15 novembre, 2012

Légalisation du cannabis et salle de shoot, les drogues en question

Deux questions presque conjointes pour l’actuel gouvernement: la légalisation de drogues dites « douces » et l’ouverture des alles de shoot, comme envisagé récemment par Marisol Touraine.

Pour Michel Huguier, chirurgien, membre de l’Académie nationale de médecine, ancien conseiller technique au cabinet de Simone Veil, alors ministre de la Santé, la dépénalisation du cannabis serait « une incohérence dans un objectif général qui est la santé publique. »

Dans cet entretien, l’académicien soulève la contradiction qu’il y aurait à dépénaliser le cannabis d’un côté, alors que l’on cherche à lutter contre le tabagisme d’un autre. « Prendre des mesures, qui au gré de l’opinion publique, vont à l’encontre d’un esprit de prévention individuelle » lui semble être incohérent.

Une incohérence que souligne également Jean- Paul Tillement, professeur émérite de pharmacologie à la faculté de médecine de Créteil (Paris XII), membre de l’Académie de pharmacie et membre de l’Académie nationale de médecine. Pour lui , cette étape de la dépénalisation du cannabis pourrait accélérer le passage à la consommation d’autres drogues : « Quand on interroge les toxicomanes, les drogués par injection, sur la raison qui les a amenés à l’injection, ils sont tous passés par une première étape qui inclut l’alcool, le cannabis et le tabac. Aujourd’hui l’alcool, le tabac sont malheureusement en ventre quasi-libre, si en plus on y ajoute le cannabis, cela ne fera qu’ouvrir la porte aux salles de shoot. »

 

Les salles de shoot, voilà justement un autre sujet de préoccupation pour les deux académiciens. 
Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, a exprimé sa volonté d’ouvrir des salles d’injections pour toxicomanes, à titre expérimental, dans des villes comme Paris, Marseille et Toulouse. Une initiative que combat ardemment Jean-Paul Tillement, pour au moins deux raisons :

« Quel médecin peut aujourd’hui accepter la responsabilité d’une injection en intraveineuse d’une solution non-stérilisée ? […]Injecter une solution non-identifiée et non stérilisée me paraît être une aberration ; j’ai appris à mes étudiants, pendant 40 ans, absolument l’inverse.  »

De plus, il craint des dérives sur la composition de la substance de départ amenée par les toxicomanes, dans laquelle on peut trouver des substances toxiques. Sa vision à long terme des salles de shoot s’avère, alors, alarmante : « ce que je crains c’est que connaissant l’industrie extrêmement florissante des drogues de synthèse, demain ces salles de shoot deviennent des bancs d’essai des nouvelles drogues qui seront payées par la  société pour le grand bénéfice des fabriquants.

 Michel Huguier, quant à lui, balaie l’argument de l’existence de salles de shoot dans d’autres pays européens depuis de nombreuses années : « Les salles de shoot sont fermées progressivement en Suisse, au Danemark. Les Hollandais reviennent sur l’ouverture des bars à cannabis ; donc faire appel aux exemples européens est un mauvais argument , il faudrait faire appel à ces exemples jusqu’au bout pour constater que tous reviennent en arrière, après des expériences dont il faudrait tirer profit. »


A ce titre, Jean-Paul Tillement rappelle qu’il existe déjà actuellement, de nombreuses structures, dont beaucoup de bénévoles, mobiles ou fixes, très actives qui réalisent l’accueil, le traitement et la prise en charge des toxicomanes injecteurs ou non injecteurs. Il regrette qu’ils soient « étrangement oubliés dans le débat. ».

 Soulevant d’une même voix « les conséquences neurologiques et comportementales qui mettent en jeu la sécurité d’autrui », les deux intervenants appellent à ouvrir le débat pour proposer d’autres solutions face aux problèmes de la drogue en France, un pays qui possède un triste record : celui du plus grand nombre de jeunes consommateurs de cannabis en Europe (Enquête publiée en juin 2012 par l’Observatoire européen des drogues et de la Toxicomanie (OEDT).

 De plus, juridiquement, nous aimerions tous savoir qui sera tenu pour responsable en cas (très probable) d’overdose d’un des utilisateurs de la salle de shoot en question. L’Etat sera t-il responsable  si les moyens mis en œuvres dans l’assistance ne sont pas à hauteur ?La famille de a victime aura- t-elle une action pour non assistance en personne en danger par exemple ?

Se pose  aussi la question de la responsabilité des médecins. Superviser l’injection de « drogues de la rue », des produits loin d’avoir une qualité médicamenteuse, posera forcement des difficultés. L’héroïne vendue couramment dans la rue n’est composée que de 30 à 40 % d’héroïne pure que l’on trouve noyée dans tout un tas de substances de dilution» ; alors quel médecin accepterait de superviser l’administration d’un produit qu’il sait foncièrement impur ? Et par la suite, cette question en appellera une autre : lorsque le corps médical se rendra compte qu’il est impossible de superviser ces administrations de drogues impures, que feront-ils ?

Le Pr Costentin  (membre de l’Académie nationale de médecine et de l’Académie de Pharmacie et président du Centre national de prévention, d’études et de recherches en toxicomanie (CNPERT)),craint qu’en contrepartie des produits de la rue, les salles de shoot finissent par fournir elles-mêmes la drogue de bonne qualité. «De plus, il a été prouvé que chez les sujets qui bénéficiaient de ces salles que le dosage d’héroïne dans leur sang ne les avait pas dissuadés de compléter leur dose par de l’héroïne de la rue»

 

On imagine aisement les problémes humains et juridiques que soulevent en pratique une telle mise en application.  On se souvient, en terme d’étude de notre société civile, qu’il y a quelques mois, l’association CLER Amour et Famille, une association catholique, a réclamé – et obtenu – devant le tribunal correctionnel de Paris la fermeture d’un sex shop  installé à 100 mètres de l’école et du collège Saint-Merri. 2 Un emplacement jugé contraire à une loi de 2007 sur la protection de l’enfance, interdisant « l’installation, à moins de 200 mètres d’un établissement d’enseignement, d’un établissement dont l’activité est la vente ou la mise à disposition du public d’objets à caractère pornographique ». Le gérant du sex-shop a fait appel de la décision devant le Conseil Constitutionnel mais force est de constater l’extrêmement schizophrénie de notre société.

Car enfin, on voudrait faire croire qu’il serait plus tolérable pour une enfant de 10 ans de passer devant une salle ou des gens s’injecte la mort plutôt que devant un vibromasseur à tête de canard? Sauf à vouloir faire de la mort et de l’euthanasie le but suprême dans la recherche du bonheur terrestre, quelque chose doit nous échapper,

Rabelaisiens que nous sommes.

 

 

Source multiples dont Canal Academie

(dont nous saluons le travail admirable)

 

IdL

 

 

 

Auteur: idlibertes

Profession de foi de IdL: *Je suis libéral, c'est à dire partisan de la liberté individuelle comme valeur fondamentale. *Je ne crois pas que libéralisme soit une une théorie économique mais plutôt une théorie de comment appliquer le Droit au capitalisme pour que ce dernier fonctionne à la satisfaction générale. *Le libéralisme est une théorie philosophique appliquée au Droit, et pas à l'Economie qui vient très loin derrière dans les préoccupations de Constant, Tocqueville , Bastiat, Raymond Aron, Jean-François Revel et bien d'autres; *Le but suprême pour les libéraux que nous incarnons étant que le Droit empêche les gros de faire du mal aux petits,les petits de massacrer les gros mais surtout, l'Etat d'enquiquiner tout le monde.

11 Commentaires

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  • Ben Oït

    20 novembre 2012

    Cet article n’est pas d’une grande qualité : nul ne doute du fait que se droguer soit mauvais pour la santé.
    Le fond du problème est : la prohibition de l’usage et de la vente de drogues (douces, ou moins douces) n’emporte-t-elle pas plus d’inconvénients que la légalisation?

    Ensuite l’usage de grands Curriculum pour asséner des arguments d’autorité, n’est pas à l’honneur de ce site.

    Exemple 1 : « la dépénalisation du cannabis pourrait accélérer le passage à la consommation d’autres drogues : […] les drogués par injection, sur la raison qui les a amenés à l’injection, ils sont tous passés par une première étape qui inclut l’alcool, le cannabis et le tabac. »
    Et bien je suis désolé, mais ça ne vaut pas grand chose : admettons que l’on se rende compte que la grande majorité des drogués par injection soient tatoués (ou nettement plus fréquemment que la population des non drogués) le tatouage augmente-t-il la probabilité de passage aux drogues dures? faut-il l’interdire?
    Mais il est facile de vérifier. Vu que la consommation de cannabis est légale aux pays bas, si il y a un effet d’incitation, la population de drogués par injection devrait y être nettement supérieure à la population de drogués Française… est-ce le cas?
    Admettons pourtant qu’un lien soit prouvé, quelle en est la raison? vient-elle de la molécule : la consommation de THC (dans le cannabis) donne irrémédiablement envie de passer à l’héroïne? Ou cela vient-il du fait que pour se procurer du cannabis, il faut passer par un milieux clandestin, où la probabilité de rencontrer des usagers de drogues dures est plus grande?
    Sur la population de personne ayant déjà consommé de l’alcool (drogue légale, accessible dans un super marché) dans leur vie (population : 99% des plus de 18 ans), quelle est la proportion à être passé aux drogues par injection

    Exemple 2 : « […]Les Hollandais reviennent sur l’ouverture des bars à cannabis ; donc faire appel aux exemples européens est un mauvais argument , il faudrait faire appel à ces exemples jusqu’au bout pour constater que tous reviennent en arrière, après des expériences dont il faudrait tirer profit. »
    Encore une fois, c’est très partial les Hollandais ne reviennent pas du tout sur l’ouverture des bars à cannabis, il essayent surtout de se protéger des externalités négatives que ne manque pas de créer chez eux, l’interdiction de l’usage et la vente des drogues douces des pays limitrophes.
    Mais je suis pour les comparaisons, c’est très utile en effet. Les Hollandais meurent-ils plus jeunes vu haut combien ils sont dépravés? Pas du tout, 81 ans d’espérance de vie…

    Enfin, la question de la responsabilité des médecins et de l’état dans les salles de shoot serait intéressante, si elle restait ce qu’elle est : une question subsidiaire à celle de la libéralisation (ou non) de l’usage et de la vente des drogues.

    Pour conclure, rien de tel que de citer le grand Milton : « Une des plus grandes erreurs consiste à juger les politiques et les programmes à l’aune de leurs intentions plutôt qu’en fonction de leurs résultats. »

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    • idlibertes

      21 novembre 2012

      Cher Ben Oït,

      Nul argument d’autorité içi. Les professeurs en question le sont, c’est tout. Devraient-ils s’excuser pour autant d’être fondés en plus à penser? Si les études ne font pas l’intelligence, ne présagez au moins pas du contraire, ce serait aimable à vous.

      Cordialement,

      Idl

    • Ben Oït

      22 novembre 2012

      Mmh votre réponse est pour le moins étrange : vous me faites dire ce que je n’ai pas dis.
      Je n’ai rien contre les savants bien au contraire, j’ai moi même fait de longues études.
      Je dis juste que ce n’est pas parce que les gens que vous citez, ont de jolies titres que leur argumentation est forcement excellente.

      En l’espèce je trouvent qu’ils assènent des vérités tout à fait discutable, (et j’explique pourquoi j’éprouve ce sentiment),
      et d’autre part, je regrette que le fond du sujet à savoir la libéralisation (ou non) des drogues n’est pas été traité dans l’article.

      Ce à quoi vous ne prenez même pas la peine de répondre, préférant plutôt trahir mes propos à la place. Certes c’est votre droit, mais ce sont de bien étranges manières.

  • larry Golade

    19 novembre 2012

    Le socialisme se caractérise entre autre par l idée que certains, (les experts, l ‘état, les planificateur centraux) savent mieux que les individus ce qui est bon pour les citoyens, le pays, la nation et donc prennent des décisions qui limitent les libertés desdits individus pour assurer leur bonheur.
    C est exactement ce même esprit qui prévaut dans le débat sur les drogues (dures ou douces).
    Il est mauvais pour les gens de se droguer (nul ici ne le nie). Mais est ce une raison de les priver de la liberté de le faire ?
    Les graisses saturées sont également mauvaises pour la santé (c est une différence de degré et non de nature), de même que le pain blanc (on prèferera le pain complet), sans parler du Nuit Saint Georges que j ai bu ce week end et qui plutot qu etre taxe, devrait etre completement interdit.
    les individus peuvent faire un usage de leur liberté que je considère mauvais. Mais le fait que je considère ces usages mauvais ne justifie pas que j ai le droit de les interdire (dans le cas d adultes consentants pour lesquels l information sur la réalite des produits est diponible)
    Je passe sur l argument (classique exemple d’argument fallacieux) du Pr Tillement sur la spirale infernale qui mene vers les injections (tTous les drogués on d abord été nourris au lait maternel et ont mange du pain alors qu il peut exister des héroinomanes qui n ont jamais fumé de cannabis).
    Enfin , la prohibition est inefficace (drogue comme alcool) et induit des externalités extrement négatives (violence et dangerosité des produits).
    Que l etat s occupe d etre juste, nous nous occupons d etre heureux.
    Merci de ne pas vouloir obliger les gens à etre heureux ou en bonne santé !
    Le critère de la liberté (ici comme dans le cas de l euthanasie dont nous avons déja débattu ici) doit être au coeur de notre réflexion.
    Encore merci pour ces espaces de débats.
    Amicalement
    Larry Golade

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  • Pierre Chappaz

    18 novembre 2012

    En Suisse les salles de shoot existent depuis des années, et le canabis vient d’être dépénalisé. Et vous savez quoi ? tout va bien !

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    • rezg

      19 novembre 2012

      Ben oui, mais on ne va pas commencer à comparer la Suisse et la France, parce qu’on n’a pas encore fini. J’y habite depuis 4 ans depuis que j’ai fini mes études, et clairement je n’ai aucune envie de revenir en France.
      Où va-t-on? Non mais, on fait tout pour la santé dans notre pays. On prend des mesures contre l’alcool, contre le tabac… et on veut dépénaliser le cannabis. Mais bien sûr! Merci Marisol Touraine! Avez-vous une autre bonne idée de la sorte?

  • Pascale

    18 novembre 2012

    Les gens sont libres, propriétaires de leur corps et responsables de celui-ci. Consommer des drogues, quelles qu’elles soient, est un crime (aux yeux du législateur) sans victime puisqu’il ne nuit qu’au consommateur.
    De plus quand on voit le coût humain absolument faramineux (50.000 morts en 4 ans liés à la lutte contre les trafiquants au Mexique) on ne peut qu’être choqué du prix payé en vies par certains pays pour « protéger » d’autres pays.

    Répondre
    • Alex

      19 novembre 2012

      vous parlez du Mexique qui est en partie au mains des cartels. Vous parlez des FARC qui ne sont rien d autres que des narco trafiquants. Vous parlez de tous ces petits caides de banlieux qui vivent en vendant leur …. Je n arrive pas a comprendre comment on peut encore continuer a supporter ces lois. C est ridicule.

  • MAIN

    17 novembre 2012

    La prohibition du cannabis en France a quelle conséquences objective: permettre le financement de la délinquance sans empécher qui veut de s’ approvisionner.
    Tout le monde y a avantage, les délinquants dont le marché n’ existe que grâce à l’ interdiction, les fonctionnaires de police, les juges les gardiens de prison qui justifient à bon compte leur nombre sans cesse croissant; tout va bien pour le système!Pour faire la fortune d’ une mafia, rien de tel qu’ une prohibition
    Les seuls pays ayant brisé le marché de la drogue, telle la Malaisie, ont _ soit appliqué la peine de mort ou la perpétuité même pour les « touristes australiens qui se croyaient au dessus des lois indigènes
    _soit effondré la rentabilité financière du trafic en agissant sur les prix et concentré l’ effort sur le noyau des drogues dures.La réussite hollandaise est éloquente: combien d’ héroïnomanes par habitant dans chaque pays.

    Poursuivre une stratégie dont le seul résultat tangible est de maintenir entre l’ offre et la demande , la tension idéale pour la rentabilité maximale du produit prix/quantité, est absurde sauf si on désire poursuivre le financement des zones de non droit, du terrorisme et de la grande délinquance.
    Encore une fois , au nom des grands principes et des grands sentiments,on poursuit des stratégies sans souci de réalisme.
    Seul celui qui se donne les moyens efficaces, veut la fin, les autres sont à la fois dans le voeu pieu et le déni du Réel, continuons à bruler des cierges.

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  • Alex

    16 novembre 2012

    1) le portugale a tout depenalise et ca ne s est pas trop mal passe je pense.
    2) les pays bas ne reviennent pas sur l ouverture des coffee shop. Ce qu ils remettent en question c est d autorise la vente aux non residents. Cela est du au fait que les pays voisins ne vendant pas de canabis ils se choppent tous les consommateurs qui viennent pour s envoyer en l air pendant un week end et repartir apres et que ca les enerves.
    3) http://www.youtube.com/watch?v=nLsCC0LZxkY

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  • yvesdemars

    15 novembre 2012

    on marche sur la tête on veut légaliser des drogues clairement dangereuses et interdire des produits alimentaires (huile palme) pas vraiment nocifs sauf à très fortes doses. Ca s’appelle un gouvernement ça ,??? non une bande d’incapables sensibles aux lobbies écologiquement corrects …

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