31 mai, 2013

Le rôle des banquiers centraux : petit rappel historique

Comme chacun le sait, à la fin des années 70, l’inflation faisait rage dans le monde entier.

A l’origine de ces baisses de la valeur de la monnaie, une réalité toute simple qui était la suivante :dans un certain nombre de pays, tels que la France bien sur, mais aussi la Grande Bretagne, les Etats-Unis, l’Italie, les élus pouvaient donner des ordres à la banque centrale pour que celle ci finance les déficits budgétaires, faisant de ce fait marcher la fameuse « planche à billets » …Résultat, bien sur une faute hausse des dépenses étatiques bien souvent non productives financées par de l’argent crée ex nihilo, ce qui correspondait parfaitement à la définition de l’inflation donnée par Rueff «l’inflation c’est de subventionner des dépenses qui ne rapportent rien avec de l’argent qui n’existe pas ».
Un certain nombre de pays cependant résistaient tant bien que mal à cette pression de légèreté visionnaire, en tète desquels on trouvait l’Allemagne et la Suisse. Or ces deux pays avaient une caractéristique commune : leur banque centrale était constitutionnellement indépendante des pouvoirs politiques. La liaison-indépendance de la banque centrale=absence d’inflation – fut donc considérée comme une évidence et la solution retenue fut de rendre les banques centrales indépendantes des pouvoirs politiques un peu partout, ce qui rassura les investisseurs. Taux d’intérêts et taux d’inflation commencèrent à s’écrouler au début des années 80, ce qui déclencha le grand marché haussier sur tous les actifs financiers, qui dura de 1982 à 2000.
A partir de 2000, les choses commencèrent à se gâter, et pour être parfaitement honnête, j’ai mis du temps à comprendre ce qui se passait, ce dont je ne suis pas particulièrement fier.
Donner le pouvoir REGALIEN de battre monnaie à une personnalité NON ELUE sans que ce pouvoir soit bien délimité par des textes extraordinairement précis, c’était prendre le risque que cette personne ne se prenne pour …le Souverain et n’essaie de mettre en œuvre ses propres idées politiques et économiques pour lesquelles personne n’a voté, sans qu’aucun contrôle ne puisse être effectué.
En termes simples, cela nous faisait passer inévitablement de la Démocratie à la Technocratie, en infantilisant le pouvoir politique élu.
Prenons l’exemple des USA.Quand Volcker (l’exemple même de ce qu’un haut fonctionnaire devrait être) prend le pouvoir à la Fed, il a une seule entrée dans son cahier des charges : casser les reins à l’inflation, et il y est arrivé brillamment. Il est remplacé par Greenspan en 1987 et lors de ces deux premiers mandats, ce dernier fait un très bon travail. Au cours de son troisième mandat, le 11 Septembre 2001 les Etats-Unis sont attaqués et Greenspan pense que les USA entrent en guerre. Or c’est une tradition bien établie aux USA que quand le pays est en guerre, les taux réels doivent devenir négatifs (inflation supérieurs aux taux d’intérêts) pour que les épargnants et les consommateurs (baisse du dollar) financent la guerre, qui n’est pour ainsi dire jamais financée par des hausses des impôts. Ce qui fut fait.

Conséquence inattendue de ce patriotisme de Greenspan, une bulle immobilière sans précédent qui met en danger l’ensemble du système financier d’abord Américain, puis mondial. Bernanke prend la suite et c’est certainement le banquier central le plus aventureux que l’histoire ait connu. Non seulement, il maintient les taux réels négatifs, mais il se lance dans une série d’expérimentations sans précédents, tant et si bien que nous n’avons plus de prix de marché ni pour les taux courts, ni pour les taux longs, ni même pour le taux de change du Dollar US. Comme il s’agit la des PRIX les plus importants dans le système des prix mondiaux, cela veut dire que tout les systèmes des prix sont irréels et déterminés in fine par un banquier central omniscient.
Bienvenue en Union Soviétique.
En Europe, le but de nos technocrates non élus (si bien représenté par Monsieur Trichet) est de consolider leur tout nouveau pouvoir Régalien et de le mettre a l’abri de l’électeur National en le passant a l’échelle Européenne, l’idée étant de créer une monnaie indépendante de ces pouvoirs élus et que seuls nos fonctionnaires non élus pourraient administrer et gérer, a l’abri des pressions des électorats. Chacun peut voir aujourd’hui que ce tout nouveau pouvoir à des tendances dictatoriales et entend bien soumettre les élus des Nations indépendantes à ses Lois d’Airain, avec tous les dégâts collatéraux que chacun peut voir. Tous les gardes fous qui avaient mis par les Allemands pour éviter cette dérive sont bien sur en train de sauter les uns après les autres et nous nous retrouvons la aussi avec une dictature technocratique.
Les années qui viennent vont donc être marquées par une lutte sans merci entre les banquiers centraux devenus fous de pouvoir, et les peuples. Il est de bon ton de condamner les élus et d’encenser les technocrates. Je me permets de ne pas être d’accord. Je peux me débarrasser par l’élection des élus qui m’indisposent alors que nul n’a pu nous débarrasser de Monsieur Trichet, responsable d’au moins 1 million de chômeurs en France depuis sa prise de contrôle d’abord de la politique monétaire en France, puis ayant échoué dans son pays, promu a la tête de la BCE…
Cette lutte va être longue et difficile, mais l’issue en est certaine. Comme toujours la Démocratie triomphera. Ce qui veut dire qu’en termes de placements, il faut éviter tous les secteurs qui risquent d’être touchés par ces batailles et je les mentionne pour mémoire à nouveau, comme je le fais depuis bientôt trois ans : les marchés obligataires de l’EuroLand, les financières, les valeurs domestiques et les valeurs de consommations surtout en EuroLand. Parallèlement il faut concentrer ses avoirs dans des pays ou la banque centrale, tout en étant autonome ou indépendante, gère au profit des intérêts du pays et non pas en fonction des foucades de quelque fonctionnaire se prenant pour Napoléon ou Charlemagne et ayant un projet politique de création d’Un Etat Européen dont personne ne veut.

 

 

Charles Gave

 

Auteur: idlibertes

Profession de foi de IdL: *Je suis libéral, c'est à dire partisan de la liberté individuelle comme valeur fondamentale. *Je ne crois pas que libéralisme soit une une théorie économique mais plutôt une théorie de comment appliquer le Droit au capitalisme pour que ce dernier fonctionne à la satisfaction générale. *Le libéralisme est une théorie philosophique appliquée au Droit, et pas à l'Economie qui vient très loin derrière dans les préoccupations de Constant, Tocqueville , Bastiat, Raymond Aron, Jean-François Revel et bien d'autres; *Le but suprême pour les libéraux que nous incarnons étant que le Droit empêche les gros de faire du mal aux petits,les petits de massacrer les gros mais surtout, l'Etat d'enquiquiner tout le monde.

13 Commentaires

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  • Amellal Ibrahim

    26 juillet 2013

    La FED, selon les vidéos conspirationnistes, a été un crée par des banques privées, mais en tout cas, je sais que le président peut mettre à la porte le banquier central, c’est ce que comptait faire Mitt Romney.

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  • Jean.Vandenbrande

    25 juillet 2013

    Je donne entièrement raison à Charles Gave, comme souvent d’ailleurs..

    Je pose simplement les questions brûlantes : qui a créé la FED? Qui a voté pour la FED ? Qui a voté pour Bernanke et son Quantitative Easing ?
    Et, plus simplement encore. En supposant qu’on ait voté pour ce QE, la question est : qu’en savaient les électeurs ? .Qui sait où ce QE va mener l’Amérique et le Monde ?
    Comme le dit si bien Ch. Gave, les taux et les prix ne reflètent plus la réalité. La boussole est donc hors d’usage.

    En Amérique plus qu’ailleurs, c’est le combat du court terme contre le long terme. L’argument unique en faveur du court terme a été donné par Keynes : Dans le long terme nous seront tous morts. Sauf nos descendants.
    Or, à lire ce qu’écrit parfois Charles Gave, il considère assez facilement que les USA sont sur la bonne voie. A mon avis, c’est trop vite dit.

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  • Pasquale Reese

    13 juin 2013

    Spécialiste des phénomènes monétaires, l’économiste américain Milton Friedman part d’une idée simple : toute augmentation de la masse monétaire au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer les transactions entraîne celle du niveau général des prix. ” La cause immédiate de l’inflation est toujours et partout la même : un accroissement anormalement rapide de la quantité de monnaie par rapport au volume de production ” [1]. Autrement dit, la hausse du niveau général des prix traduit toujours, selon lui, la présence d’une quantité excessive de monnaie, qui diminue son pouvoir d’achat.

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  • Marius

    2 juin 2013

    Que penser des chiffres officiels qui affirment que ça repart aux USA ?

    – Jean-Pierre Petit résolument pro-QE, convaincu que ça repart aux USA et optimiste : http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=7tc6-npzN8k

    – Nicolas Doze : America is Back : http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=wS09ZjSGVSY

    Moi je veux bien, mais il me semble que dès que le QE s’arrêtera tout tombera et on sera revenu à la case départ ! C’est ce qu’expliquait Milton Friedman, ça fait du bien tout de suite puis le système s’ajuste et si on ne refait pas un QE ça retombe. Alors que la solution est comme pour les drogués, d’arrêter ce machin à taux négatifs, de souffrir au début… puis après ça repart sainement.

    Nous verrons si l’arrêt progressif du QE empêche un désastre et si l’économie US maintient voir augmente son taux de croissance, mais j’en doute, les bases qui ont mené à la crise n’ont pas fondamentalement changées aux USA (ni ailleurs).

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  • yvesdemars

    2 juin 2013

    C’est comme si sur un bateau en train de couler on s’acharnait à transvaser dans la cale avant l’eau venant de la voir située dans la cale arrière, certes le bateau sera rééquilibré mais il coulera tout autant

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  • yvesdemars

    2 juin 2013

    très clair comme d’habitude merci.

    le cocktail détonnant est celui d’une réglementation idiote qui pondère à zéro les titres des Etats et du sauvetage par les Etats qui amène ceux ci à s’endetter pour renflouer les banques qui se précipitent pour racheter lesdits titres, en droit commercial ça s’appelle de la cavalerie.

    C’est comme si sur un bateau en train de couler on s’acharnait à transvaser dans la cale avant l’eau venant de la voir située dans la cale avant, certes le bateau sera rééquilibré mais il coulera tout autant ….

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  • BA

    2 juin 2013

    Concernant la BCE, le pire est devant nous. Les banques européennes ont dans leurs livres 1500 milliards d’euros d’actifs pourris. Et donc il semble que la BCE va encore une fois intervenir : « Planquez-vous ! La BCE va encore intervenir ! Tous aux abris ! »

    Lisez cet article :

    La BCE s’inquiète du poids des créances douteuses en zone euro.

    La Banque centrale européenne (BCE) s’inquiète de plus en plus de voir le poids des créances douteuses dans les portefeuilles de prêts des banques européennes entraver le redémarrage du crédit dans un contexte de priorité donnée au renforcement des fonds propres, selon plusieurs responsables de l’institution.

    Selon KPMG, les créances douteuses des banques européennes atteindraient près de 1.500 milliards d’euros, dont 600 milliards pour les seuls établissements britanniques, espagnols et irlandais.

    Entre l’hypothèque des créances douteuses et les effets potentiellement pervers des ratios de fonds propres, la BCE n’a guère d’autres choix que d’innover une nouvelle fois.

    Plusieurs pistes sont évoquées par les intervenants de marché, allant d’achats directs mais limités de prêts aux entreprises à un accès au refinancement pour la Banque européenne d’investissement (BEI) en passant par la création d’une banque dédiée aux PME de la zone euro.

    Dans tous les cas, la BCE sera amenée à faire peser sur son propre bilan une partie du risque liée au financement des entreprises. Même s’il s’agit d’un risque résiduel, elle ne pourra en décider seule car les pertes éventuelles seront supportées collectivement par ses dix-sept Etats actionnaires, qu’il lui faudra donc convaincre.

    http://www.usinenouvelle.com/article/la-bce-s-039-inquiete-du-poids-des-creances-douteuses-en-zone-euro.N196064

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  • Marius

    31 mai 2013

    Bonjour Monsieur Gave,

    Si vous pouviez faire un papier, voir même une conférence vidéo, sur la pensée monétaire de Friedman, afin de savoir ce qu’il aurait préconisé à la place de Bernanke depuis 2007, c’est serait formidable !

    Je commence a lire les travaux de Milton, entendre tout et son contraire sur ses positions monétaires, notamment sur la FED et sur les QE, tout ça n’aide pas. Je pense que vous êtes certainement celui qui appréhende le mieux sa pensée, si vous pouviez nous aider là-dessus.

    Par ailleurs, autre suggestion tant que j’y suis 🙂 un débat filmé serait tout aussi formidable, entre vous et des cadres du Parti Liberal, pro-euro VS anti-euro. Voilà qui serait très instructif pour les libéraux français.

    J’en profite pour vous remercier de nous faire partager vos analyses ici, très important pour les jeunes libéraux comme moi.

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  • James Sunderland

    31 mai 2013

    Merci Monsieur Gave, une fois encore, pour ce nouveau billet très intéressant…

    Comme CRYP, je suis aussi très curieux de connaître votre avis, en tant qu’investisseur, concernant le pétrole et le gaz de schiste? Auriez-vous l’amabilité de nous donner votre point de vue?

    Merci.

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  • Gerald Muller

    31 mai 2013

    Le Monde, fidèle à son habitude de voix de son maître, n »hésite pas à utiliser la déception d’un seul petit pays d’Europe pour annoncer que c’est bientôt la fin du gaz de shiste. Quelle fumisterie!
    Dans l’hostoire du pétrole et du gaz, on ne compte plus ni les désillusions ni les divines surprises, tant l’exploration est un métier difficile.
    En revanche, apporter sa pierre aux crétins français qui ne veulent même pas faire de la recherche dans le domaine, ça, Le Monde sait faire.

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  • roger duberger

    31 mai 2013

    Cher Charles Gave,
    Merci pour ce billet limpide et très intéressant (comme toujours !).
    L’euro – monnaie commune – devait permettre à tous d’avancer à un même rythme, ce qui n’est pas possible. Par contre la BCE a permis de juguler l’inflation, alors qu’avant l’inflation et les taux d’intérêt étaient très élevés (de mémoire plus de 10% en 1990). Le fait que l’Europe oblige les pays à limiter leurs déficits est un bon ? En France (pays de buveurs de vin) nous sommes incapables de nous réformer, par contre nous le faisons, au motif que nos hommes politiques affirment que c’est l’Europe qui l’impose. Ces derniers jours, on parle de plus en plus, du fait que l’Europe demanderait à la France de réformer ses régimes de retraite….
    Bien cordialement

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