18 décembre, 2013

Revoir le système fiscal français et en plus… la CSG !? Very easy, my friend !

On y est !

Déjà chacun de donner son point de vue sur sa vision de ce que devrait et surtout ce que ne devrait pas être la rénovation de notre fiscalité, de nos impôts.

Pour les uns, un gigantesque Mikado, pour les autres un champ de mines, la rénovation de notre système fiscal qui s’attaque simultanément à l’impôt sur le revenu et à la perception de la CSG, semble bien  mal partie. Pourquoi ? Parce qu’au-delà des discussions techniques, le projet de réorganisation  envisagé des assiettes n’a pas d’orientations bien claires. Est-ce un projet pour lisser les inégalités les plus criantes ?

Est-ce une remise à plat de notre système social en vue de réduire les charges sociales des entreprises pour améliorer la compétitivité française ? Est-ce une démarche susceptible de participer de façon plus efficace au financement des retraites ? Est-ce tout simplement une de ces astuces vaseuses inventées par les petits génies de Bercy pour prélever encore plus dans la poche des français ? Bien malin sera celui qui saura répondre clairement à cette question.

Les centrales syndicales commentent avec un fond de suspicion le projet gouvernemental. Chacune entend faire entendre des souhaits spécifiques mais tous s’accordent à ce que cette rénovation de notre système fiscal soit l’occasion d’un peu plus d’équité et d’équilibre dans l’effort demandé aux différentes composantes du corps social et économique français. Je ne suis pas très optimiste, les crispations idéologiques des acteurs sociaux restent fortes dans notre société, égoïste et corporatiste. Pourtant le problème n’est pas si compliqué que cela mais à condition d’abandonner cette idée stupide de vouloir marier les choux et les ortolans, les impôts sur les revenus et la CSG ! FO a raison de défendre l’idée que l’impôt sur le revenu doit être plus et mieux utilisé pour réduire le montant des charges indirectes payées par les entreprises et les salariés. La bonne décision, la plus juste par-dessus tout pour améliorer la compétitivité de nos entreprises, serait de déplacer le financement de la redistribution sociale vers la CSG en contrepartie d’une garantie d’amélioration du pouvoir d’achat des salariés avec des d’emplois supplémentaires possible à la clé[1].

Déjà agir sur les paramètres de l’un ou de l’autre ne se fera pas facilement. Imaginez deux gigantesques Mikado côte à côte, posés sur un grand radeau, sur une mer démontée, entourée de mille protagonistes ayant chacun son idée sur la meilleure façon de retirer les multiples pièges posés par les couches successives de lois, textes, niches et exceptions que nos génies des affaires publiques ont inventés depuis plusieurs décennies. Si le diable se cache dans les détails, c’est bien ici que nous le trouverons. Comme à l’ordinaire la France va vivre ses prochaines semaines, les multiples démonstrations de son génie dans le style « pourquoi faire simple si on peut faire compliqué ». Les acteurs en place vont commencer à se dresser les uns contre les autres avec leurs idées à imposer sur la question. Comme à l’ordinaire, nous allons assister aux marchandages les plus spécieux afin que chacun retrouve un peu de sa « contribution ». Cela veut dire qu’au fur et à mesures des semaines, de vaines dialectiques en vaines dialectiques, les protagonistes vont être amenés à trouver des arrangements, des compromis plus ou moins solides au sein desquels les caractéristiques et les contraintes du problème à résoudre auront été atténuées, gommées, oubliées. Comme à l’ordinaire, nous arriverons au final à perdre de vue tout pragmatisme, toute perception concrète du problème à résoudre. C’est ainsi qu’un gouvernement se retrouve avec une révolte social sur le problème de l’Ecotaxe routière. Par bêtise collective. Le CICE (Credit Impôts Compétitivité pour l’Emploi) est un autre exemple parfait de ces usines à gaz sortie d’esprits pervers qui, par péché d’orgueil, n’ont pas suivi l’idée plus simple de la baisse des prélèvements sociaux car c’est une idée des adversaires politiques. Péché de tromperie aussi : ce mécanisme machiavélique sélectionne ceux qui pourront ou ne pourront pas bénéficier du CICE pour différentes raisons allant de l’ignorance au découragement. Un su-sucre patron ?! .. On lève la pa-patte ?

Au lieu de diminuer certaines charges sociales qui devraient être payées par l’impôt, ce qui était le plus simple afin d’améliorer la compétitivité de nos entreprises, l’actuel gouvernement a inventé avec la CICE une machine à gaz qui consiste à rendre d’une main ce qu’elle prend de l’autre. Sauf qu’au passage, elle ponctionne sa dime, et embauche des fonctionnaires pour  surveiller ce chef d’œuvre du génie français. Notre système fiscal est une insulte à l’intelligence, un dispositif injuste, inefficient qui ne fait honneur à personne et certainement pas à nos élus qui ont ce problème sous le nez depuis des décennies. Nous pensions possible de réduire les différents taux de TVA, ils les augmentent. Nous pensions possible d’utiliser l’augmentation de la TVA de référence (19,6%) pour réduire les charges des entreprises, ils l’augmentent, oui, mais pour faire entrer plus d’argent dans les caisses de l’État.  Maintenant, au lieu d’augmenter la CSG afin de financer les retraites, certains envisagent d’en faire un appoint supplémentaire à la perception de l’impôt sur le revenu et sur les entreprises dont le rendement diminue compte tenu de la récession actuelle de la France. Criminel !

Mais dans l’affaire le plus important est que les représentants des corps constitués cessent de vouloir concilier des réformes qui n’en sont pas avec les arrangements de la France du « toujours plus » qui s’installe déjà en position de force vis-à-vis du gouvernement. Aujourd’hui ce sont les centres équestres qui veulent un régime de TVA particulier, demain ce sera qui !? Boulanger ou restaurateur ? Chacun veut sa TVA puis réalise et se plaint de l’extrême complexité de traiter des prestations et des matières produites selon les différents régimes de TVA. Mais où va-t-on avec ces crétineries qui mobilisent du temps et de l’argent. Ou nous mènera ce Yalta social permanent ? Ces reculades ne font qu’aggraver les problèmes sociaux et économiques de la France. Deux régimes de TVA suffisent. Par exemple celui de 7%, réservé aux produits indispensables à la vie familiale, destinés à faciliter la vie courante pour les revenus les plus faibles. L’autre, de 20% ou 22%, affecté aux activités économiques les plus courantes. Quant aux « aides » ou autres stimulations d’activités spécifiques, nous savons qu’il y a d’autres façons de les soutenir. Que l’on arrête ces arrangements d’épicier, de basse politique, qui ne démontre que la faiblesse de nos élus face aux multiples égoïsmes de leurs électeurs.

Comment çà, j’ai mauvais esprit !? Enfin, la bérézina de l’Ecotaxe, les aberrations de la fiscalité des patrimoines, les errements de la politique du logement, les va et vient de la TVA de la restauration, les fausses avancées du financement des retraites, les effets pervers de la fiscalité du capital, ce sont quand même les têtes d’œufs de l’État qui nous les ont imposés. Etonnons-nous après cela que cela ne produise qu’une vaste omelette indigeste. Une seule voie, une seule politique est possible sur le court terme, corriger d’abord ce qu’il y a de stupide, d’indécent, d’injuste, dans le fonctionnement de l’un ou de l’autre des systèmes de prélèvement. Une fois décanté de ses bugs et de ses défauts, les français devraient retrouver un système de prélèvements à la fois plus efficient et plus juste. Un exemple ? Les prélèvements maladie des fonctionnaires et assimilés seront alignés sur ceux du secteur privé afin de rétablir une égalité de traitement entre les travailleurs français. Mais qui a envie d’une société française plus juste ?

La décision la plus efficiente à court terme pour les finances de l’État, serait déjà de se lancer dans un vrai plan d’économies de fonctionnement. J’ai souvent constaté que la masse salariale était la variable d’ajustement (on dégraisse !) alors qu’il parfaitement possible d’agir sur les gigantesque gisements d’économies de fonctionnement d’un Etat comme cela a été déjà fait dans les entreprises pour limiter les licenciements. L’Etat français doit devenir agile et s’alléger d’abord du poison d’une main mise d’un corpus de fonctionnaires élus, de missions, et de frais superflus en ces temps de vaches maigres, ce qui est à la portée de n’importe quel dirigeant, fut-il fonctionnaire. Un exemple ? En dehors des véhicules de transports collectifs et de ceux nécessaires aux activités techniques, l’ensemble des parcs de voitures des collaborateurs des collectivités territoriales, des fonctionnaires et élus seront supprimés. Les fonctionnaires et élus seront soumis au régime commun, utiliseront leurs véhicules personnels et soumettront leurs frais pour remboursement à leur administration. Le taux de remboursement sera celui appliquée à l’ensemble des collaborateurs du secteur privé. Aye ! ça va faire mal aux chouchous de la République. Ben oui, d’une façon ou d’une autre il faudra bien que la France protégée participe à une véritable cure d’amaigrissement de  ses avantages. Mais qui a envie d’une société française plus économe ?

A suivre…

 


[1] Moins de charges, c’est moins de salariés étrangers détachés, plus d’embauches locales.

Auteur: Denis Ettighoffer

Denis Ettighoffer, 68 ans, est une figure connue des spécialistes en technologies de l’information et de la communication et en sciences sociales et économiques. On lui doit les premières réflexions avancées sur L'Entreprise Virtuelle, son premier livre début des années 90. Denis Ettighoffer, ex-directeur de Bossard Consultants, conseil en management & organisation, est intervenu auprès de grandes sociétés, d’administrations centrales et de nombreuses collectivités territoriales. En 1992, il a fondé Eurotechnopolis Institut avec pour ambition d'étudier les impacts de la diffusion des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) sur notre société, l'économie, la compétitivité de nos entreprises et sur nos façons de concevoir le travail.

7 Commentaires

Répondre à Morio

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  • Patrick

    26 décembre 2013

    Dire qu’il faut des cours de fiscalité pour simplement comprendre sa feuille d’impôt, dé que l’on sort du simple salaire…

    La première urgence et ce serait de simplifier radicalement l’impôt sur le revenu.
    disons à la louche, une tranche à 10% et une déduction de 1400€ (+300 par enfant) sur le résultat.

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  • Alain

    25 décembre 2013

    Retraité « aisé », j’ai envisagé de m’installer au Portugal ou en Espagne. J’ai déchanté et je reste fiscalement et socialement en France : impot sur le revenu bien plus élevé qu’en France (malgré un effet d’annonce au Portugal sur un taux d’IR à zéro pendant 10 ans pour les retraités étrangers, sans aucune suite fiscale réelle à ce jour), et système de santé soit en déshérence (public) soit très couteux (privé).
    Le « système » vit à crédit, mais en Espagne et au Portugal également ! et ici il fonctionne mieux et moins cher me semble-t-il. Au Royaume Uni, dont on dit parfois beaucoup de bien (économiquement parlant), l’administration semble déplorable selon une amie qui s’y est frottée lors du décès d’un proche. En France, elle fonctionne.
    N’ayant pas été fonctionnaire, mais salarié du privé puis indépendant, j’avais plutot un parti pris anti-système actuel. Je le suis maintenant un peu moins (un effet de l’age ?).

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  • Morio

    25 décembre 2013

    Rivarol écrivait :  » tout ce qui n ´ est pas clair n ´est pas français  » La multiplicité , l ´ épaisseur des ouvrages législatifs est une insulte a la langue française .

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  • Bruno_B

    23 décembre 2013

    moi ca m’inquiete ! pourquoi augmenter la csg ? on n’en peut plus de financer. ne touchez plus a rien et sabrez les depenses. posez la question du perimetre de l’etat et sabrez ca suffit. la seule question intelligente sur la fiscalite aujourd’hui c’est : comment la reduire ppur relancer la croissance ?

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    • vivelafrance

      24 décembre 2013

      C’est un pays de fou mais beaucoup de gens ne s’en rendent pas compte car connaissent mal l’impôt en France. Ce n’est pas QUE le poids de l’impôt qui est pénalisant dans notre si beau pays c’est inefficacité de ce même impôt. Le gouvernement a tellement augmenté l’impôt qu’il se retrouve pris au piège et on constate depuis un bon moment toutes les aberrations. L’ISF alors qu’il y a le plafonnement à 75%. résultat ce sont les petits patrimoines qui souffrent bien plus que les gros de cet impôt.
      Le CICE alors que les patrons demandaient simplement une baisse des charges dont toutes les entreprises auraient pu bénéficier et pas seulement celles qui créent des emplois mal rémunéré en France et qui gaspillent leur capital…..L’IS trop élevé alors que la plupart des autres pays l’ont baissé, les taxes sur l’immobilier et l’assurance vie qui ne cessent d’augmenter alors l’immobilier risque de bientôt souffrir et l’assurance vie ne rapporte plus grand chose……etc etc etc.
      Inciter les épargnants français à investir dans des PME françaises dont les marges n’ont fait que baisser va être difficile.
      etc……..etc……..etc.

  • Gdv

    19 décembre 2013

    Pour le fiscaliste que j’ai été, cette annonce de réforme fiscale provoque un léger sourire si ce n’est pas une franche hilarité.
    Tous les praticiens connaissent les difficultés pratiques d’interprétation issues d’une simple modification dans la règle fiscale.
    Il suffit d’observer le maquis des instructions administratives qui tâchent d’éclairer les praticiens à chaque modification.
    Sans beaucoup d’imagination, on imagine le foutoir incommensurable qui naîtrait d’une réforme en profondeur des règles fiscales et cela, sans même évoquer la réaction des contribuables devant des règles qui n’auraient pas fait leur lit.
    Pour un contribuable, il n’y rien de plus arbitraire, amoral et contestable qu’une règle fiscale. Elle est le fait du prince et si le système actuel survit, c’est que la force de l’habitude à permis à l’Etat de tirer au maximum sur l’élastique. Gageons qu’il le prendrait dans le nez s’il s’avisait de sortir un nouveau code général des impôts.

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  • banville

    19 décembre 2013

    Rien de c que vous souhaitez n’arrivera. Par contre, j’ai vu, ce jour, deux patients qui se cassent au Portugal…

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