6 mars, 2013

Les limites de la fiscalité créative

Aux Etats Unis où nous sommes cette semaine, les démocrates et les républicains se rejettent la responsabilité des coupes budgétaires. Barrack Obama Président des Etats Unis a donc signé le décret qui déclenche une coupe automatique de 85 Md$ dans les dépenses de l’état. Cette procédure a été baptisée du nom significatif de « sequestration ». Cela aura en fait un impact sur la croissance difficile à quantifier pour le moment et un impact limité sur le déficit, car l’essentiel des dépenses se produit au niveau de Medicare, Medicaid et de la Sécurité Sociale qui ne sont pas touchés.

Les économistes qui conseillent le Président de la République français aiment bien montrer que leur source d’inspiration peut se trouver aux Etats Unis. C’est notamment le cas de Philippe Aghion qui s’est inspiré  des travaux de Gita Gopinath, professeur à Harvard. Elle a inventé le concept de « dévaluation fiscale » qui produirait selon elle, les mêmes effets qu’une dévaluation monétaire. Il suffirait d’augmenter la TVA et de diminuer le coût du travail pour arriver au même résultat. C’est bien l’idée qui a été retenue par le Crédit d’Impôt pour la compétitivité et l’Emploi (CICE), mesure phare du gouvernement Ayrault, pour essayer de relancer la croissance. Selon les calculs effectués par l’OFCE, l’effet sur la croissance du PIB français serait de zéro !

 

En Italie, les dernières élections sont la forme la plus proche d’un référendum sur l’Europe que l’on ait eue depuis dix ans. La réponse est toujours négative comme lors des précédentes consultations notamment en France. Les invectives de Beppe Grillo remplissent en fait la fonction assumée autrefois par le fou du Roi dans toutes les cours européennes. Il disait à voix haute ce que taisaient par lâcheté les courtisans qui entouraient le prince. Les électeurs italiens ne croient pas que l’austérité sauvera leur pays. Il n’en demeure pas moins que l’état de déliquescence de la société italienne, après quinze ans de berlusconisme nécessite des mesures courageuses. L’économie ne peut prospérer coincée entre l’économie illégale, la mafia et le crime organisé… Heureusement tout cela n’a pas empêché l’Italie de placer pour plus de 6Md€ d’obligations à 4,83% !

 

Le Portugal tout comme l’Irlande pourraient se voir accorder un allongement de leurs échéances par L’Eurogroupe.

 

En France on est à l’heure de l’épreuve de vérité. Le nombre de demandeurs d’emplois est proche du record de janvier 1997 (3,1M). Il ne s’agit plus d’essayer de gagner du temps en attendant une reprise de l’économie européenne qui n’aura pas lieu.

 

Parmi les mauvais signes de la semaine, nous avons le vote par l’Assemblée de la loi d’amnistie des syndicalistes qui vise les délits passibles de moins de cinq ans commis lors de mouvements sociaux . Il s’agit tout simplement d’amnistier des délits qui ont aboutit à des destructions dans des usines et mis en danger des personnes. Le droit de casser et de séquestrer ont donc été sanctifiés par la République !

 

La remise en liberté « par erreur » de dix dealers de drogue présumés par un Juge d’Instruction dans une affaire à Créteil ne pourra que satisfaire tous les policiers qui s’étaient donnés beaucoup de mal pour les arrêter !

 

 

Le Rapport Colin et Collin sur la fiscalité du numérique s’inscrit bien dans le cadre d’une

élite qui ne comprend décidément toujours pas grand chose à la troisième révolution industrielle. Pour Nicolas Colin, Inspecteur des Finances, il est inacceptable que les entreprises du numérique puissent se débrouiller toute seule. Il faut donc les  taxer. Seule une politique menée par l’état pourra, selon lui développer le numérique. Au lieu de se placer sur le plan idéologique, il aurait été plus utile de se battre sur le terrain de la réalité. En effet, il fallait se battre sur le terrain de la fiscalité.

Google exfiltre en Irlande la quasi totalité de son chiffre d’affaires et de ses bénéfices réalisés dans l’hexagone. Microsoft utilise les mêmes astuces fiscales que Google en facturant en Irlande des prestations réalisées en France. Apple a pris l’habitude de faire transiter son chiffre d’affaires entre les Iles Vierges Britanniques et l’Irlande. Le système est si efficace que qu’Apple a payé moins de 2% d’impôts sur les bénéfices réalisés à l’extérieur des Etats Unis. Aux Etats Unis la société a été imposée à 25% et y a réglé 1,2Md$ au fisc américain !

 

 

Aux Etats Unis, on voit bien que le pays est en train de reconstruire sa base industrielle grâce aux capitaux très importants investis dans l’innovation et à un prix de l’énergie compétitif. Le redressement de GM devrait être étudié de près par Arnaud Montebourg Ministre du Redressement Productif. General Motors s’apprête à verser à chacun de ses salariés un bonus de 6 600 $ au titre de l’année 2012. C’est impressionnant pour une société qui avait déposé son bilan en 2009 après 80Md$ de pertes. Le redressement a été mené avec toutes les parties prenantes en fermant quatorze usines sous productives et en supprimant un emploi sur trois. Tout cela a pu être mené avec une injection d’argent public mais sans freins politiques ni retard judiciaires.

En France,  le troisième plan social de Fralib filiale d’Unilever a été annulé par la Cour d’Appel d’Aix en Provence qui à demandé à Unilever de « reprendre au début ladite procédure et de présenter au Comité d’Entreprise un plan de sauvegarde de l’emploi concernant l’ensemble des salariés du site de Géménos ». On voit bien la « destruction créatrice » de Schumpeter fonctionner plutôt bien aux Etats Unis et pas du tout en France.

 

Au Japon, c’est bien Haruhiko Kuroda qui a été nommé à la tête de la Banque du Japon. Il aura la responsabilité de mettre en œuvre Abenomics …

 

En Chine la reprise marque le pas. L’expansion de la production manufacturière est au plus bas depuis 5 mois.

 

Le Brésil essaye aussi de relancer sa croissance. Depuis le début de 2012 les valeurs brésiliennes ont perdu 2,4% alors que la bourse de Mexico a progressé de 16%

 

Le Liban a organisé cette semaine une campagne de communication auprès des investisseurs américains à New York. Malgré un environnement très difficile du à la situation en Syrie, l’économie résiste plutôt bien puisque la croissance serait de 2,5% en 2013. Certes le déficit budgétaire restera proche de 6% avec un niveau d’endettement représentant plus de 130% du PIB. David Grayson, président d’ Auerbach Grayson broker qui représente à New York 13O broker de pays émergents avait invité les trois plus grandes banques libanaises : Freddie Baz, General Manager de Banque Audi, Saad Azhari Chairman de Blom Bank et Sami Haddad General Manager de Byblos Bank. Elles ont toutes réduit considérablement leurs engagements en Syrie après avoir passé des provisions. Elles se redéploient à l’étranger, en Turquie pour Banque Audi, en Afrique pour Byblos Bank.

 

Matières premières : gros coup de mou sur les métaux

 

Le cuivre est au plus bas depuis le début de l’année. Venant de 8300$/T il a cassé les 7900$/T car on s’attend à ce que la demande baisse au cours des prochains mois alors que de nouvelles capacités vont entrer en production an Chili et en Mongolie.  Sur l’aluminium les stocks sont très importants tout comme sur le plomb et le zinc. Le pétrole cède aussi du terrain avec le Brent qui a cassé le seuil de 114$le barril.  Le blé est au plus bas depuis huit mois. La neige qui est tombée sur les Grandes Plaines américaines est un signe favorable qui après la sécheresse de l’année dernière permettra de bien meilleures récoltes.

L’or intéresse de nouveau de grands investisseurs, le plus impliqué étant John Paulson de Paulson & Co qui détient la plus grosse position sur le tracker SPDR Gold Trust avec 22 millions de titres !

 

Secteurs : échec du solaire en France

 

L’industrie solaire a sévèrement ralenti en France. Les raccordements de nouvelles installations ont chuté d’un tiers à 800 mégawatts contre 5 gigawatts en Allemagne. Le photovoltaïque produit en France 0,5% de l’électricité. La France échoué en prenant des mesures fiscales incitatives favorisant en priorité les fabricants chinois, puis en s’engageant à racheter la production électrique à des prix élevés. Comme ils étaient intenables ils ont baissé en un an de 16% pour le résidentiel, de 22% pour les moyennes toitures et de 26% pour les centrales au sol. Sur deux ans la perte est comprise entre 45% et 70%….

Les sociétés occidentales comme Wacker Chemie (Allemagne), Solarworld (Allemagne) Q-Cells (Allemagne), REC(Norvège), First Solar (US) qui a baissé de 18% lors de l’annonce de ses résultats cette semaine. Sunpower (US) ont été fortement concurrencées par les sociétés chinoise  notamment Suntech Power Holdings (n°1 mondial des panneaux),  LDK Solar (n°2),Yingli Green Energy, Trina Solar. La Chine dont les coûts de fabrication sont inférieurs maintenant  de 60% à ceux de l’Occident est en situation de surcapacité et d’endettement…C’est probablement un peu tôt mais il faudra savoir se réintéresser au secteur. A suivre

 

 

 

 

Auteur: Romain Metivet

Romain Metivet est économiste et dirigeant d'une entreprise dans les nanotechnologies.

1 Commentaire

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  • jcgruffat

    6 mars 2013

    Les coupes budgetaires sont clairement la responsabilite du President qui avait imagine ce subterfuge pour contraindre le Congres a trouver un compromis plus a son gout apres qu ‘il ait refuse en 2011 d’endosser le plan bipartisan long terme de reductions des deficits parce qu’il touchait aux depenses sociales et de sante, Social Security, Medicare et Medicaid.
    Les republicains ont concede en debut d’annee des hausses de fiscalite directe non negligeables, qui pour les revenus bruts superieurs a $400,000/an conduisent a un prelevement superieur a 54%, federal, local et securite sociale plus Medicare /Advance care..
    Pas exactement un paradis fiscal.
    Pourtant le President veut desormais l’elimination des niches fiscales que les Republicains y compris Romney avait suggeree comme alternative aux hausses d’impots directs.
    Les republicains a juste titre selon moi refusent et preferent accepter une reduction generale et moderee des depenses y compris sur les budgets de defense, le secteur social et de sante demeurant protege ce qui fait porter les coupes sur les depenses discretionnaires .
    Selon les chiffres du Tresor, du Congres repris par Wells Fargo, les depenses federales par categories sont: Medicare 19%, sante 17%, SS 22%, Defense 13%, charge de la dette 16% ce qui laisse peu de marge de manoeuvre pour reduire les charges..
    Le President ne veut pas serieusement reduire les depenses federales qui beneficient largement a son electorat, et les republicains traditionnellement protegent la securite exterieure et les personnes agees.
    Le deficit ne saurait etre reduit sans toucher a ce que l’on qualifie ici d' »entitlements », cela vous remet des choses en memoire?
    L’impact sur 2013 et 2014 devrait etre modere et en aucun cas conduire a une nouvelle recession.
    L’objectif de Barack Obama est strictement politique, nuire aux republicains et tenter ainsi de reprendre le controle de la Chambre des Representants en 2014.
    Pour finir son mandat avec tous les leviers de controle qu’il avait de 2008 a 2010.

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