3 juin, 2015

Pourquoi la Chine est en train changer la donne mondiale

Xi Jinping le président chinois, veut que son pays redevienne la première puissance économique mondiale. Pour y arriver il lui faut une monnaie de réserve : le Renminbi. Sa devise représente déjà le tiers du commerce extérieur en Asie devant le Yen japonais, le dollar US et le dollar HK. Singapour, Taiwan et la Corée du Sud règlent maintenant l’essentiel de leurs achats avec la Chine en Renminbi. Ils vont bientôt être rejoints par la Malaisie, la Thaïlande et l’Australie. C’est pratiquement la même stratégie que celle qui a été menée par les Etats Unis avec le Plan Marshall après la deuxième guerre mondiale.

Pour qu’il n’y ait aucun doute sur leurs objectifs, la Chine va dépenser 160Md$ en 2015 pour renforcer encore les équipements militaires de l’armée chinoise. Ce budget très important se compare aux 53Md$ que le Japon va dépenser pour son armée pendant la même période. Il faut enfin développer les infrastructures de communication : cela sera fait entre Kunming en Chine et Bangkok en Thaïlande ; entre Kunming et Daka au Bangladesh et surtout entre la Chine et l’Europe pour reconstruire la route de la soie dans le ferroviaire et dans le maritime.

La Chine représente déjà 15% du PIB mondial, mais pratiquement rien en matière de poids dans les indices boursiers mondiaux. Cela va changer et incite à l’achat de fonds exposés aux obligations chinoises (les « Dim Sum Bonds ») et aux actions chinoises dans les séances de baisse. La semaine dernière une chute de 7,5% s’est produite en raison de la baisse spectaculaire de Hanergy, un fabricant de panneaux solaires qui avait pour le moins une comptabilité sportive…

En Grèce la partie de poker est terminée

Au lieu de se préoccuper de cette évolution, l’Europe s’occupe de la Grèce. Elle doit rembourser en juin 1,6Md€ au FMI. Comme le pays a déjà pillé les liquidités de toutes ses caisses de retraite, le pays attend le déblocage de la dernière tranche de 7,2Md€ du plan de sauvetage européen. Plan conditionné à des réformes d’ampleur que le gouvernement Tsipras se refuse à mettre en place….

En Grande Bretagne, aucune étude ne montre à ce jour qu’une « Brexit » (sortie de la Grande Bretagne de l’Union Européenne) serait une bonne chose pour le pays. Comme l’industrie ne représente que 8% du PIB, c’est l’industrie des services et en particulier la City qui serait le plus touchée. Les exportations vers Europe continentale représentent 15% du PIB. En attendant, les chiffres de l’économie sont bien meilleurs que ceux de la France et Londres croule sous les projets de gratte ciel, 70 tours sont en construction contre une à Paris dont le projet est bloqué !

Même s’il, n’est pas du tout sûr que David Cameron arrive à faire modifier les traités européens, il devrait au moins pousser les fonctionnaires de Bruxelles à devenir un peu plus pragmatiques.

L’Allemagne d’Angela Merkel, de nouveau sacrée « femme la plus puissante du monde » a depuis le début de la crise, pratiquement tout accepté : la solidarité financière, le contrôle des budgets nationaux, l’union bancaire et surtout le QE qui est un développement frénétique de la planche à billets…. Il y a peu de chances que les allemands continuent de travailler jusqu’à 68 ans pour que les grecs puissent partir à la retraite à 52 ans…

L’Espagne est devenue la championne de la croissance européenne. Les mesures prises par le gouvernement ont dopé les exportations. Le chômage recule, mais il reste un des plus élevés d’Europe. A l’issue des élections municipales, il y a eu un véritable déplacement de la société espagnole vers la gauche. On n’est plus du tout dans le bipartisme. A six mois des législatives les électeurs ont lancé un avertissement à la droite. Il faudrait que le gouvernement français comprenne bien que le pays est devenu le premier concurrent de la France. L’Italie de son côté voit ses prix à l’exportation augmenter plus rapidement qu’en France….

La France n’arrive plus à créer de richesse

En France les derniers chiffres du chômage pour le mois d’avril constituent un constat malheureusement sans appel, alors que les conditions macro économiques ont été plutôt favorables pour l’économie française. On est toujours dans une reprise en trompe l’œil.

Il serait temps pour les fonctionnaires incompétents et dogmatiques qui nous dirigent de comprendre que la création d’emplois ne se décrète pas. Quand on se donne la peine d’écouter les chefs d’entreprise, on comprend bien que les PME et les TPE profitent très peu du fameux « alignement des planètes » de François Hollande. Toutes les petites entreprises qui n’exportent pas et trouvent portes fermées dans les banques sont dans une situation précaire qui n’incite pas une seconde à investir et encore moins à embaucher de nouveaux collaborateurs. Bien évidemment, rigoureusement aucune mesure n’a été prise pour rendre les contrats de travail plus flexibles. On peut bien sûr passer son temps à créer des « emplois aidés » financés par de la dette et tourner en dérision les « contrats 0 heure » de la Grande Bretagne qui représentent en moyenne 25 heures de travail par semaine….

Dans le domaine des retraites on constate également que les syndicalistes des régimes publics s’immiscent dans la gestion des caisses du secteur privé. Leur programme est tout à fait clair : gel des pensions, forte hausse des cotisations, report de l’âge de départ à la retraite à 67 ou 69 ans mais uniquement pour le secteur privé ! Il faut saluer dans ce domaine le très courageux combat de « Sauvegarde des retraites » mené par sa Déléguée Générale Marie-Laure Dufrêche.

Tous les entrepreneurs courageux qui sont d’ailleurs en train de préparer leur déclaration ISF le savent bien. Ils vivent le cauchemar de la fiscalité française avec 10% de français qui paient 72% de l’impôt sur le revenu. S’ils veulent éviter d’être ruinés il faudrait que leurs actifs leur rapporte au moins du 7%. Rappelons que leur revenus sont déjà taxés à 64,5% (dernière tranche à 45% plus cotisation Fillon à 4% plus CSG/CRDS à 15,5%)

Pendant ce temps, la Cour des Comptes continue de fustiger, une fois de plus le gouvernement sur la hausse du déficit et de la dette en pointant les tours de passe-passe comptables utilisés par Bercy. En particulier il y a une mésestimation très importante d’une remontée des taux d’intérêts.

Aux Etats Unis le pays s’interroge sur la faiblesse de sa reprise. Jamais une sortie de crise ne s’est traduite par une croissance aussi faible.

En attendant, la consolidation est à l’œuvre dans le semi conducteurs qui est devenu un secteur où il devient impossible de survivre seul :Intel le numéro un mondial rachète Altera pour 17Md$ soit un prix en hausse de 56% sur le dernier cours de bourse. Avago propose 37Md$ pour absorber son concurrent Broadcom. Freescale Semiconductor voudrait aussi racheter NXP Semiconductors pour 17 Md$.

Dans le domaine des télécommunications, Juniper Networks ou Ciena pourraient être rachetés par le suédois Ericsson qui doit essayer de protéger ses parts de marché aux Etats Unis en face du nouvel ensemble Nokia/Alcatel Lucent

Auteur: Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Bordeaux, titulaire d’une licence en droit de l’Université de Paris X. Il a été successivement fondé de pouvoir à la charge Sellier, puis associé chez Nivard Flornoy, Agent de Change. En 1987, il est nommé Executive Director chez Shearson Lehman Brothers à Londres en charge des marchés européens et membre du directoire de Banque Shearson Lehman Brothers à Paris. Après avoir été directeur général associé du Groupe Revenu Français, et membre du directoire de Aerospace Media Publishing à Genève, il a créé en 1996 Concerto et Associés, société de conseil dans les domaines de le bourse et d’internet, puis SelectBourse, broker en ligne, dont il a assuré la présidence jusqu’à l’ absorption du CCF par le Groupe HSBC. Il a été ensuite Head of Strategy de la société de gestion Montpensier Finance.

3 Commentaires

Répondre à ROGER

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

  • FrancisC

    4 juin 2015

    Pour que le renminbi devienne une monnaie de réserve, il faudrait que la Chine cesse d’être un pays communiste, certes un pays communiste ouvert à l’économie de marché …d’état, mais un pays communiste tout de même avec tout ce que cela implique d’arbitraire et d’opacité.

    La difficulté n’est pas de faire un plan Marshall. Tant que les partenaires commerciaux de la Chine sont débiteurs, bien sûr qu’ils sont d’accord pour commercer en renminbi. La difficulté sera de maintenir le renminbi comme monnaie d’échange et de réserve lorsque la Chine sera débitrice!

    Répondre
  • ROGER

    3 juin 2015

    article synthétique et intéressant. Un petit commentaire toutefois; c’est NXP qui va va racheter Freescale et pas l’inverse. Pour une fois que ce sont les Européens qui sont à la manoeuvre …

    Répondre
  • Gerldam

    3 juin 2015

    Effectivement la Chine continue lentement et sagement à étendre l’influence du RMB. Déjà, des cabinets internationnaux installés en Chine expliquent aux entreprises privées européennes qui font du business avec la Chine tout l’intérêt qu’elles auraient à utiliser le RMB au lieu du dollar US.
    Quant à la faiblesse de la reprise aux USA, n’est-elle pas le signe que les tenant de la stagnation séculaire ont au moins partiellement raison (cf. le livre de Patrick Artus, Croissance Zéro)?

    Répondre

Me prévenir lorsqu'un nouvel article est publié

Les livres de Charles Gave enfin réédités!