble les femmes enceinte.
Quelques fois le titre n’a pas de valeur.
adrien michel
6 décembre 2025Selon M Noe la RUSSSIE aurait perdu ses meileurs ingenieurs qui auraient quitté la Russie. Mais quid des 10 miilons d’ukrainiens qui ont fui leurs pays et dont la plupart ne reviendront jamais.
Quant à L’EUROPE elles est saignée par le coût de l’aide à l’Ukraine, sans compter le poids de l’aide à la reconstruction
Charles Heyd
6 décembre 2025He oui, la Russie a peut-être perdu des ingénieurs mais l’Ukraine combien en a-t-elle perdu? Mystère et boule de gomme! Et les fonds qui sont allés en Ukraine ou à Bruxezlles ou dans les pays baltes?
Olivier Cane
6 décembre 2025Je suis très étonné par cet article, c’est bien la première fois que Monsieur Noé me déçoit par une analyse qui est dénuée de tout fondement et qui reprend la propagande d’un BFM ou autres media avec une vision franco française. La Russie au contraire a profité des sanctions européennes pour se tourner vers l’Asie, Inde et Chine et jouer un rôle plus important au niveau des BRICS. Cette guerre lui a permis de moderniser son industrie et réduire sa dépendance des européens et USA, ce qui est une excellente stratégie sur le long terme. En prenant du recul, on voit bien que la Russie a tout à gagner de cette guerre.
Patrice Pimoulle
7 décembre 2025Le globalisme, cs forme un tout…
Patrice Pimoulle
6 décembre 2025Cet article reprend la these de Breszinsky sans ‘Le Grand Echiquier. Cette these est entierement fausse, La necessite d’annexer la Crimee pour y instataller une base americaine n’a pas eu lieu. la brutalite du royaume barbare anflo-saxon a eu pour effet de jeter la Russie, qui a 2000 ans de civilisation derriere elle. dans les bras de la Chine, qui a 5000 de civilisation derriere ellem de l’Indem et de l’Indonesie. Ce ne sont pas la Russie et la Chine qui sont encerclees par l’Europe et les Etats-Unis, ce sont les Etats-Unis qui sont encercles par la Chine en Asie et la Russie en Europe, La paix en Uktaine ne fait aucune difficulte,
pieta
5 décembre 2025Je suis abasourdi.
Je lis toujours avec intérêt et modestie les éclairages de monsieur Noe.
Mais là … je suis au regret de dire que je lis la position d’un think-tank atlantiste modéré (j’assume cet oxymore)
Le Russie avait déjà le Donbass en 2014, la Russie discréditée à l’international, la Russie sans ressources intellectuelle pour son développement, la Russie avait une influence réellepositive dans les pays baltes avant 2022 … ces affirmations sont très clairement fausses, pour ce que je peux lire sur différents médias réellement indépendant.
Désolé, mais sur la problématique russe et BRICS, monsieur Noe be fait que répéter des poncifs de l’occident .
Cordialement
Charles Heyd
6 décembre 2025Hélas, vous avez raison!
BERJOT
5 décembre 2025Une analyse macroniste!!!! C’est tout le contraire. Jean-Baptiste Noé veut-il un poste à l’Élysée??
guerbert andré
5 décembre 2025La Russie de l’ ouest, c’ est le centre de l’ Eurasie. Après de siècles de guerres internes ( Mongols, Tatars, Cosaques), la Russie moderne, intellectuelle, artistique était tournée vers l’ ouest. Mais les ressources naturelles, objectif des USA, nation guerrière, a changé la donne. La Russie, une fois de plus convoitée par l’ Amérique pour être dépecée, a vu l’ armée US à ses portes et son attaque n’ a été qu’ un acte de défense. L’ armée ukrainienne étant la chair à canons des Américains qui ont fomenté le coup d’ état de 2014 et mis le guitariste au pouvoir. L’ Ukraine, couloir de passage de belligérants depuis des siècles, aura du mal à retrouver un drapeau, le communisme passé reste une empreinte indélébile ayant conservé des idées nazies et engendré une corruption généralisée. Souhaitons malgré tout la paix et l’ effacement de ce gâchis dans quelques décennies,
La Grande Russie, nationaliste, spirituelle a survécu à tout depuis 1000 ans. les USA, en fin de règne ont déjà compris et souhaitent maintenant d’ autres champs de bataille.
adrien michel
5 décembre 2025J’ai un avis tout à fait différent.
Le grand perdant de ce conflit sera L’Europe de l’Ouest qui ressort durablement affaiblie, privée de ressources naturelles et d’énergie à bas prix, perd le marché russe, et se retrouve totalement vassalisée par les Etats Unis.
Quant à la Russie elle a été amenée grâce aux sanctions occidentales à renforcer son autonomie dans tous les domaines.
C’est un gâchis car l’Europe de l’Ouest et la Russie sont très complémentaires.
PB
5 décembre 2025L’angle mort est la transition d’une économie de guerre en économie de paix. Tout le sujet est là. C’est bien pour ça que personne ne veut la paix. C’est une fuite en avant.
Gaulois réfractaire
5 décembre 2025Excellente synthèse qui replace le conflit dans un contexte long. En quelques mots tout est dit. On est loin des logohrées d’un Bernard Guetta. On contate, qu’une fois de plus, les dirigeants français ont manqué le coche. Manifestement, un défaut de culture géopolitique.
Rob
5 décembre 2025Non, les dirigeants français n’ont pas manqué le coche. Il s’agit essentiellement de corruption. Tous les dirigeants depuis giscard sont corrompus et vendus aux intérêts étasuniens officiellement ou officieusement.
Patrice Pimoulle
6 décembre 2025A Rob: »Il faut debarasser la France de M, Giscard d’Estaing » Heureusement vous avons eu MM. Chirac et mitterrand entre 1981 et 2007, Maintenant ca va mieux.
NICOLINI
5 décembre 2025C’est une excellente analyse.
L’acharnement de Macron à pousser à la poursuite du conflit va se payer très cher. Car Poutine qui a déjà exclu que des troupes françaises participent au maintien de la paix, risque fort de s’opposer au retour des énergies gazières et pétrolières en France tant que « Micron » et ses séides sera au pouvoir.
Bilibin
5 décembre 2025Il est vrai que si le XXe siècle a vu la Russie/URSS forte et la Chine faible (et Staline a tout fait pour, avec un succès remarquable, tout en maintenant une amitié de façade), le rapport de force s’est largement inversé et ne reviendra pas en arrière. Le risque est que la Russie devienne peu a peu un état vassal et isolé, qui ne pourra qu’accepter que la Chine achète ses ressources de moins en moins cher.
harnois
5 décembre 2025Peu de temps après avoir laissé mon avis, je suis tombé sur ce spécialiste qui confirme mes propos.
https://www.youtube.com/watch?v=DYo1acYJH9c
harnois
5 décembre 2025j’ai un avis totalement opposé :
Ukraine : dans un pays qui a perdu une grande part de ses forces vives, et où l’argent étranger va couler à flot, je doute que le pays puisse échapper à une main mise de la mafia, voire à l’extrême à une guerre civile.
La Russie a reconstitué son appareil indiustriel ; convertir une industrie de guerre en industrie de haut niveau est assez facile, d’autant qu’elle dispose d’une énergie trois fois moins cher que ses chers voisins européens. Elle a appris à fabriquer ce que les occidentaux ne voulaient plus lui vendre; elle s’est ouvert les marchers d’avenir, Chine, Inde et extême orient. Je me demande même si dans quelques années, voire décennies, elle ne fournira pas des produits industriels à l’Europe, devenue incapable de les produire à prix décent.
Patrice Pimoulle
5 décembre 2025Absolument. La Russie a l’energie et la matiere grise. La Chine a les capitaux que lui ont offerts par les « immenses opportunites de la mondialisarion » (Jacques Chirac). L’Ukraine ruinee demographiquement economiquement, n’interessera plus les Etats-Unis des lors qu’elle ne peut plus servir de base de lancement pour intimider la Russie. C »est donc evidemment la Russie qui va s’occuper de la reconstruction en Ukraine.
Robert
5 décembre 2025Quel gâchis ! La fin de l’ URSS était l’ occasion de bâtir l’ Europe de l’ Atlantique à l’ Oural. L’ opposition des USA et la myopie stratégique de l’ UE nous ont conduit à cette situation. Est ce que ce monde est sérieux ?
Patrice Pimoulle
5 décembre 2025C’estce que tout le monde pense, y comprism d;ailleurs, aux Etats-Unis.
Charles Heyd
6 décembre 2025Oui, la « puissance » Europe comme en parle un ami a sombré dans cette histoire! C’est pour cela la première chose à faire c’est de sortir de l’OTAN et de créer une Europe des nations et de dissoudre cette UE!