6 novembre, 2013

La cacophonie fiscale atteint des sommets : la France est sur le banc de touche

Depuis des mois nous assistons à un Concours Lépine en matière de fiscalité : on augmente, on refiscalise, on dérembourse, on introduit une décote, on supprime, on module, on gèle…. Plusieurs mauvaises décisions ont déjà eu des effets très négatifs pour l’économie française et pour la création d’emplois. L’automne est meurtrier pour les entreprises françaises. Les faillites atteignent un niveau record : près de 13000 sociétés ont déposé le bilan au troisième trimestre, du jamais vu depuis 1993 !

 

L’imposition à 75% des revenus de plus d’1 M€ se révèle être dans la réalité une fiscalité  spoliatrice à l’égard de ceux qui font la vitalité de notre tissu économique. Certaines entreprises ont du mal à  garder leurs talents. Il faudra peut être un jour remercier les clubs de football qui sont en train d’expliquer au grand public que l’on ne peut demander à des clubs d’être compétitifs sur le plan mondial et leur faire subir en même temps un véritable matraquage fiscal. Un Club de Football cela peut mourir et voir ses meilleurs joueurs partir à l’étranger. C’est tout simplement comme une entreprise…

 

La Taxation du capital à la même hauteur que le travail est une véritable ânerie. Celui qui investit de l’épargne qui a déjà payé l’impôt et qui peut tout perdre,  ne peut être fiscalisé au même niveau que le salarié qui est sûr d’être payé à la fin du mois et n’a pris aucun risque. L’alignement de la taxation des revenus du capital sur les revenus du travail  entraine déjà une baisse sensible des investissements en France…

 

La taxation des dividendes à 3% est une autre erreur.  Les sociétés réalisant plus de 50 millions de chiffre d’affaires et employant plus de 250 salariés devraient se voir imposer une taxe de 3% sur les dividendes qu’elles versent à leurs actionnaires. Encore une grave erreur économique..

 

La taxe sur l’excédent brute d’exploitation était une initiative idiote, dont n’importe quel chef d’entreprise pouvait dire qu’elle pénaliserait l’investissement. Dans une administration comprenant de nombreux énarques et polytechniciens brillants, on aurait du trouver des intelligences capables de voir l’idiotie et de la dire. Cela n’a malheureusement pas été le cas…

 

Au Parti Socialiste la créativité est permanente. Tout député, pour reprendre la formule d’Andy Warhol, peut avoir facilement son quart d’heure de célébrité en proposant un nouvel impôt stupide.

 

Yann Galut député PS propose une Taxation des revenus des exilés.  Lui qui a travaillé sur  l’exil fiscal assure que “rien ne démontre une augmentation du phénomène d’émigration fiscale, car il n’y a pas d’instrument pour qualifier et quantifier l’exil fiscal”. Cela ne l’empêche pas de proposer de taxer les exilés fiscaux sur la base de “la fiction de la résidence continuée” (sic). La taxe viserait à “imposer les revenus des exilés comme ceux des résidents pendant les dix années suivant leur transfert à l’étranger” . Dans sa grande sagesse Bercy a répondu que vu la complexité de la chose, la mesure n’était pas envisageable pour le moment…

 

Gérard Bapt député PS, a eu l’idée d’une Taxe sur les boissons énergisantes. Il s’agit de taxer les ventes de Red Bull et autres….Pour lui, « cette nouvelle taxe est conçue non pas dans une visée de recette mais à visée comportementale ». Comme un rééducateur du peuple n’est jamais isolé, la Ministre de la Santé, Marisol Touraine a ajouté que « la fiscalité comportementale n’était pas le seul instrument des politiques de santé publique ». On est en présence de gens qui veulent rectifier le comportement de citoyens adultes qu’ils jugent eux mêmes déviants…

 

Dominique Raimbourg  député PS, c’est une nouveauté, a inventé le concept de l’impôt sur l’impôt, en imaginant une taxe sur les droits de mutation . Ce nouveau prélèvement serait destiné à financer l’aide juridictionnelle !

 

Pour être tout à fait sûr d’achever l’économie française et de la sortir définitivement de la compétition mondiale, il ne reste plus qu’à mettre en place ce que François Lenglet du Point a appelé « l’extrême ponction » :

 

La proposition de Thomas Piketty, économiste dans « Pour une révolution fiscale… »: un impôt supplémentaire pour les propriétaires de logement,  au prétexte que ne payant pas de loyers ils touchent l’équivalent d’un revenu, lequel doit être soumis à l’impôt !

Dans la foulée, il propose avec Philippe Van Parijs fondateur du  « No-Bullshit Marxism Group », la mise place d’un Revenu d’existence. Ce serait  une sorte de RMI  donné à tout le monde sans conditions de ressources !

 

La proposition de supertaxe sur la capital, inspirée des travaux de Barry Eichengreen économiste américain et Stefan Bach économiste allemand.  Elle consisterait à taxer de 10% l’ensemble de l’épargne des ménages pour éponger le déficit de l’état…

 

La cacophonie est telle sur le plan fiscal, que même Christian Noyer le Gouverneur de la Banque de France s’est autorisé à sortir de sa réserve pour expliquer dans le Financial Times que la Taxe sur les transactions financières  était un projet trop risqué pour les pays qui l’appliqueraient. Cela provoquerait selon lui une baisse de la liquidité sur les marchés et de graves pertes d’emploi. Ambiance….

 

En Europe, une correction des marchés devrait se produire autour de la fin de l’année selon Christopher Potts le stratégiste de Kepler Cheuvreux. La croissance meilleure que prévue ne se répercute plus selon lui,  dans les résultats des entreprises.

 

L’Europe périphérique devient le concept d’investissement à la mode, En Espagne, la compétitivité retrouvée du pays permet aux exportations de progresser. C’est la fin de la récession mais pas la fin de la crise. Pour saluer les efforts effectués, l’agence de notation Fitch a relevé la note de l’Espagne. En Italie, on a le sentiment que le pire est vraiment derrière. Le commerce extérieur et la balance des paiements courants sont de nouveau excédentaires. Quand on regarde le comportement de leurs marchés respectifs les deux places avancent en tandem. Parmi les valeurs les plus achetées par les investisseurs on trouve pour l’Espagne notamment : BBVA, Iberdrola, Repsol, Sacyr et Telefonica ; et pour l’Italie : Ansaldo, Enel, Fiat, Intesa San Paolo, Mediobanca, Unicredit

 

Aux Etats Unis, le dollar faible ne devrait pas mettre fin à la pagaille monétaire.

La création d’emploi par le secteur privé, la seule qui compte, est au plus bas depuis le mois de mai. Le Citigroup Economic Surprise Index est en fort recul. C’est la raison pour laquelle Chris Wood le stratégiste de CLSA pense que la première décision de Janet Yellen qui succédera à Ben Bernanke à la tête de la Federal Reserve, ne sera pas de réduire ses interventions mais de les augmenter ! Le problème reste donc posé de savoir si les marchés salueront cette nouvelle « injection de morphine » ou commenceront à penser que personne ne sait vraiment comment sortir de l’expérience monétaire que nous sommes en train de vivre. Il s’agit de ZIRP (=Zero Interest Rate Policy) + QE (=Quantitative Easing)…

Plusieurs signes ne sont pas encourageants :les introductions en bourse se multiplient comme en 1999 et les hedge funds ont été vendeurs d’actions dans des proportions comparables à celles précédant la chute des marchés en 2008. Andrew Garthwaite le stratégiste de Crédit Suisse estime qu’il faut maintenant diminuer l’exposition sur le marché américain. Michael Hartnett de Bank of America Merrill Lynch redit que plus on mettra de temps à normaliser les interventions de la Fed plus les risques de bulles spéculatives seront importants…

 

Au Japon, la TVA augmentera de 5 à 8% au Japon en avril, moment où les salaires devraient commencer à augmenter. Les prix de l’immobilier au augmenté de 22% en un an.

 

Les fabricants de toilettes sortent de bons résultats…

 

Plusieurs sociétés ont annoncé des résultats décevants notamment Cummins, Goodyear, Michelin pénalisés par les changes, Kuka,  le numéro un de la robotique allemande qui souffre de la baisse du Yen. Il vient d’ailleurs d’être recommandé à la vente par Warburg.

 

Les bonnes surprises sont plus rares Geberit, le fabricant de toilettes suisses a sorti de  très bons résultats Le marché américain des toilettes s’est complètement restructuré ces dernières années. Il reste  Kohler (24% de part de marché);  American Standard (18% du capital contrôlé par le japonais Lixil Corp ); Toto (9% la Rolls Royce des toilettes japonaises);Mansfield Plumbing Products ( 8% contrôlé par Organizacio Corona en  Colombie). Pendant ce temps un groupe de technocrates bruxellois a rédigé un rapport de 444 pages réalisant une étude minutieuse des toilettes urinoirs de la Communauté Européenne pour réduire la consommation d’eau dans les chasse d’eau. Cela a coûté 89 300€. On est vraiment heureux de savoir que les fonctionnaires de la Communauté Européenne se penchent sur les problèmes importants…

 

Deux thèmes porteurs : rachat de titres et fusions acquisitions

 

Les sociétés qui rachètent leurs propres titres font partie des thèmes les plus performants du marché américain. Parmi les valeurs qui figurent sur la dernière liste de Goldman Sachs figurent notamment : Northtrop Gruman, Western Digital, Coca Cola Enterprises, Marathon Petroleum, L Brands (= Victoria Secret), Yahoo, et Pfizer.

 

Les fusions acquisitions se multiplient, c’est la raison pour laquelle le Crédit Suisse a sorti un tracker des valeurs les plus susceptibles de faire l’objet d’une opération. Parmi les valeurs françaises figurent Alcatel Lucent et Arkema ; les valeurs anglaises Burberry, Sage, Spectris ; les valeurs allemandes Dialog ; les valeurs suisses Sonova et Straumann

 

 

Auteur: Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Bordeaux, titulaire d’une licence en droit de l’Université de Paris X. Il a été successivement fondé de pouvoir à la charge Sellier, puis associé chez Nivard Flornoy, Agent de Change. En 1987, il est nommé Executive Director chez Shearson Lehman Brothers à Londres en charge des marchés européens et membre du directoire de Banque Shearson Lehman Brothers à Paris. Après avoir été directeur général associé du Groupe Revenu Français, et membre du directoire de Aerospace Media Publishing à Genève, il a créé en 1996 Concerto et Associés, société de conseil dans les domaines de le bourse et d’internet, puis SelectBourse, broker en ligne, dont il a assuré la présidence jusqu’à l’ absorption du CCF par le Groupe HSBC. Il a été ensuite Head of Strategy de la société de gestion Montpensier Finance.

8 Commentaires

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  • wan

    7 novembre 2013

    bonsoir,
    je trouve par contre le revenu d’existence intéressant pour lutter contre l’assistanat notamment…
    http://le-revenu-de-base.blogspot.fr
    il y a une vidéo d’une bonne heure intéressante à ce sujet…

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  • GdV

    7 novembre 2013

    Bonsoir,
    cette vision assez déformée et presque ridicule du fonctionnement de l’économie n’a pas de couleur politique. En France, je me souviens de Nicolas Sarkozy qui proposait d’instaurer une nouvelle règle de distribution du résultat des entreprises avec 1/3 pour l’entreprise, 1/3 pour les salariés et 1/3 pour les actionnaires.
    Osez sortir une pareille stupidité, laisse penser qu’il ne savait pas très bien ce qu’est un résultat comptable…comment distribuer un résultat qui est passé dans les besoins de financement de l’entreprise sans laisser un sou dans la trésorerie.
    Quant à la fiscalité Française c’est une usine à gaz qui a perdu tout contact avec la logique de la substance taxable. Elle provoque des dégâts considérables dans l’économie. Même les fonctionnaires de l’administration fiscale sont découragés et perdus devant la difficulté d’appliquer les règles.
    Ce qui est assez incroyable et me laisse coi, c’est que le machin fonctionne encore.

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    • Nicolas

      8 novembre 2013

      Tant qu’il y a  » des cons pour payer » et surtout, que l’Etat peut emprunter, oui, ca  » fonctionne »..

  • Nicolas

    7 novembre 2013

    Il y a visiblement un grave probléme de logiciel dans la tête des membres de cette sensibilité politique…

    On dirai nos amis de 89 qui « ayant La Raison » detruisent l’economie par les assignas et en conclu qu’il y a donc un gigantesque complot contre eux et  » La Raison », et se lance dans la Grande Terreur et le Genocide, seul possibilité que leur laisse leur idéologie… On ne va tout de meme pas se remettre en cause et avouer qu’on est completement nul..

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  • BA

    7 novembre 2013

    Le Japon, les Etats-Unis, et une dizaine de pays européens vont se déclarer en défaut de paiement. Ce genre de « saignées » est un grand classique dans l’Histoire du monde : il y en a déjà eu des centaines.

    Quand ces « saignées » vont se produire, il y aura le chaos.

    L’éclatement de ces bulles obligataires va créer le chaos dans les pays occidentaux, avec notamment :

    – la disparition des retraites par capitalisation (massivement placées en obligations d’Etat)

    – la disparition de l’assurance-vie (massivement placée en obligations d’Etat)

    – la faillite des banques (massivement détentrices d’obligations d’Etat)

    – la faillite des sociétés d’assurances (massivement détentrices d’obligations d’Etat), etc, etc.

    Pour savoir dans quels pays européens auront lieu ces « saignées », voici les chiffres de la fin juin 2013 :

    1- Médaille d’or : Grèce. Dette publique de 316,969 milliards d’euros, soit 169,1 % du PIB.

    2- Médaille d’argent : Italie. Dette publique de 2076,182 milliards d’euros, soit 133,3 % du PIB.

    3- Médaille de bronze : Portugal. Dette publique de 214,801 milliards d’euros, soit 131,3 % du PIB.

    4- Irlande : dette publique de 204,495 milliards d’euros, soit 125,7 % du PIB.

    5- Belgique : dette publique de 397,851 milliards d’euros, soit 105 % du PIB.

    6- Chypre : dette publique de 16,906 milliards d’euros, soit 98,3 % du PIB.

    7- France : dette publique de 1912,205 milliards d’euros, soit 93,5 % du PIB.

    8- Espagne : dette publique de 943,410 milliards d’euros, soit 92,3 % du PIB.

    9- Royaume-Uni : dette publique de 1422,213 milliards de livres sterling, soit 89,6 % du PIB.

    http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/2-23102013-AP/FR/2-23102013-AP-FR.PDF

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  • David Jeames

    7 novembre 2013

    La cacophonie fiscale atteint des sommets, car elle a atteint le sommet de l’état …

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  • Roger Duberger

    6 novembre 2013

    Merci JJ Netter,
    C’est toujours interessant de lire votre récapitulatif, car vous passez en revue les avis des stratégistes, et donnez un aperçu du climat financier dans d’autres régions du monde. Je partage votre avis sur le méccano fiscal français, il faudrait colmater les brèches avant de remplir la baignoire ! Comme dit Charles Gave, les français ont du génie (ça se voit très bien quand on visite notre beau pays), c’est aussi le cas pour la fiscalité avec une belle réussite : la TVA et de beaux échecs dont l’impôt sur les portes et fenêtres est le plus visible….je me demande si les guides touristiques expliquent aux étrangers pourquoi on voit tant de fenêtres (prévues et non percées) sur de jolies façades de pierre…
    Bien cordialement

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  • FrancisC

    6 novembre 2013

    Un beau récapitulatif de toutes les âneries ambiantes destructrices et anxiogènes.

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Les livres de Charles Gave enfin réédités!