Les empires ne périssent jamais complètement, leurs traces historiques demeurent dans le temps long de l’histoire. L’année prochaine, nous commémorerons le centième anniversaire du traité de Sèvres qui a mis un terme à l’existence de l’Empire ottoman et qui a organisé la dislocation de celui-ci. Un siècle plus tard, la Turquie rêve d’un nouvel Empire ottoman et Erdogan est plus que jamais le nouveau calife de cet Empire.
Sèvres et ses conséquences
Le traité est conclu le 10 août 1920, dans la ville de la célèbre porcelaine, au sud de Paris. Avec les traités de Versailles, de Trianon, de Saint-Germain-en-Laye et de Neuilly, il s’inscrit dans la série des traités internationaux qui règlent le sort des États vaincus. Il confirme l’armistice de Moudros (30 octobre 1918) qui avait mis fin aux hostilités sur le front d’Orient. Avec le traité de Sèvres, l’Empire ottoman renonce à ses provinces arabes et maghrébines ; des territoires qu’il contrôlait depuis plusieurs siècles. La Thrace orientale est donnée à la Grèce, les détroits sont démilitarisés, une grande Arménie et un Kurdistan indépendant sont créés. C’est le sultan Mehmed VI qui signe ce traité, qui ne fut jamais ratifié et appliqué. L’autorité du sultan, résidant à Constantinople, est contestée par la Grande assemblée nationale de Turquie, dont le gouvernement s’est installé à Ankara et qui est conduite par Mustafa Kemal. Ce groupe refuse l’application du traité de Sèvres, qui aboutit à la dislocation de l’Empire. Il renverse le sultan et prend le pouvoir, Kemal devenant le chef de la nouvelle Turquie. Il impose son idéologie politique, reposant sur l’armée et la laïcité. L’Occident est un modèle à suivre, sur le plan économique et juridique. Le kémalisme est la doctrine de la Turquie moderne. À la suite du renversement de Mehmed VI, Kemal lance les offensives contre la Grèce afin de chasser les Grecs de la bande côtière. C’est la guerre gréco-turque, qui dure jusqu’en octobre 1922. Les Grecs sont chassés de l’Anatolie et de l’Ionie. Des déplacements de population et des massacres de masse sont perpétués contre les chrétiens de Turquie et les Grecs, ainsi que les Kurdes. La population de l’Anatolie est ainsi homogénéisée et les Turcs deviennent majoritaires, ce qui est essentiel au projet politique de Kemal. La guerre se termine par le traité de Lausanne du 24 juillet 1923, qui clôt la Première Guerre mondiale sur le front d’Orient. Si on remonte aux différentes guerres balkaniques des années 1910, c’est une guerre de près de quinze ans qui a touché la région, avant d’aboutir à la séparation des populations et à la création d’États nations. Les indépendances de l’Arménie et du Kurdistan sont supprimées par le traité de Lausanne, qui se révèle donc positif pour la Turquie en comparaison du traité de Sèvres. Une partie d territoire arménien rejoint le giron de l’URSS.
Mustafa Kemal a donc réussi son pari d’établir une Turquie unitaire et renforcée sur ses bases territoriales. Il lui reste à reconstruire le pays et à édifier une nouvelle capitale : Ankara.
Le renouveau d’Erdogan
Erdogan rompt avec la logique laïque de Kemal Atatürk. S’il reprend son héritage quant à la construction d’une Turquie moderne et puissante, il la veut fondée sur l’islam et il regarde vers les anciens territoires de l’Empire ottoman. Devenu Premier ministre puis Président de la République, il n’a de cesse de renforcer son pouvoir et son contrôle sur le pays. Les dernières élections ont montré un vrai faux recul de l’AKP. Certes elle perd deux villes phares, Istanbul et Ankara, qui durant des décennies ont été les vitrines de sa gestion. Mais l’AKP obtient tout de même 45% des voix et 52% avec sa coalition. Il reste donc la première force politique du pays, loin devant le parti kémaliste (30%). Un siècle après Sèvres, le projet politique de Kemal n’est donc plus majoritaire dans le pays et c’est plutôt le nouvel ottomanisme d’Erdogan qui est plébiscité par les Turcs. Par ailleurs, l’AKP a gagné des villes kurdes dans le sud-est du pays, une région qui est pourtant d’habitude opposée à Erdogan, fervent opposant à l’autonomie du Kurdistan.
Le basculement d’Istanbul et d’Ankara doit être relativisé, car les villes n’ont été gagnées que de justesse et l’AKP conserve la majorité des municipalités d’Istanbul et d’Ankara, seuls les centres ayant votés pour les oppositions kémalistes. D’autant que la gestion des villes conquises par l’opposition sera difficile. D’une part parce que l’opposition manque de personnel compétent et a perdu en expérience pratique, n’ayant pas géré de grandes villes depuis des décennies, d’autre part parce que depuis juillet 2018, le gouvernement a un droit de regard sur le budget d’Ankara et d’Istanbul.
Qu’est-ce qui peut néanmoins expliquer ce basculement ? D’une part la coagulation de toutes les oppositions à Erdogan, les kémalistes, les Kurdes, les socialistes. C’est très hétéroclite et si cela permet de gagner une élection, cela est très compliqué ensuite d’assurer une bonne gestion. Ensuite, l’émergence d’une nouvelle catégorie politique, surnommée les Turcs gris. Ce sont des personnes conservatrices, mais marquées par l’urbanité, à l’inverse des conservateurs ruraux du centre et des marges de l’Anatolie. Pour eux, les préoccupations économiques sont premières et les difficultés rencontrées par la Turquie, notamment sur sa monnaie, ont pesé dans le choix de leur vote. Ce sont des électeurs qui votent AKP et qui ont fait défaut lors de cette élection. Mais ils ne sont pas définitivement perdus et ils peuvent revenir lors des élections nationales.
Erdogan et l’AKP sont donc loin d’avoir perdu les élections et la main en Turquie. Son discours nationaliste et néo-ottoman continue de plaire et force est de constater que la Turquie se positionne sur un nouveau créneau ottoman, un siècle après Sèvres.
Le nouvel Empire ottoman
Erdogan s’appuie sur la diaspora turque pour accroître son influence en Europe. Celle-ci est très présente en Allemagne ainsi que dans l’Est de la France (Strasbourg notamment). Il est venu animer des réunions politiques dans ces pays lors des élections et il pense ces Turcs comme des citoyens de son pays devant défendre la Turquie dans les pays où ces populations habitent. Comme pour la Chine, la diaspora turque est utilisée comme un levier de la puissance et de l’influence.
Erdogan a ainsi fait pression sur Angela Merkel, donc sur l’Union européenne, lors de la crise des migrants de 2015-2016. Il a fait du chantage à l’ouverture des frontières, demandant des visas pour les Turcs en échange de la fermeture de sa frontière vers l’Europe. Lorsqu’Angela Merkel a cédé, les frontières se sont fermées. La Turquie a joué un rôle important dans le conflit syrien, se positionnant sur la ligne russe contre les Occidentaux. Elle est également présente en Libye, essayant de placer ses pions contre le Maréchal Haftar. Il n’est pas dit qu’elle ne soit pas aussi à la manœuvre en Algérie. Elle mène donc une intense activité de diplomatie et de renseignement dans les territoires de son ancien empire. Son adversaire, c’est l’Arabie saoudite, adversaire autant idéologique que politique. Elle ne dispose pas de la même puissance économique, mais bénéficie néanmoins de fort effet de levier. Il en va de même dans les Balkans, et notamment en Albanie et au Kosovo. La démarche d’intégration du Kosovo dans l’UE est une façon de brimer la Serbie et de faire entrer une région qui lui est proche, forçant ainsi les Européens à reconnaitre l’indépendance de cette région, que beaucoup conteste. Mais sur ce dossier, elle se heurte à l’opposition de la Russie, qui refuse d’abandonner son allié serbe.
La Turquie manque d’allié et dispose de nombreux adversaires, qui n’ont pas oublié les siècles d’humiliation et d’occupation, les Grecs en premier. Les massacres et les épurations des années 1900-1920 sont encore dans de nombreuses mémoires. L’évocation du passé de l’Empire ottoman n’est pas vue de façon positive par tous les acteurs de la région. Reste aussi la question de Chypre, autre point de discorde avec l’Europe. Un siècle après les traités de Sèvres puis de Lausanne, le projet d’un nouvel empire ottoman n’a pas de quoi faire rêver les Européens ; du moins ceux qui ont encore un peu de mémoire et de sens de l’histoire.
Auteur: Jean-Baptiste Noé
Jean-Baptiste Noé est docteur en histoire économique. Il est directeur d'Orbis. Ecole de géopolitique. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages : Géopolitique du Vatican. La puissance de l'influence (Puf, 2015), Le défi migratoire. L'Europe ébranlée (2016) et, récemment, un ouvrage consacré à la Monarchie de Juillet : La parenthèse libérale. Dix-huit années qui ont changé la France (2018).
Ockham
4 mai 2019Comme certains commentaires le disent, Erdogan semble tirer des vieilles ficelles. Comme au temps de la perte de sa partie européenne, la Turquie n’a pas d’énergie, pas de système complexe de pointe dans les moyens de communications, pas d’armement qui ne soit OTAN et bientôt russe ce qui va faire la joie de la maintenance. Les Turcs ont fait d’immenses progrès et savent travailler dur mais l’agitation de leur leader politique n’a même pas convaincu les turcophones à l’est qui pourtant débordent d’énergie et l’ignorent platement. Feignant la piété coranique pour attirer le chaland au bureau de vote il ne touche qu’une faible population tant la modernité entre partout dans les grandes villes. Il va avoir quelques problèmes au moins de voix. Attendons un peu. N’est-il pas vrai que l’histoire ne repasse jamais les mêmes plats ?
SysATI
9 mai 2019Sourire….
Dans un pays démocratique « normal » oui, il serait mis à la porte par les urnes puisqu’il n’arrive plus à faire durer le « miracle économique » qui l’a maintenu au pouvoir pendant si longtemps.
Malheureusement, la Turquie est très loin d’être une démocratie…
Il y a eu des élections municipale il y a de ça un mois.
Malgré des bourrages d’urnes et des votes de pas mal de morts, Ankara et Istanbul sont passés à l’opposition. Pour Ankara, il n’y a rien à faire, l’écart est trop important pour pouvoir revenir dessus. Mais Istanbul, pas de problème, hier on a annulé l’élection purement et simplement 🙂
On va donc magouiller encore plus, coller en taule quelques gugus pour l’exemple et faire en sorte que cette fois-ci les « bons » remportent la ville.
Petite anecdote pour rigoler (jaune)…
L’élection à Istanbul était en faite multiple, le Maire du « Grand Istanbul », les maires des différents « arrondissements », plus deux autres scrutins locaux. Comme l’AKP ne s’est pas trop mal comporté dans les autres scrutins, on ne les annule pas, seul l’élection du maire du « Grand Istanbul » est annulée…
Les gens ont voté donc 4 fois, et comme il y a eu des irrégularités on est obliger de recommencer. Mais uniquement la ou le résultat n’est pas conforme aux attentes… Pour le reste, il n’y a pas eu d’irrégularités ???
Des 4 votes dans une même enveloppe, 3 sont « bons » le dernier est « irrégulier »…
A mourir de rire… Si la vie de millions de gens n’en dépendait pas…
Dans moins d’un mois on va voir ce qui se passe vraiment dans la « République Turque »… Démocratique ou malheureusement simplement bananière…
Tout cela se terminera inévitablement en guerre civile un jour ou l’autre…
D’ou mon commentaire précédent: vous n’avez vraiment _aucune_ inquiétude à avoir, la Turquie est incapable d’intervenir à l’étranger avant très longtemps…
Philippe
3 mai 2019la fuite en avant en Turquie ressemble a celle de Madouro au Venezuela – autoritaire – militaire ( le pseudo-coup d’ Etat des Guleniens écrasé par Erdogan ) est maintenat multiplié par une fuite en avant diplomatique – Erogan a de facto quittè l’OTAN – pour se rapprocher de Moscou et Teheran et du Qatar .
Un triangle des freres Musulmans alliés aux chiites radicaux est en place – Ankara+Qatar + Teheran , et Moscou dérriére alimente la braise anti-occident en vendant un systeme anti.-aerien russe SS-400 a Erdogan . Au plan geopolitique , Erdogan est face a une Europe faible , il peut encore essayer d’ extorquer a Mme Merkel quelques milliards contre le controle de la frontiere gréco-turque . Au sud , il a ecrasé les kurdes en Syrie , il ne peut pas aller plus loin , car Moscou protége Assad . Plus au Sud, il menace Israel de rodomontades , sans reelle consistance .Erdogan a joué contre l’ Arabie saudite en accusant le pouvoir de Mohamed Bin Salman, d’ etre l’ auteur de l’ assassinat du journaliste opposant Khashoggi . L’ arabie seoudite se venge en faisant plonger la livre turque . A ces manoeuvres brutales s’ ajoutent la gabegie , le fils d’ Erdogan est ministre des Finances ….La livre turque plonge , les taux sont a 22% . Il se profile un renversement politique interne , les nationalistes Kemalistes remontent , si l’ armée les appuie, ce sera la fin d’ Erdogan
SysATI
3 mai 2019Arrêtez vos fantasmes…
La division à l’intérieur du pays est telle que la Turquie ne peut avoir aucune espèce de vision à l’international. Avec la moitié du pays résolument contre tout ce qu’il représente, RTE ne peut strictement rien entreprendre ni l’extérieur, ni même à l’intérieur du pays.
Il a réussi à mettre de son coté les petits conservateurs anatoliens (qui ont été considérés comme des citoyens de seconde classe pendant des décennies par les kémalistes), mais jamais les milieux éduqués (et riches). Et ce n’est pas avec de beaux discours et une armée de paysans illettrés qu’on conquiert l’Europe…
L’Europe (ou même la Syrie toute proche) n’ont donc aucune crainte à avoir…
Il y a même que très fortes chances pour qu’il ne dure pas bien longtemps au pouvoir eu Turquie…
Ses « alliés » ne le sont que pour des raisons bassement matérielles et vu les problèmes économiques du pays, ils sont en train de retourner leur veste de plus en plus rapidement…
Le basculement de 2 des 3 plus grandes villes du pays à l’opposition ne doit pas être pris à la légère… La 3eme, Izmir, n’ayant jamais été conquise par les sbires d’Erdogan, c’est aujourd’hui plus de 80% de l’industrie et de l’économie qui est donc « aux mains de l’opposition »…
Même si le parti d’Atatürk ne représente que 30% des électeurs (des purs et durs), il est et reste un héro national (Vercingétorix + Napoléon + de Gaulle pour vous faire une idée) et ses idéaux ne sont pas remis en cause par la très grande majorité des turcs. Erdogan déteste ça, mais il n’a jamais rien pu faire contre…
Quant à l’islam des turcs, même s’il est un peu plus coloré en vert qu’avant Erdogan, il n’a jamais été bien virulent et ne représente pas vraiment une menace pour l’Europe. Il n’y a certainement pas plus de musulmans fanatiques en Turquie que de cathos traditionalistes en France…
La seule façon pour Erdogan de se maintenir au pouvoir est de se radicaliser, ce qui braquera encore plus la moitié du pays qui est déjà contre lui, et dégouttera ses partisans un peu plus chaque jour. Cela n’est pas la situation idéale pour un dirigeant souhaitant étendre son pays…
Ne vous en faites donc pas, le croissant ne flottera pas de sitôt sur la tour Eiffel 🙂
Charles Heyd
3 mai 2019Pleinement d’accord avec vous notamment pour ce qui concerne le fanatisme islamique; a-t-on déjà vu un kamikaze turque dans tous les attentats qui nous ont frappés? Certes, le loup (gris?) qui a frappé Jean-Paul II était turc mais payé par qui?
Bien sûr, de temps à autre une manifestation organisée par les Kurdes turcs dérape devant le Conseil de l’Europe à Strasbourg mais cela est anecdotique; et je ne parlerai pas de l’alcool; j’ai formé des officiers et équipages de bateaux turcs et saoudiens achetés à la France et je peux vous certifier qu’entre les deux (Turcs et Saoudiens) l’islam n’est pas le même et même s’ils sont tous sunnites ce qui bien sûr n’empêche pas Erdogan de se poser en musulman exemplaire et désireux de prôner un islam radical. Et dire que beaucoup de nos élites françaises, mais aussi européennes, certaines en tout cas, voulait le faire entre dans l’UE!
Gaulois
4 mai 2019« Le croissant ne flottera pas de sitôt sur la tour Eiffel », comme vous le dites, en effet ; d’autant plus que nos voisins musulmans souffrent de dissensions sociales intérieures graves. Mais j’ai cru comprendre que Mr Noé se plaçait, par-delà « le basculement de 2 des 3 plus grandes villes du pays à l’opposition », dans une perspective à plus long terme.
Au fait, quelle est la confession de Mr Sadiq Khan, maire de Londres ? Celle de Mr Ahmed Aboutaleb, maire de Rotterdam ?…
Gaulois
2 mai 2019Il me paraît évident, au-delà de l’attitude impérialiste de Recep Erdogan, que dans l’état de déliquescence avancée où se trouve à présent l’Europe, « l’homme malade », ce n’est plus désormais l’Empire Ottoman, mais l’Union Européenne.
Mustafa Kemal Atatürk a prôné la laïcité en son temps, mais aujourd’hui, les Turcs n’auraient sûrement aucun état d’âme à rejoindre la bannière de l’Islam, s’il s’agissait de s’emparer de cette Europe qu’ils ont tout lieu de considérer comme un pactole très faiblement défendu, à l’instar du Koweït envahi par l’Irak de Saddam Hussein en 1990.
« Ceux qui ne se souviennent pas du passé sont condamnés à le répéter » – George Santayana
Charles Heyd
2 mai 2019Des gens de plus de 100 ans et qui ont encore de la mémoire (la mémoire des massacres et autres atrocités dont vous parlez), il n’y en a plus beaucoup. Certes, on peut se référer à des livres d’histoire, mais les chambres à gaz, plus récentes, certains nient leur existence et je ne parle pas du génocide arménien!
Et ceux qui ont le sens de l’histoire, hélas, ils ne sont pas non plus légions surtout dans nos médias!
Boucly
16 octobre 2019Je ne voudrai pas paraître ra at joie ou pire encore anarchiste radicalise mais tout ce qui se passe à l heure actuelle à travers le monde commence sérieusement à sentir mauvais pour reste poli mon défunt pere me disait dans son langage chaque pays chaque mode chaque cul chaque crotte tout est dit chacun s auto suffit chez lui et ne va pas chercher d embrouille dans des 0as riches de ressources naturelles exploitables nous avons du travail suffise ment chez nous car je ne vous dit pas le boulot pour reconstruire une France digne et tolérante