14 février, 2014

Se reconnaître libéral, serait-ce un gros mot ?

Pour commencer, il y a souvent erreur sur la définition du libéralisme qui n’est ni une idéologie ni une doctrine économique, mais plus simplement une philosophie basée sur un double principe fondamental : le droit prime l’État, et l’individu l’emporte sur la collectivité, ce qui est le cas, par exemple, aux États-Unis, enGrande-Bretagne ou en Suisse. Or, en France, c’est tout le contraire : l’État est supérieur au droit, et le collectif l’emporte sur le citoyen avec comme conséquence que le social passe avant l’économie. L’État peut même y changer le droit selon les nécessités ou les majorités du jour, ou selon les circonstances historiques. Les Américains ont la même Constitution depuis l’origine, tandis que la France, pendant la même période, a vu passer deux empires, deux ou trois monarchies, cinq constitutions républicaines, sans compter quelques régimes hybrides, comme le Consulat ou Vichy.

Cette instabilité est liée à notre histoire moderne très belliqueuse qui commence par une Révolution sanglante pour se terminer par deux guerres mondiales après lesquelles nos intellectuels d’extrême gauche n’ont rien trouvé de mieux que de participer à la création d’une catastrophe idéologique, le communisme, basé sur une dictature du collectivisme poussé à son paroxysme, dans lequel les individus comptent à peine plus que des fourmis.

Apparatchiks à la mode soviétique

De plus, nous vivons dans un curieux pays qui a su créer, au fil du temps, une nouvelle classe sociale, au sens marxiste du terme, une noblesse d’État dont les privilèges et les vanités dépassent l’entendement : les énarques qui nous gouvernent – qu’ils soient de gauche ou de droite -, ces apparatchiks à la mode soviétique, se considèrent en effet comme étant seuls capables de diriger le pays alors qu’ils sont proprement incompétents en matière économique. Non seulement on ne leur a rien appris à l’Ena sur les réalités économiques, mais ils n’ont pas eu, après l’Ena, la moindre expérience de l’entreprise ni la moindre envie d’aller voir sur place comment réussissent nos voisins et nos cousins, à de rares exceptions près. Ce qui n’a pas empêché Hollande et Moscovici d’avoir été « professeurs d’économie » (sic) à Sciences Po pendant de longues années. Pour y enseigner quoi ? L’économie administrée à la française ? Le modèle « social-démocrate » français ?

Avec la mondialisation qui demande des guerriers libéraux, et non des collectivistes fatigués, il nous faudrait plus que jamais des managers dans nos ministères, alors que nous n’y avons que de hauts fonctionnaires et des politiciens. Nous n’avons personne du bon côté, et pléthore de l’autre ! Ces énarques (de gauche et de droite), emmitouflés dans leurs certitudes et engoncés dans leur idéologie étatique, nous expliquent sans arrêt que pour s’attaquer aux déficits il faut augmenter les impôts – c’est malheureux, disent-ils, mais, selon eux, c’est de la bonne et saine gestion. Et cela conforte leur pouvoir face aux entrepreneurs qu’ils n’aiment guère. Comme les Diafoirus du Malade imaginaire, ils ne connaissent qu’une seule méthode pour « soigner » : les purges et les saignées.

« Tout ce qui bouge, on le taxe »

Le président américain Ronald Reagan, à la fin des années 70, critiquant la politique des démocrates de l’époque, les avait ainsi épinglés : « Tout ce qui bouge, on le taxe ; ce qui bouge encore, on le réglemente ; tout ce qui ne bouge plus, on le subventionne. » En France, en 2014, on en est encore là !

Dernièrement, Le Postillon du Point (dans son numéro du 23 janvier, NDLR) avait posé les bonnes questions sur le libéralisme et l’historien-philosophe Alain Laurent avait donné les bonnes réponses :

1. Le libéralisme n’est pas une idéologie, mais une philosophie qui n’a rien à voir avec la cupidité des traders et des grands patrons avides de retraites-chapeaux.

2. Notre problème principal en France n’est pas la finance internationale, mais bien nos dettes publiques.

3. « L’État providence à la française est condamné. Il va mourir de son obésité. Il est condamné économiquement, parce que, financé à crédit, il s’achève inéluctablement en féroce répression fiscale. »

Alain Laurent s’étonne encore de la propagande antilibérale en France et constate qu’il est tout de même aberrant de voir « l’ultralibéralisme mis en cause dans un pays où l’État dépense 57 % du PIB ». Et il ajoute : « Comment être politiquement libre lorsqu’on dépend économiquement de l’État pour son emploi, son logement, ses vacances…, comme dans l’ex-URSS. » Dans un monde libéral, donc, l’État doit être ramené sous le contrôle du droit et du contrat. Il ne devrait plus pouvoir, comme il vient encore de le faire, dans un décret paru au Journal officiel le 31 décembre, remettre en cause de façon rétroactive la fiscalité des assurances santé complémentaires d’entreprise : dans un État de droit, retoquer ainsi un contrat librement consenti constitue purement et simplement un abus de droit. Le citoyen a-t-il des armes pour s’y opposer ? Non. Aucune.

L’égalité, oui, mais pas pour les fonctionnaires

Une autre particularité de la France étatique : sa recherche éperdue d’égalité, du moins dans l’attitude, les discours et les textes de nos politiciens nationaux, en majorité issus de la fonction publique. L’égalité, oui, mais pour les autres, pas pour les fonctionnaires qui sont l’exemple même d’un système social basé sur l’inégalité : les fonctionnaires sont mieux payés, travaillent moins, sont plus souvent malades ou absents, bénéficient de plus d’avantages et de privilèges, partent à la retraite plus tôt avec de meilleures pensions et surtout détiennent durant toute leur vie un vrai trésor : la sécurité de l’emploi. Ce qui ne les empêche pas, bien entendu, de critiquer en permanence « les inégalités », alors qu’ils en sont les premiers bénéficiaires.

La vraie inégalité sociale en France n’est pas entre les riches et les pauvres ou entre les hommes et les femmes, mais entre les fonctionnaires et les autres. De plus, contre l’État, en cas de problème, le citoyen ordinaire n’a pas la moindre chance. L’État, qui a créé son propre droit administratif, est à la fois juge et partie contre ses propres citoyens ! Une monstruosité philosophique ! Lorsque François Hollande et Jean-Marc Ayrault demandent aux entrepreneurs de s’engager à créer des emplois en contrepartie d’une diminution des prélèvements qui leur sont imposés, c’est encore le monde à l’envers. L’État, dans le « donnant-donnant » qu’il veut instituer, ne « donne » rien aux entreprises quand il consent à les étrangler un peu moins, et les entreprises, de leur côté, n’ont rien à donner à l’État. Elles s’efforcent de survivre dans un environnement hostile et, quand elles y arrivent, elles peuvent éventuellement créer des emplois si la conjoncture s’y prête. Encore faudrait-il d’ailleurs, si la conjoncture devait ensuite se retourner, qu’elles puissent licencier aussi facilement qu’elles ont pu recruter.

Or, de quoi est-il question cette fois-ci ? De créer une nouvelle usine à gaz en mobilisant des milliers de fonctionnaires armés de centaines de pages de nouveaux textes contraignants pour contrôler, punir et finalement re-taxer les entrepreneurs qui n’appliqueraient pas, selon le bon vouloir de l’administration, des engagements parfaitement illusoires. François Hollande et Jean-Marc Ayrault se disent maintenant « sociaux-démocrates ». La belle affaire ! C’est Astérix et Obélix dans la mondialisation en train de nous jouer du pipeau. Ils sont, et restent avant tout, des étatistes. Ils administrent, à l’aide d’une camisole dogmatique, un vieux pays très malade et très obèse, à moitié sourd et aveugle, dont les muscles sont atrophiés et qui n’ose plus sortir de sa chambre de peur d’attraper froid ou de se casser une jambe en glissant sur un trottoir. Et pourtant, il faudra bien qu’il aille un jour consulter le médecin du bout de la rue, dont le cabinet médical s’appelle « Libéralisme », car sinon viendra un moment où il sera vraiment trop tard.

 

Par JEAN NOUAILHAC

 

Sources de remerciements  Le point

 

 

Auteur: idlibertes

Profession de foi de IdL: *Je suis libéral, c'est à dire partisan de la liberté individuelle comme valeur fondamentale. *Je ne crois pas que libéralisme soit une une théorie économique mais plutôt une théorie de comment appliquer le Droit au capitalisme pour que ce dernier fonctionne à la satisfaction générale. *Le libéralisme est une théorie philosophique appliquée au Droit, et pas à l'Economie qui vient très loin derrière dans les préoccupations de Constant, Tocqueville , Bastiat, Raymond Aron, Jean-François Revel et bien d'autres; *Le but suprême pour les libéraux que nous incarnons étant que le Droit empêche les gros de faire du mal aux petits,les petits de massacrer les gros mais surtout, l'Etat d'enquiquiner tout le monde.

12 Commentaires

Répondre à Roger Duberger

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  • dede

    18 février 2014

     » C’est Astérix et Obélix dans la mondialisation en train de nous jouer du pipeau. Ils sont, et restent avant tout, des étatistes »

    En quoi Asterix et Obelix sont-ils etatistes? Certes, ils respectent Abraracourcix leur chef mais ce n’est generalement pas eux qui empechent Assurancetourix le barde de chanter. Je les vois plutot liberaux…

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  • jeamb

    17 février 2014

    Bonjour,

    N’y a t-il personne chez IDL qui voudrait bien présenter une liste au prochaine élection présidentielle? C’est une question sérieuse, car plus je vous lis, et plus je me dis que une partie des solutions se trouvent ici…

    En espérant une réponse (favorable 🙂 )… Je veux bien participer financièrement a votre futur parti apolitique !!

    En attendant, toutes mes félicitations pour ce site que je suis régulièrement

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  • LRF

    15 février 2014

     » Ils administrent, à l’aide d’une camisole dogmatique, un vieux pays très malade et très obèse, à moitié sourd et aveugle, dont les muscles sont atrophiés et qui n’ose plus sortir de sa chambre de peur d’attraper froid ou de se casser une jambe en glissant sur un trottoir. Et pourtant, il faudra bien qu’il aille un jour consulter le médecin du bout de la rue, dont le cabinet médical s’appelle « Libéralisme », car sinon viendra un moment où il sera vraiment trop tard. »

    Il me semble que vous êtes optimiste sur les Francais! Je vous propose de lire le livre du Prince Michel Bourbon-Parme -Un Prince dans la Tourmente.

    —–Repéré par L’OSS, ancêtre de la CIA, il est envoyé en Angleterre pour intégrer l’unité top sécrète des commandos Jedburgh- 300 Français,Américain et Britanniques, sélectionnes pour leur physique et leur mental,puis entraînés a la guérilla. Son équipe sera parachutée dans le Massif Central en Juin 1944 afin d’encadrer la Résistance locale et de harceler la Division Das Reich, en route vers la Normandie.—–
    Il vous donnera un extraordinaire aperçue de la population Française et de leur comportement vis a vis de leur propre compatriote. Moi même issue d’une école de commerce dépendante d’une chambre de commerce et officier instructeur dans les Fusiliers Marins de L’orient pendant mon service militaire. j’ai eu la chance de pouvoir échantillonner la moyenne de la population Française, je peux vous garantir que votre optimisme sur le dénouement finale est mal place. Vos efforts d’éducation sont noble mais les racines du mal sont trop profondes pour être balayées sans des Evénements Dramatique. La plus indolore serait un esclavage impose par les Allemands …Nous y sommes.

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  • serguei

    15 février 2014

    Très juste en plus d’être concis, ce qui ne gâche rien!

    Mais quand tout cela va t il s’arrêter?

    Quel moyen ont les citoyens lucides et écœures ne s’élever contre cette « monarchie technocratique »… Le vote n

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    • serguei

      15 février 2014

      … Le vote n est plus un moyen de contestation suffisant lorsque le clientélisme prévaut

  • vivelafrance

    14 février 2014

    Il y a bien ceux qui vivent ou qui préfèrent vivre dans le déni car cela les soulagent énormément ou les arrangent de penser qu’être communiste ou de gauche c’est être du bon coté, du coté des justiciers et de Robin des bois, ils ont le sentiment d’être bon d’être des gens biens et le mot capitaliste est effrayant pour eux !!!).
    Moi j’appelle cela le narcissisme, la piété ostentatoire ou encore de la lacheté pour d’autres
    Bien sur l’incompétence, le manque de connaissance en droit en économie ou encore en fiscalité en France ne facilite pas la tache pour ceux qui défendent les valeurs libérales cad le droit de ne pas être pris pour un c** par les médias. lol
    Je me souviens qu’un jeune étudiant courageux, lors d’un débat dans une émission tv, avait « oser » critiquer l’euro mais il s’est fait plus ou moins traité en quelque sorte d’incompétent qui ne comprenait rien à l’économie et qui ne savait pas ce qu’il disait par Michel Barnier. ce dernier n’a visiblement pas pu supporté que l’on critique l’euro.

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  • Roger Duberger

    14 février 2014

    Bonsoir,
    Ce que vous dites est très juste, mais pour 90 % des français, il y a une grosse confusion entre libéralisme et mondialisation. Commerce, libéralisme, mondialisation, spéculation, patron sont des « gros maux » et nos gouvernants de gauche (depuis 33 ans) vont réussir à mâter les entrepreneurs. Bientôt, il n’y aura plus que des mignons petits fonctionnaires pas trop fatigués de regarder leur montre, en attendant le week end ou la retraite. Les jeunes ne s’y trompent pas, le métier qu’ils veulent embrasser : fonctionnaire ! ….

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  • Marius

    14 février 2014

    Parfait tout ça.

    Chaque politique devrait lire Tocqueville. Tout y est. Mode d’emploi à l’usage de tous nos politiques. Mais savent-ils qui est Tocqueville ? On en est là…

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  • BUYBYE

    14 février 2014

    Il ne faut malheureusement pas les croire aussi stupides… Ils ont organisé depuis longtemps la faillite des français, de l’enseignement, de la justice, de l’armée… pour leurs profits individuels en achetant les votes de leurs complices, naïfs ou fonctionnaires ou étrangers tout juste naturalisés, ainsi que des banquiers, journalistes, et autres députés qui ne font que défendre et augmenter leurs privilèges: même la parité, dont ils nous rabattent les oreilles leur est complètement étrangère! Leur pourriture morale est-elle négociable?

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  • bernard

    14 février 2014

    L´innégalité est surtout devant la retraite. Anne Hidalgo candidate PS à la mairie de Paris a pris sa retraite à 52 ans, soit 13 ans avant que beaucoup de salariés du privé. Ces mêmes salariés qui avec leurs impots versés vont devoir payer la jeune retraité. La sodomie est double.

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  • idlibertes

    14 février 2014

    Bon, en même temps, ça a trois lettres. Je garde mon potentiel de réflexion assez intact sur ce coup là.

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  • ccomp

    14 février 2014

     » Non seulement on ne leur a rien appris à l’Ena sur les réalités économiques, mais ils n’ont pas eu, après l’Ena, la moindre expérience de l’entreprise ni la moindre envie d’aller voir sur place comment réussissent nos voisins et nos cousins, à de rares exceptions près.  »

    Je vous laisse réfléchir à l’anagramme d’ENA et vous comprendrez alors pourquoi…

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