14 novembre, 2018

La Russie et nous

 

 

La Russie d’aujourd’hui ne laisse pas indifférente en France et en Occident. Pour certains, elle est un espoir, la gardienne des valeurs conservatrices occidentales et Vladimir Poutine un homme fort qui pourrait servir de modèle aux chefs d’État d’Europe de l’Ouest. Pour d’autres, elle est une menace, qui s’en prend à l’Ukraine et à la Syrie, qui manipule les élections aux États-Unis et qui fait preuve d’un autoritarisme qui n’a pas sa place dans nos démocraties libérales. La Russie fascine la France depuis au moins la fin du XIXe siècle et le rapprochement diplomatique avec elle. En dépit des tensions et des refroidissements entre gouvernements, les peuples russes et français ont su se connaître et s’apprécier. La Russie avait laissé un mauvais souvenir en France, à la suite de son invasion du nord du pays après la retraite de Napoléon. Comme la France avait laissé un mauvais souvenir à la suite de la conquête de la Russie et de la prise de Moscou. Durant la Guerre froide, la méfiance fut très grande, y compris à gauche, les socialistes et les gauchistes étant plus portés vers la Chine de Mao et les pays du tiers-monde que vers Moscou. Les relations se sont réchauffées aux débuts des années 2000, quand la Russie était faible, avant de se refroidir depuis, quand la Russie a voulu redevenir forte. L’image d’autoritarisme et de tsarisme reste vivace dans les esprits.

 

Mais les peuples ont su s’aimer et s’apprécier en dépit des gouvernements, comme en témoignent les nombreux écrivains et musiciens russes fortement inspirés par la France, dont beaucoup sont venus y vivre ou s’y réfugier. Par exemple Ivan Tourgueniev (1818-1883) qui a connu de nombreux écrivains français et est mort à Bougival (Yvelines). Et c’est à Paris qu’Alexandre Soljenitsyne publie L’Archipel du goulag.

 

Alexandre III et le rapprochement avec la France

 

Après le congrès de Vienne (1815) durant lequel la Russie a tout fait pour limiter la puissance française, les relations se réchauffent au cours du règne d’Alexandre III (1881-1894). C’est un mariage de raison entre deux pays qui ont besoin l’un de l’autre. Depuis 1871 et la politique de Bismarck, la France est isolée en Europe. L’alliance russe lui permet de briser cet isolement et de nouer une alliance de revers avec l’Allemagne. Cela fut vital en 1914. Quant à la Russie, elle cherche des capitaux pour développer son industrie. L’Allemagne étant peu encline à lui en fournir, c’est vers la France qu’elle se tourne. Cela donne les célèbres emprunts russes, qui ont fait perdre pas mal d’argent aux prêteurs français après la révolution bolchévique. L’accord entre les deux pays est signé en 1891. La même année, la Russie signe un contrat d’achat de 500 000 fusils à la manufacture de Châtellerault. L’alliance franco-russe est réaffirmée en 1893 et en 1896. Cette année-là, le nouveau tsar Nicolas II fait une visite officielle en France, durant laquelle il réaffirme l’entente entre les deux nations. L’entente est scellée dans la pierre, puisque Nicolas II pose la première pierre du pont Alexandre III, qui relie les Invalides au Grand Palais. Le pont est inauguré lors de l’exposition universelle de 1900. C’est probablement le plus beau pont de Paris, qui ouvre une des plus belles perspectives de la capitale. Des Invalides bâtis sous Louis XIV au Grand Palais édifié par la IIIe République, c’est deux siècles d’histoire de France qui sont traversés.

 

 

 

L’indispensable alliance russe

 

Sans l’alliance russe, la France n’aurait gagné ni la première ni la seconde guerre mondiale. Les Russes ont mobilisé plus vite que prévu et ils ont fixé des divisions allemandes à l’Est qui ont manqué à l’Ouest pour terrasser la France. Le tsar mobilise six armées sur le front de l’Est, deux contre l’Allemagne et quatre contre l’Autriche. Les armées russes pénètrent en Prusse orientale, obligeant l’Allemagne à se porter sur ce front arrière. Certes, Hindenburg stoppe la Russie à Tannenberg (27-30 août 1914) et les Russes ne cesseront dès lors de reculer, mais leur stratégie a payé puisque cela permet à la France de stabiliser son front.

Lors de la Seconde Guerre mondiale, c’est l’échec de l’Allemagne face à Stalingrad qui opère le recul de l’armée allemande et donc la potentielle victoire en Europe de l’Ouest. Les Russes ont perdu 10.6 millions de soldats dans cette guerre. La « Grande Guerre patriotique » demeure encore dans toutes les mémoires et est commémorée avec force tous les 9 mai. Bien évidemment, la mémoire officielle russe oublie de préciser que l’Allemagne et la Russie furent alliées de l’été 1939 au printemps 1941, et que sans cette alliance, Hitler n’aurait jamais attaqué l’Europe de l’Ouest. Elle oublie aussi de mentionner qu’une grande partie des morts est due à l’impréparation de l’armée rouge, dont les cadres ont été éliminés et tués sur ordre de Staline au cours des années 1930. De nombreux soldats ont été tués par les agents du NKVD, et d’autres sont morts de faim et de blessures à cause de l’impréparation de l’armée soviétique. Ces morts sont donc davantage imputables à l’URSS qu’à l’Allemagne. Il n’empêche que les Russes ont payé un lourd tribut à la guerre.

 

Ces éléments historiques sont essentiels à connaître pour comprendre la psychologie russe d’aujourd’hui.

 

Russie, choses vues

 

Ayant passé récemment une semaine en Russie dans le cadre d’une invitation universitaire, j’ai eu l’occasion de participer à des colloques à l’université Lomonossov et à la Douma. L’université de Moscou fut fondée en 1755 par Michaël Lomonossov, un savant et homme des Lumières, qui lui a ensuite donné son nom. Ce qui frappe de prime abord, c’est la propreté de Moscou, ce que confirment ceux qui s’y sont rendus, notamment les Parisiens ; Paris étant devenu une Ville Poubelle. Dans le métro, ni tags ni papiers, et des trains qui se suivent toutes les 90 secondes. De même dans les rues de Moscou, y compris dans les quartiers résidentiels. Preuve qu’une capitale peut être propre, et que la crasse parisienne n’est pas une fatalité.

 

Lors des colloques, j’ai pu m’exprimer librement, sans aucune censure, sur les thèmes qui m’avaient été proposés. Nous avons échangé sur l’écriture de la Révolution française d’une part et sur le nihilisme contemporain d’autre part. À la Douma, j’ai parlé subsidiarité, flat tax et chèque éducation face à des députés qui semblaient intéressés. J’y ai vu des professeurs cultivés, intelligents, et soucieux des problèmes sociaux de leur pays. Comme j’étais invité par le département de français de l’université linguistique d’État, qui s’appelait l’université Maurice Thorez à l’époque de l’URSS, bon nombre de professeurs et d’étudiants parlaient français. Fréquentant pas mal les universités françaises pour des colloques et des tables rondes, je dois reconnaître que les conditions de travail qui nous ont été proposées en Russie sont bien meilleures qu’en France. Nous sommes intervenus dans de belles salles, ce qui change des salles glauquissimes de nombreuses universités françaises. Que l’on me pardonne pour mon insistance sur la propreté, mais là aussi, quel plaisir de voir des universités sans tags, sans papiers dans les couloirs et, miracle, des toilettes propres, sans graffitis marqués au blanco et ces nombreux autocollants politiques qui décorent les w.c. Cela n’est pas anecdotique. Que des étudiants cassent et dégradent les locaux où ils vivent et où ils travaillent témoigne d’un abaissement moral et culturel de leur part. Ce qui s’est passé à Tolbiac, à Montpellier et à Toulouse l’année dernière est gravissime. Outre que c’est le contribuable qui a dû payer la restauration des dégâts, mais aussi parce que cela témoigne d’un abaissement du niveau culturel et humain de ces étudiants.

 

Le français est la deuxième langue étrangère la plus étudiée en Russie, derrière l’anglais bien évidemment, et à égalité avec l’allemand. Mes interlocuteurs m’ont dit que le gouvernement français avait diminué les aides aux centres culturels français et à la diffusion de la langue française en Russie. C’est bien dommage, car c’est pour une fois une dépense publique utile, dans la mesure où elle contribue à la puissance culturelle du pays. En revanche, les entrepreneurs français sont très présents en Russie, c’est même l’un des pays d’Europe où ils sont le plus nombreux. La Russie compte 146 millions d’habitants. C’est donc un marché qui n’est pas négligeable.

 

L’Europe centrale : un impensé de la géopolitique française

 

Pour autant, la Russie et l’Europe centrale sont les zones oubliées de la pensée géopolitique française. La France regarde beaucoup vers ses anciennes colonies, Maghreb et Afrique noire, mais très peu en Europe centrale, alors que ces pays sont souvent très francophiles. Des pays baltes aux Balkans, de la Pologne à la Russie, il y a là de nombreux pays amis, avec qui la France a tissé des liens culturels, militaires et politiques depuis de nombreux siècles. En se désinvestissant de cet espace, la France laisse le champ libre à l’Allemagne, qui en fait du coup sa chasse gardée, recréant son empire déchu. Les relations entre la France et la Russie ont toujours été teintées d’incompréhensions réciproques, mais d’affections réelles. C’est pour des raisons purement pratiques et réalistes qu’Alexandre III et la IIIe République ont conclu l’Entente, non pour des raisons d’amour et de sentiments. Cela tombe bien, les sentiments et la diplomatie font toujours mauvais ménage. Plutôt que de céder une nouvelle fois au moralisme, Moscou et Paris ont tout intérêt à s’entendre. Non pas pour être alliés, mais pour être partenaires. Il y aura toujours une incompréhension de fond entre ces deux pays, parce que la pensée russe et la pensée française sont très différentes, mais il y aura aussi toujours des raisons objectives et réalistes d’entente. Aujourd’hui, ce sont les entrepreneurs et les intellectuels qui tissent cette entente de façon concrète, en faisant des affaires et des échanges universitaires. Preuve qu’en diplomatie comme en économie, l’État a souvent intérêt à laisser faire les hommes plutôt que de chercher à planifier et à contrôler.

 

 

 

Auteur: Jean-Baptiste Noé

Jean-Baptiste Noé est docteur en histoire économique. Il est directeur d'Orbis. Ecole de géopolitique. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages : Géopolitique du Vatican. La puissance de l'influence (Puf, 2015), Le défi migratoire. L'Europe ébranlée (2016) et, récemment, un ouvrage consacré à la Monarchie de Juillet : La parenthèse libérale. Dix-huit années qui ont changé la France (2018).

18 Commentaires

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

  • Duglandier

    21 novembre 2018

    La Russie paraît effectivement être l’une des nations les plus prospère actuellement.
    Cela pour plusieurs raisons. Elle s’est débarrassée du marxisme qui l’a miné depuis 1917 ajoutés sur nos sociétés occidentales sont en plein dedans avec un marxisme culturel qui conduit au politiquement correct, l’immigration de masse, le nivellement par le bas et baisse du niveau d’éducation qui nous fais perdre nos valeurs. Cela induit la différence qui vous a frappé au niveau propreté et élitiste de la culture qui n’est plus du tout une valeur française.

    Répondre
  • gauloises bleues

    17 novembre 2018

    Le pont Alexandre III, le plus beau de Paris ? Je le trouve compliqué et prétentieux. Je préfère le pont Royal.

    Répondre
  • Robert

    17 novembre 2018

    Merci pour votre analyse. Il me semble que la Russie a un socle de valeurs culturelles plus solide que la France, où l’action concertée de différents lobbies ces dernières années, ainsi que des influences politiques exogènes, sont en train de détruire l’ âme séculaire du pays. Il serait intéressant de vous lire à ce sujet.

    Répondre
  • Dr Slump

    15 novembre 2018

    On ignore que la Russie, bien qu’assimilée à l’Europe, n’est pas fondamentalement européenne, ou alors seulement en partie, et qu’elle est pour une autre part asiatique. Les russes, à mon humble avis, sont d’un point de vue au moins culturel, des eurasiens. Ils ont le caractère affectif des européens, mais aussi le côté pragmatique, détaché, propre aux cultures d’Asie du sud-est, avec la capacité de penser les choses à long terme, d’analyser les situations dans un contexte plus global, et des stratégies qui s’appuient sur les situations concrètes plus que sur des théories.
    Le rapprochement de la Russie avec la Chine n’est pas un hasard, il y a entre les deux pays des similarités culturelles, des convergences de pensée qui ne tiennent pas qu’au communisme.

    Répondre
  • Francis

    15 novembre 2018

    Bonjour,

    Vous écrivez: « Sans l’alliance russe, la France n’aurait gagné ni la première ni la seconde guerre mondiale ».
    C’est la France qui a gagné les 1ere et la 2eme guerres mondiales? !
    C’est bien d’être fier d’être français mais bon….sur la 2eme guerre au moins, ça se discute.

    Ensuite sur le rôle de la Russie: en 1914, la France serait-elle entrée en guerre si la Russie n’avait pas si farouchement soutenu la Serbie dans son désir de constituer le grand regroupement slave? Comme vous dites le différend Austro Serbe aurait pu se régler régionalement.

    En 1939, Hitler aurait-il pu aussi facilement attaquer la Belgique, puis la France sans l’accord secret passé avec Staline pour se partager la Pologne?

    M. Noé soyez prudent dans le rendu de votre voyage en Russie pour ne pas faire comme ces professeurs d’université français de la bien pensance qui, après un colloque au Maroc où ils ont rencontré un petit groupe de professeurs et de dirigeants francophones cultivés, nous assurent que l’Afrique du Nord est une terre de paix et l’islam une religion imprégnée d’amour.

    Un lecteur qui apprécie vos articles.

    Répondre
    • Jean-Baptiste Noé

      16 novembre 2018

      Merci pour vos remarques.

      Sur la guerre en 1939, c’est bien que ce je dis par la suite : sans accord entre Staline et Hitler pas d’attaque de la Pologne. Mais la guerre aurait malgré tout eut lieu puisque Hitler voulait attaquer la France et que son régime ne pouvait survivre que par la guerre.

      Malgré la défaite en 1940, la France siège bien à la table des vainqueurs en 1945 et obtient ainsi un siège permanent à l’ONU. Ne retirons pas l’héroïsme des Français libres qui ont combattu entre 1940 et 1945.

  • Eric

    15 novembre 2018

    « Ces morts sont donc davantage imputables à l’URSS qu’à l’Allemagne. Il n’empêche que les Russes ont payé un lourd tribut à la guerre. »
    C’est vachement stupide d’affirmer cela.
    Les allemands ont envahis l’union soviétique, mais l’URSS est responsable de ses propres morts.
    Par analogie, on pourrait dire que les rabbins sont responsables du génocide car ils n’ont pas su protéger leur peuple.

    Répondre
    • breizh

      15 novembre 2018

      lisez « j’ai choisi la liberté » de Viktor Kravchenko : c’est expliqué !

      ce qu’ont enduré les Russes durant le 20ème siècle par le fait même de leurs dirigeants communnistes est plus qu’impressionnant.

    • Jean-Baptiste Noé

      15 novembre 2018

      Excellent ouvrage en effet, qui est un peu tombé dans l’oubli mais qui mérite d’être lu.

    • Jean-Baptiste Noé

      15 novembre 2018

      Si l’Armée rouge a connu autant de pertes, c’est que ses meilleurs généraux ont été éliminés par les bolchéviques lors d’une série de purges conduites dans les années 1930. A cela s’ajoute la mauvaise conduite de la guerre, le manque de souci des hommes et de graves problèmes de logistique. Une armée normalement organisée et gérée n’aurait pas eu autant de pertes. Donc oui, les communistes sont en partie responsables des morts de l’Armée rouge.

  • Hasan

    14 novembre 2018

    Excellent article ! Agréable à lire et instructif . Cela fait du bien de voir quelqu’un souligner l’importance de la relation russo-française et le niveau de propreté de paris ainsi que le non-respect déroutant des lieux d’apprentissage. Il faut très certainement introduire plus de civisme tant au niveau de la population que des diplomates et autres dirigent.

    Répondre
  • Philippe

    14 novembre 2018

    Nos deux pays sont très proches par la baisse constante du taux de fecondité : 1,75 enfant par femme en Russie – 1,88 en France .
    PIB/habitant France 38,000 $ (PIB national 2583 Mds $ )
    PIB/habitant Russie 8,750 $ (PIB national 1600 Mds $ )
    La Russie repose sur le secteur Matieres premieres ( Gaz Petrole Metaux ) sujet a concurrence mondiale .
    Elle a peu de productions dans le secteur des biens industriels transormés ou évolués , a forte valeur ajoutée , et sa classe moyenne n’ a pas les moyens d’en consommer .
    On peut donc envisager de voir un lent progrés en Russie alors que le niveau du PIB en France sature , et ce qui reste aprés ponction fiscale est assez désolant .

    Répondre
    • monsieur li

      15 novembre 2018

      Les sanctions europeennes ont cependant largement contibue a la diversification de l’economie russe (les hydrocarbures representent quelque chose comme 40% du pib, il me semble, donc rien à voir avec un emirat gazier/petrolier), notamment dans le secteur de l’agriculture.

      Contrairement a la France, le complexe militaro-industriel a su revenir a la pointe de la technologie (ils ont su parvenir à la frontière technologique dans certains secteurs, surtout ceux qui debouchent sur des capacites de deni d’accès), ce qui, combine à une doctrine militaire remise à jour et très efficace (cf. intervention en Syrie), donnent à la Russie une puissance militaire très efficace. Ceci repose evidemment sur les ecoles mathematiques et physiques russes qui sont d’un niveau formidable (pour avoir eu des contacts avec des universitaires russes et d’après ce qu’en disent les universitaires europeens).

      La Russie a en plus developpe un système de transactions financières distinct de SWIFT, domine par les Etats-Unis, et regorge de talents informatiques extraordinaires (au premier rang desquels Pavel Dourov).

      On peut aussi noter que la Russie n’a pas besoin d’immigration pour maintenir son taux de fecondite à ces niveaux – en revanche l’INSEE et l’INED ont etabli que les populations d’origine europeenne ont, meme en France, une taux de fecondite qui tourne autour de 1.2-1.3, alors que les populations d’origine extraeuropeenne sont bien au-dessus. La situation sociale en Russie est donc de ce point de vue socioculturel et religieux bien plus apaisee que la notre.

      Bref, discutez avec un diplomate russe ou lisez des discours d’hommes politiques de haut niveau, et vous verrez à quel point leurs elites dirigeantes diffèrent des notres, et pensez aux consequences de cela.

  • breizh

    14 novembre 2018

    je suis très impressionné par ce qu’ont enduré les Russes au 20ème siècle, tel que le raconte Kravchenko.

    je suis touché par le souvenir qu’ils conservent de l’épopée de l’Escadrille Normandie Niémen !

    je suis également très impressionné par leur maîtrise du jeu en Syrie et l’efficacité de leurs forces armées dans les opérations récentes (Géorgie, Syrie, Crimée…).

    Répondre
  • Pierre Frugier

    14 novembre 2018

    Il est difficile de parler de « La Russie et de Nous » sans invoquer l’ensemble des relations européennes et internationales, et sans oublier le sort de la Pologne, au sujet de laquelle, le chancelier Von Bülow écrivait sagement dans ses mémoires qu’elle était le thermomètre des relations Germano-Russes. De Gaulle prévenait à qui voulait l’entendre qu’il ne fallait jamais laisser parler l’Allemagne et la Russie seules à seules. L’accord de non agression Germano-Russe Bismarckien rendait la citadelle tellurique du continent eurasiatique quasi-imprenable pour les stratégies thalassocratiques. Il est très curieux de voir comment, à la mort fulgurante de son père qui n’a régné que quelques semaines, le très jeune empereur Guillaume II, succédant donc à Guillaume Ier, n’avait rien trouvé de mieux à faire que de congédier le vieux chancelier Bismarck, précisément sur la question du renouvellement du traité de non aggression Germano-Russe, colonne vertébrale du système Bismarckien. 1870 et 1940 Nous rappellent de très mauvais souvenirs quand la troupe russe reste l’arme au pied. Aujourd’hui la voix du canon a cessé de tonner, et l’affrontement historique demeure sur le plan politico-économique. La question se pose aujourd’hui de savoir si l’arrimage de l’Allemagne au bec de gaz russe du Nord Stream 2 n’est pas en passe de reconstituer un nouvel avatar du pacte de non aggression germano-russe, condition de la stabilité géopolitique du continent eurasiatique, nonobstant les nerfs américano-polonais incommodés, qui plus est, lorsque le bouchon russe posé en Crimée invalide toute résurrection d’une Pologne de la mer à la mer. La volonté de Madame Merkel de mettre fin à sa carrière politique procède d’un réalisme politique qu’on n’attend pas spontanément de la part de Mr. Macron.

    Répondre
  • Sarcastik

    14 novembre 2018

    C’est peut-être verser dans un idéalisme béat au regard des réalités économiques et sociales de la Russie mais votre témoignage n’étant pas le premier qui mette en avant certes la propreté mais aussi la plus grande liberté d’expression au sein d’instances universitaires en Russie…

    … Je me demande si les Russes n’ont pas tiré de leurs heures les plus sombres une leçon inverse de la nôtre : pour trouver une solution à un problème, il faut en parler, à tout le moins entre gens de savoir. Inversement, à la suite de la Libération, il semble que notre pays ai pris le parti inverse de ne pas parler des sujets qui fâchent.

    Le centenaire de la 1ère GM en est à ce titre un vibrant rappel puisqu’il fut de bon ton et encore aujourd’hui de considérer que les 4 ans de tranchées avaient pu effacer les fractures politiques dont souffrait le pays… Qui se retrouva de nouveau hémiplégique en 1940 ! Gageons que les divisions d’aujourd’hui ne sont guère plus abordées…

    Répondre
  • candide

    14 novembre 2018

    Bonjour,

    quand vous dites que l’europe centrale est un impensé de la diplomatie française, il rejoint une liste assez longue où l’on trouve l’amérique latine, l’asie, les océans, etc…
    En fait, à part la cause LGBT et le climat, la diplomatie française ne pense à pas grand’chose en ce moment.

    Pour la Russie, les tropismes culturels sont forts. Les mépriser n’est aussi pas qu’une erreur diplomatique, c’est une faute de politique intérieure.

    Répondre
  • Scroubignon

    14 novembre 2018

    Merci pour ce bel article.

    Je me souviens de ma surprise quand je lisais les romans de Dostoievski : il y avait des  »en français dans le texte » à tout bout de champ! Ce n’était d’ailleurs pas des locutions usuelles ou des proverbes, mais simplement ce que le personnage voulait dire à cet instant, cherchant un effet de style, un moyen de paraître plus distingué ou que sais-je encore. J’en avais parlé avec un Russe rencontré par hasard qui était lui plutôt agacé par cette habitude de l’écrivain.
    Qu’un des plus grands romanciers de tous les temps porte un tel intérêt à notre langue (au delà des raisons historiques pour son apparition dans ses romans, il la parlait extrêmement bien, mieux encore que l’allemand dont il pouvait traduire les oeuvres les plus complexes), personnellement je trouve cela très flatteur.

    Je pense aussi à Alexandre Soljenitsyne, qui a l’inauguration de l’Historial de Vendée en 1993 avait donné une critique assez tranchante mais intéressante de la devise française dans son discours :
     »La Révolution française s’est déroulée au nom d’un slogan intrinsèquement contradictoire et irréalisable : liberté, égalité, fraternité. Mais dans la vie sociale, liberté et égalité tendent à s’exclure mutuellement, sont antagoniques l’une de l’autre ! La liberté détruit l’égalité sociale — c’est même là un des rôles de la liberté —, tandis que l’égalité restreint la liberté, car, autrement, on ne saurait y atteindre. Quant à la fraternité, elle n’est pas de leur famille. Ce n’est qu’un aventureux ajout au slogan et ce ne sont pas des dispositions sociales qui peuvent faire la véritable fraternité. Elle est d’ordre spirituel. »

    Hélas, il n’est plus à démontrer que la diplomatie française est aujourd’hui (et depuis quelque temps) d’une incompétence consternante et que nous n’en sommes plus à une ou deux mauvaises décisions…

    Répondre

Me prévenir lorsqu'un nouvel article est publié

Les livres de Charles Gave enfin réédités!