20 juin, 2015

Point d’étape sur la campagne présidentielle américaine…

A mon dernier passage à Paris il y a 3 semaines, Charles Gave m’a encouragé à continuer de partager avec vous mes impressions d’un acteur de plus en plus engagé avec le candidat Rand Paul. .Je viens de lire le papier de Charles sur la terre, et certaines de vos réactions, je mesure l’attachement émotionnel et quasiment charnel de nombre d’entre vous avec la France. Pour ma part, je n’éprouve jamais ce sentiment lorsque je suis à Paris, les choses deviennent différentes en revanche lorsque je me retrouve en Provence. Il est bon sur un site tel que celui de l’IDL de prendre parfois du recul, de parler d’autres choses que des escapades du Premier ministre en Falcon. Je ne suis pas socialiste, ni fan de football, « soccer » comme on dit ici, mais je comprends qu’on s’enfuie ne serait-ce que pour quelques heures d’un Congrès sans objet et de réunions formelles qui traduisent le déclin permanent des formes traditionnelles d’engagement politique.

Avant de revenir à la politique américaine, une remarque qui surprendra certains et peinera beaucoup, La réélection PAR DEFAUT, OU PLUTOT PAR DIFFERENCE, de François Hollande est pour moi le scénario à ce stade – les choses peuvent changer- le plus vraisemblable. En effet, si Nicolas Sarkozy est investi par l’opposition, le Centre aura un candidat et les voix se diviseront, positionnant Le Pen et Hollande – ou Vals – pour le second tour .Si d’aventure, Juppé emporte la primaire, nombre de voix dites de droite dure ne le soutiendront pas et il devra convaincre la gaucher de voter utile des le premier tour. Selon un proche de Hollande, que je connais à titre amical, c’est la seule hypothèse qui inquiète vraiment le Président.

Cinq ans d’immobilisme, à moins que, comme il l‘avait confié à certains journalistes, lors de sa première élection, il ne se décide enfin à reformer ?

Si l’on prend encore un peu plus de recul, on est frappé de part et d’autre de l’Atlantique, par la similitude des choix politiques qui s’offrent aux électeurs, à l’intérieur et en transcendance des courants politiques traditionnels de droite et de gauche. Pour faire court, je dirai ouverture contre fermeture, ou protection contre émulation.

Sur un sujet tel que le TTIP -Transatlantic Trade and Investment Partnership – ou son équivalent Pacifique, on voit clairement ces clivages en action.

Vendredi dernier, une coalition formée d’une minorité de républicains isolationnistes, et d’une majorité de démocrates « progressistes », sous la pression d’activistes de tous bords et de leaders syndicaux, a refusé a un des Présidents les plus partisans de l’histoire récente américaine, le « Trade Promotion Authority » qu’ont eu la quasi totalité de ses prédécesseurs de manière bipartisane, pour négocier et signer, sous réserve d’un vote bloqué les accords commerciaux internationaux, bi ou multilatéraux.

Sur ce thème, le Président Obama, sans doute poussé par une partie de son entourage, et un souci de mettre certains acquis à l’actif de sa Présidence qui en si peu, a épousé les thèses des libre échangistes contre sa base protectionniste, et a du s’allier avec l’opposition républicaine qui contrôle les deux chambres du Congrés.

Ceci n’a pas suffi, soumis à de fortes pressions dans leur circonscription, les membres démocrates de la Chambre soumis a réélection tous les deux ans, et les sénateurs de l’échéance 2016, dans des circonscriptions ou leur majorité est faible, ont refuse le TPA, infligeant un désaveu majeur à Obama. Celui-ci paie aussi les relativement mauvaises relations qu’il n’a jamais réellement tenté d’améliorer avec le Congrès, y compris son propre parti. La véritable leçon de ce scrutin est la coalition contre nature qui a désavoué un Président en conjuguant des représentants de la gauche progressiste et des isolationnistes de droite.

Les conséquences seront significatives, le traité Trans Pacifique, sans la procédure accélérée, n’a aucune chance réelle d’aboutir avant la fin du mandat Obama, et le traite Trans Atlantique qui lui-même était très en retard devient un objectif clairement hors d’atteinte.

Ces accords ont pour objet d’ouvrir les frontières par des harmonisations de cadre réglementaire, plus que des réductions de tarif déjà très abaisses. Les accès réciproques au x marchés publics resteront limités, certains se féliciteront des protections maintenues contre les poulets au chlore et les OGM, mais le taux de croissance de nos économies en pâtira.

Sur ce sujet, comme sur d’autres, Hillary Clinton, désormais candidate officiellement déclarée, se garde bien de prendre position, son seul argument mais il peut porter, elle l’a répété samedi dernier dans un grand meeting à New York, siège de sa campagne, étant « je ne suis pas le candidat le plus jeune dans cette compétition, mais je serai la plus jeune femme jamais présidente de l’histoire des Etats Unis ».

Hier lundi 15 Juin, sans surprise dans son ancien fief électoral de Miami, Jeb Bush, troisième potentiel président de ce patronyme depuis 1988, s’est lui aussi officiellement déclaré, après une pré campagne qui ne lui a pas encore reconnu le statut de chef de file incontesté pour l’investiture républicaine.

A ce stade le duel tant appréhendé Bush Clinton, que je qualifie sur Face book, de « back to the future », en référence a un film culte de ma génération, n’est pas acquis.

Hillary Rodham Clinton sera très vraisemblablement investie par les démocrates, Bush c’est beaucoup moins certain. Mais pas impossible.

Il y a du coté républicain, pléthore d’aspirants.

Et mon souci, partagé par beaucoup de mes amis politiques, est d’investir un candidat qui a une chance réelle de battre HC. Ce qui suppose de mobiliser dans les urnes au delà de la base traditionnelle sans l’aliéner. D’où l’importance de certains marqueurs, qui ne doivent toutefois être des repoussoirs pour les nouvelles catégories que l’on cherche à rallier. La droite évangéliste peut gagner certaines primaires dans le Sud, telles en Caroline du Nord, moins évident dans le New Hampshire. La politique étrangère n’est jamais un facteur dominant mais la présence de certaines communautés telles les israélites a New York, ou en Floride rend la question du Moyen Orient, et d’un éventuel accord nucléaire avec l’Iran, un obstacle à l’adhésion à tel ou tel candidat.

Le principal parti pour lequel se déclarent les électeurs est « indépendant » sans affiliation.

Cet électorat flottant est lui-même partage entre démocrates et républicains, un faible pourcentage, moins de 10%, concentré sur les Etats dits « swing », tels la Floride et l’Ohio, décident du résultat final, ce qui rend le vote dans les plus grands Etats sans incidence réelle, belle leçon de démocratie appliquée.

Pour ma part, j’ai rejoint le comite financier de la Campagne du Sénateur Rand Paul, il a contre lui sa fraicheur politique, premier mandat achevé en 2016, mais il est le fils de son père, qui a 30 ans de vie politique et des engagements « libertariens » forts.

Ce n’est pas un nouvel Obama sans expérience autre que d’activisme, il a aussi derrière lui une carrière d’ophtalmologiste.

Le fils se démarque du père, sans le parricide à la Le Pen. Mais un engagement clair pour une politique d’intervention militaire limitée, reconnaissant les erreurs commises en particulier en Irak, et en Lybie. D’où l’opposition des néo-conservateurs.

Des positions plus ouvertes sur les sujets sociétaux, un souci de ne pas aliéner a priori les minorités.

Une approche réaliste sur le sujet d’immigration, contrôle de la frontière Sud, arrêt des déportations et un parcours raisonne pour la légalisation. Sur les autres thèmes, un conservateur fiscalement responsable, et une défiance vis-à-vis de la politique monétaire menée par le Reserve Fédérale.

Quelles sont ses chances, faibles sans doute car il est peu ou soutenu par les notables et caciques du parti.

Mais il est intéressant de noter qu’il est a ce stade un de ceux qui font mieux que beaucoup d’autres y compris Jeb Bush contre HC.

 

Auteur: Jean-Claude Gruffat

Jean Claude Gruffat est depuis Avril 2020 Managing Director chez Weild and Co, banque d’affaires indépendante présente dans plus de 20 États aux États Unis. Après une carrière dans la banque internationale chez Indosuez, puis Citigroup. Jean Claude Gruffat est le Chairman de Competitive Enterprise Institute, et un board member de Atlas Network, toutes deux think thanks libertariennes domiciliées à Washington DC. Il est également gouverneur de L’American Hospital de Paris. Titulaire d’un doctorat en droit public, et d’une maîtrise de science politique de l’Universite de Lyon, ainsi que ancien participant au Stanford Executive Program, GSB, Stanford University, CA.

2 Commentaires

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  • Aljosha

    22 juin 2015

    Oui, bonne chance pour cette campagne qui doit être aussi exténuante que palpitante.
    Cela me semblerait néanmoins équitable que le rendez-vous de l’ophtalmo soit pour dans 4 ans …

    Répondre
  • David Jeames

    22 juin 2015

    Je vous souhaite bonne chance pour la campagne. Le discours que le Sénateur Rand Paul a effectué lors de la déclaration de sa candidature me remplit d’espoir, ainsi que la vidéo que l’IdL a mise à disposition. Si jamais il est élu, l’impact dépasserait largement les USA.

    Répondre

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