22 novembre, 2012

Le droit de blasphémer est-il à géométrie variable?

 Voici le Christ horriblement ridiculisé. Les croyants auraient tort de s’en révolter. Il n’y a pas de prêtres sans bouffons; et la grandeur d’une croyance est de souffrir ses bouffons: cela signifie qu’elle n’a pas besoin du monopole pour survivre.

Au nom de la liberté d’expression, la parole même blasphématoire est, chez nous, toujours possible, disent les médias pour justifier ces outrages par la possibilité de pouvoir tout outrager.  

 Mais les choses sont beaucoup plus compliquées.
Imaginons un dessinateur satirique qui s’amuserait à peindre un citoyen se torchant le derrière avec la Déclaration des droits de l’homme; à peindre des étrangers arrivant sur notre sol en crachant sur nous par principe; à peindre un couple homosexuel livré à la débauche et réclamant ouvertement d’adopter des enfants pour les sodomiser; ou encore, à peindre le camp d’Auschwitz sous des aspects burlesques et ridicules auxquels je n’ose pas penser.
Croit-on que tout cela pourrait s’exposer tranquillement au nom de la liberté de la presse? Certainement pas. Tout aussitôt, l’ensemble des médias feraient taire l’importun, comme cela est arrivé il y a quelque vingt ans pour Fun Radio, qui, dans une outre-mesure adolescente, avait osé ricaner sur la Shoah.

Du sacré inviolable

Notre société abrite, quoi qu’elle dise, du sacré inviolable. Une  part de sacré qu’il est interdit d’outrager; et des bouffonneries qui mènent au procès. On nous répète que le blasphème doit toujours être possible dans une société libre. Mais la loi contre l’homophobie est à elle seule une loi contre un blasphème! Et nous en avons bien d’autres. Cependant, nous interdisons certains blasphèmes, et non pas tous. Chacun sait bien, par exemple, que tout le monde peut brocarder à son aise la famille bourgeoise de type Le Quesnoy, mais que personne ne peut se moquer de la famille monoparentale. On peut salir les Deschiens, mais sûrement pas un immigré de base.

On nous annonce qu’il faut défendre ces caricatures religieuses au nom de la liberté d’expression. Sonnez trompettes! On se moque de nous. Car la liberté d’expression ne vaut pas dans tous les cas. La question est donc de savoir pourquoi les religions sont jetées en pâture à la liberté de ridiculiser, tandis que d’autres courants, idées, événements, sont sanctuarisés. Car, avant de nous permettre de « tout » dire, on a soigneusement mis de côté un certain nombre de causes sacrées décrétées interdites à notre jugement… On n’est pas plus faux derche.

Soyons moins indulgents face aux mines moralistes de ces bons apôtres. Ils énoncent des préceptes qu’eux-mêmes n’appliquent pas.La liberté de blasphémer s’applique seulement pour ce qu’ils ne respectent pas, eux.Ils ne supporteraient pas en revanche qu’on outrage les objets de leur vénération.

La modernité n’a pas, quoi qu’on dise, institué la liberté d’expression. Elle a seulement déplacé les sanctuaires. 

Source L’express

Auteur: idlibertes

Profession de foi de IdL: *Je suis libéral, c'est à dire partisan de la liberté individuelle comme valeur fondamentale. *Je ne crois pas que libéralisme soit une une théorie économique mais plutôt une théorie de comment appliquer le Droit au capitalisme pour que ce dernier fonctionne à la satisfaction générale. *Le libéralisme est une théorie philosophique appliquée au Droit, et pas à l'Economie qui vient très loin derrière dans les préoccupations de Constant, Tocqueville , Bastiat, Raymond Aron, Jean-François Revel et bien d'autres; *Le but suprême pour les libéraux que nous incarnons étant que le Droit empêche les gros de faire du mal aux petits,les petits de massacrer les gros mais surtout, l'Etat d'enquiquiner tout le monde.

6 Commentaires

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  • MP

    24 novembre 2012

    Très bon article.

    Tout est une question de pouvoir. Certains journalistes et intellectuels défendant les mêmes intérêts (la gôche) s’en prennent à la religion…car elle fut un pouvoir et est toujours aujourd’hui potentiellement un contre-pouvoir (au leur).

    Ils protègent les homos, immigrés, etc du « blasphème » car ils les ont instrumentalisés pour garder et prendre le pouvoir. Ce sont leur outils.

    CQFD

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  • PETRONE

    24 novembre 2012

    bonjour à tous,

    il me semble que l’on s’en prend surtout et toujours à celui qui ferme sa gueu…!

    Dans ce pays, pour s’en sortir, il faut crier plus fort que les autres, faire du tapage et surtout très bien passer à la télé bobo parisienne.

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  • Alex

    23 novembre 2012

    certains groupes sont mieux organises que d autres et empeche la liberte d expression sur certains sujets. Derriere ca il y a un objectif politique en generale. Comme les cathos ne sont plus reellement liee a un « objectif » ou a un projet politique on s attaquent plus facilement a eux.

    Sinon il faut aussi dire qu en depit des evenement recents les cathos sont en general des « gentils », on risque pas grand grand chose a s en prendre a eux. Par contre regarde ce qui se passe a ceux qui ont publie certaines caricatures… Ba en fait c est comme dans la cours de recree, on s en prend toujours au plus faible car il ne fera rien pour se defendre.

    Cela etant dit je reste athee.

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  • XYZ

    22 novembre 2012

    Allez donc critiquer la franc maçonnerie, vous passerez tout de suite pour un extrémiste négationniste.

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    • mathieu

      22 novembre 2012

      pouvez vous pousser votre raisonnement un peu plus loin svp ? ou voulez vous en venir par cette phrase ? (je ne suis pas franc-maçon, au cas ou vous en voyer partout…)

  • Pseudonyme Anonyme

    22 novembre 2012

    Tout dépend de ce à quoi renvoient ces flatulences de l’esprit : quand elles évoquent un agnosticisme, voir un scepticisme de bon aloi dans nos sociétés, la tolérance est de mise. Quand elles sous-tendent un préjugé xénophobe, antisémite, homophobe, sexiste ou négationniste, elles sont récriminées.

    Tous les préjugés ne se valent pas. Il s’agit, en quelque sorte, selon le cas, d’un renversement de la charge de la preuve. C’est au croyant, face à une attaque, de convaincre de la justesse de son dogme. Au contraire, c’est au négationniste, homophobe etc de justifier de sa position, ce qui est naturellement pour le moins difficile.

    Dans le cadre de mes recherches, notre professeur nous a invité à lire un ouvrage très intéressant sur l’enquête orale, soit la valeur du témoignage en tant que matériau historique. L’auteur en est Florence Descamps (L’historien, l’archiviste et le magnétophone). Il est frappant de constater qu’un des arguments les plus avancés en faveur du témoignage fut, du propre aveu de l’auteur, la question de la Shoah. Soit le raisonnement suivant : l’Holocauste est une réalité historique, il dépend des témoignages des victimes comme des bourreaux donc le témoignage a valeur historique.

    Attention, je ne défends absolument pas, au-dessus, de thèse négationniste. Je pointe simplement, en renfort de l’article, un exemple qui montre que les limites de la liberté d’expression ne sont, contrairement à ce que l’on pense, ne sont pas purement subjectives (diffamation) mais renvoient à des tabous, ou, pour employer un terme plus neutre, des arguments non scientifiques considérés comme indiscutables (pléonasme ?).

    Ce qui se traduit, notamment, par les lois fameuses lois mémorielles dont les effets sont loin de se limiter à leur strict objet historique.

    Douter de Dieu, c’est bien. Douter de la normalité de l’homosexualité, c’est mal. Douter de l’islam, c’est de la xénophobie, donc c’est mal. Etc.

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