Extrait de « L’Etat est mort! Vive l’état » François Bourin Editeur à paraître le 30 Septembre 2010 (finalement)
Avant-propos
« L’État est le mythe qui permet à chacun d’espérer vivre aux dépens des autres.» Frédéric Bastiat
Ce n’est un secret pour personne, la part de l’État dans l’économie française ne cesse de croître depuis le début des années 1970.Logiquement, cette «préférence» pour une consommation collective aurait dû être financée par un accroissement des recettes fiscales, c’est-à-dire par un alourdissement des impôts.
Il n’en a rien été.
Le dernier budget voté en équilibre dans notre pays remonte à 1973; depuis, pour financer ces accroissements de dépenses, l’État n’a cessé de recourir à l’emprunt. Cette calamiteuse habitude a conduit à une explosion de la dette, qui atteint un niveau tel que les marchés financiers risquent très prochainement de refuser de continuer à nous prêter de l’argent. C’est ce que l’on commence à voir en Grèce, en Irlande, en Espagne, au Portugal… Il va donc falloir, et à brève échéance, ajuster les dépenses aux recettes.
La France atteint à l’évidence la fin d’un cycle historique, celui de l’État providence, né dans la seconde moitié du XXe siècle, et dont on peut annoncer la disparition prochaine par incapacité à se financer dans la décennie à venir. La croissance de cet État se justifie officiellement par une recherche de «justice sociale» que l’État serait à même d’assurer. Cet objectif rejoint celui de la social-démocratie à la suédoise, système fort honorable au demeurant. Cependant, les moyens utilisés chez nous sont complètement différents. En fait, notre système n’en est en rien un succédané, mais plutôt un avatar typiquement français ou italien, que l’on devrait appeler le social-clientélisme.
Dans la social-démocratie, un dialogue constant a lieu entre parties prenantes (salariés, actionnaires, management, clients) pour trouver de concert la meilleure solution, c’est à dire celle qui protège au mieux les intérêts à long terme de chacun. Cela implique que chacun soit prêt à faire des sacrifices à court terme. La social-démocratie, si elle est bien comprise, est un jeu à somme positive, où tout le monde gagne. Lula, le président brésilien dont les réformes ont transformé son pays au cours de ses deux mandats, avait été formé au dialogue social dans la filiale brésilienne d’Electrolux, une société suédoise. Dans le social-clientélisme, le but est d’accaparer le pourvoir politique et le monopole de la violence légale qu’il confère, afin de distribuer des avantages non gagnés à ses propres troupes au détriment des autres parties prenantes à la discussion. Il s’agit d’un jeu à somme négative puisque le but est plus le vol légalisé par la puissance publique que la recherche d’un optimum par la discussion. Dans la social-démocratie, la discussion s’engage entre associés juridiquement égaux, ayant des intérêts communs a long terme, même si à court terme des différences légitimes peuvent exister… La fin ne justifie pas les moyens !
Auteur: Charles Gave
Economiste et financier, Charles Gave s’est fait connaitre du grand public en publiant un essai pamphlétaire en 2001 “ Des Lions menés par des ânes “(Éditions Robert Laffont) où il dénonçait l’Euro et ses fonctionnements monétaires. Son dernier ouvrage “Sire, surtout ne faites rien” aux Editions Jean-Cyrille Godefroy (2016) rassemble les meilleurs chroniques de l'IDL écrites ces dernières années. Il est fondateur et président de Gavekal Research (www.gavekal.com).
bermond
29 septembre 2010Votre approche du système judiciaire me semble pragmatique et réaliste (les deux étant peut être redondant).
La justice arbitrale a pour bon nombre de dossiers un coût prohibitif.
(Ce qui laisse d’ailleurs à penser que la justice publique devrait peut-être faire payer une partie de ses coûts de fonctionnement). Certains différends soumis à des arbitrages nationaux se heurtent aux mêmes difficultés que devant des juridictions classiques. Ce qui corrobore votre observation selon laquelle mieux vaut être jugé en Suisse ou ailleurs.
La Justice comme la Monnaie me semblent être des fonctions régaliennes largement abandonnées ou laissées à la « gestion » plus ou moins « éclairée » de tiers et ce, sans véritable contrôle.
De même qu’il est choquant que la création monétaire puisse être en partie laissée aux banques commerciales, il semble dangereux de laisser à des idéologues, syndiqués ou non, affiliés ou non le soin de trancher des questions touchant tant à la vie privée de personnes qu’à leur patrimoine, sans avoir à répondre des décisions prises (sauf devant leur pairs).
Les libertés individuelles (sociales, économiques) ne commandent-elles pas des domaines où l’Etat soit garant d’une stabilité?
Comment reprendre la main sur ces fonctions premières, alors même que vous annoncez une faillite de l’Etat?
L’idée même de fonction régalienne n’est-elle tout simplement pas devenue obsolète avec le positivisme ambiant? (oups… pardon le mot doit faire partie des dogmes de la nouvelle religion….)
faillitedeletat
29 septembre 2010Dans votre perspective, vous me dites « Les libertés individuelles (sociales, économiques) ne commandent-elles pas des domaines où l’Etat soit garant d’une stabilité?; or mon propos est justement de vous amener à réfléchir en dehors du cadre. De ce que je vois aujourd’hui, l’Etat est plus source de désordre que de stabilité. Ce sont les lois, leur respect et l’égalité devant ces dernières qui permettent une stabilité. Pas L’Etat en tant que création ex nihilo.
Vous le dîtes vous mêmes, il est choquant qu’en France la justice soit abandonnée aux mains de magistrats qui n’ont de compte à rendre trop souvent qu’à leur obédience; quant la monnaie, je pense que chacun doit savoir ce que je pense de Trichet et consort à ce stade de ma prise de position…
Comment reprendre la main? La prise de conscience collective est déjà une première étape nécessaire il me semble. Quant à la faillite de l’Etat qui s’annonce, c’est pour moi une bonne nouvelle car cet état là, ce monstre crée depuis 30 ans doit mourir. C’est à ce prix que nous retrouverons le sens et le chemin de ces fonctions régaliennes. La destruction positive,encore et toujours.
Amicalement,
CG
faillitedeletat
28 septembre 2010Bonjour,Avant toute chose et comme je l’explique ce matin, l’Etat est sorti de ses fonctions premiéres. L’Etat français n’aura tout simplement plus les moyens financiers de maintenir le domaine d’intervention actuel.
Bergerie
27 septembre 2010Cher Monsieur,
Je vous l’ai déja écrit, je me réjouis à l’idée de vous lire.
Vous évoquez l’enseignement dans votre réponse à BERMOND.
Et l’enseignement, je veux dire Education nationale, le « mamouth », justement.
Usine à marxistes qui s’ignorent, ou école de la liberté?
Au-delà, quelle serait la vraie mission?
Et au-delà encore, faut-il vraiment éduquer les masses ?
J’ai bien une petite idée.
Quelle serait la vôtre?
Bien cordialement.
faillitedeletat
26 septembre 2010Vous touchez la un point extrêmement sensible qui est celui de l’organisation de la Justice dans un pays.
L’une de mes thèses est que notre Etat qui aurait du rester laïc a été « colonisé » par une nouvelle religion, base sur un credo fondamentalement marxiste (lutte des classes, charge de la preuve inversée pour le riche qui doit prouver qu’il est innocent, diabolisation du profit, culpabilité de l’employeur ,etc. voir mes livres précédents ..)
Et nul part ce n’est plus visible que dans le domaine de la Justice.
La justice peut se rendre en fonction de codes et de lois (système français) ou en fonction de lois de précédents (système anglais) mais elle n’est pas justice s’il n’ y a pas d’abord égalité de chaque citoyen devant la Loi et les Tribunaux
Par exemple, dans les pays Islamiques, le non Musulman n’a pas le DROIT de témoigner contre un Musulman.
De même une femme ne peut témoigner, ou son témoignage vaut la moitie de celui d’un homme. Ce sont donc des pays ou la Justice telle que nous la concevons n’existe pas
Cette égalité devant la Loi n’existe plus guère en France et pour plusieurs raisons
les croyants dans la religion installée aux commandes de la justice (lire, ceux syndiques au syndicat de la magistrature) ne rendent pas Justice en s’inspirant des textes ou des précédents, mais en fonction de leur credo, c’est a dire que de fait, les non croyants sont souvent dans la situation des non musulmans dans les pays de l’Ouham. Le simple fait que des JUGES soient syndiques est une abomination intellectuelle et juridique
des réseaux non officiels et secrets traversent le système de la justice de part en part, sans que le justiciable sache qui fait partie ou non de ces réseaux. En Grande-Bretagne , ou ces réseaux existent aussi, tout fonctionnaire de pouvoir ou de justice, tout élu doit déclarer son appartenance à un réseau, faute de quoi il est licencie.
L’influence sur la justice du pouvoir en place est très forte, ce qui permet aux instances politiques de ne jamais être condamnées (cf Chirac récemment).
L’Etat a ses propres tribunaux, de création Napoléonienne, les tribunaux dits administratifs qui sont en l’occurrence juge et partie et qui rendent la justice avec une lenteur exaspérante qui fait bien l’affaire de l’Etat, dont ils dépendent
Tout cela amène à une très faible popularité des institutions judiciaires dans notre pays, et a un très faible prestige de son personnel, ce qui me semble très grave
Heureusement, de plus en plus, le justiciable peut faire appel devant la Cour de Justice Européenne, mais cela prend un temps fou et coute beaucoup d’argent
Pour contrer ces dérives, dans beaucoup de pays, tout ou partie du personnel de la Justice est élue et/ou de nombreuses décisions sont rendues par des jurys populaires directement
Ou alors, il faudra arriver a des sentences arbitrales privées comme le font déjà la plupart des grands groupes internationaux quand ils ont en face d’eux une institution française: ils prévoient des le départ une cour arbitrale extérieure a la France (souvent en Suisse), tant ils ont peu confiance dans notre système
Peut être est ce la une solution
Voila sans doute, avec l’enseignement, l’un des sujets les plus complexes a traiter.
Si une Eglise tient a la fois les Cours de Justice et l’Enseignement, elle est quasiment indélogeable
Mais il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer
Je n’ai pas le moindre doute que nous saurons trouver les solutions
Je n’ai pas le moindre doute également.
bermond
26 septembre 2010A vous lire et à vous écouter (les vidéos en lignes sont nombreuses) une vision tant de l’économie que de la finance, que du monde politique se dessine.
Quel regard portez-vous sur la justice (je parle bien de la mission régalienne, non de la vertu du même nom).
Certes vous avez quitté le sol de France depuis longtemps, mais vos multiples apparitions font penser que votre intérêt pour notre pays est réel…
Cette institution peut elle jouer un rôle alors que les lobbies de la finance ont une forte influence tant sur les jurisprudences que la législation.