25 février, 2014

Le déclin français n’est pas enrayé

En France, même si l’on a envie d’éviter le dénigrement de l’économie française (le fameux « bashing ») on est bien obligé de continuer à observer les grands indicateurs économiques. Le PIB français est revenu à son niveau de 2008 précédent la crise. Cela ne signifie pas pour autant que l’économie a retrouvé un rythme de croissance convenable.  En effet, le dernier indice PMI dévoilé par Markit sur la France est encore mauvais puisqu’il ressort à 47,6 en février contre 56,1 en Allemagne. L’écart de performance des deux pays qui utilisent pourtant la même monnaie surévaluée, montre bien tout le chemin qui reste à parcourir avant que les entrepreneurs français et étrangers retrouvent un peu de confiance en l’avenir. Il y a malheureusement encore un fossé entre les discours de François Hollande  et les actes de son gouvernement.  Pour ne prendre que deux exemples, la « Loi Florange » qui était toujours en discussion la semaine dernière va créer encore de nouvelles contraintes et va freiner les partenariats entre les entreprises étrangères et les sociétés françaises ; le Code du travail fait maintenant 3000 pages et pèse un kilo et demi !

 

En Allemagne, les salaires réels allemands ont pour la première fois depuis 2009 baissé de 0,3%. Après trois ans de progression, il s’agit du premier recul depuis 2009. Ce chiffre apporte de l’eau au moulin des économistes qui agitent depuis des mois le spectre de la déflation.

 

En Europe, les élections au Parlement Européen auront lieu entre le 22 et le 25 mai. C’est plutôt la désunion qui domine les questions liées à l’Europe. Il n’y a pas si longtemps, la zone Euro menaçait d’éclater. D’ici peu le Royaume Uni pourrait choisir de quitter l’Union Européenne. Les mouvements qui rejettent tout ou partie de la construction européenne pourraient réunir 20% des voix. Les européens abordent ces élections entre l’indifférence et le rejet. Bruno Cavalier économiste chez Oddo Securities s’est livré à une étude des enjeux de ces élections par pays. L’impact sera selon lui faible pour l’Allemagne, l’Espagne, le Portugal, la Pologne ; moyen pour la France, l’Italie, les Pays Bas ; élevé pour le Royaume Uni, la Grèce

 

Aux Etats Unis, le rachat par Facebook de WhatsApp, l’application de messagerie pour 19Md€ confirme que les applications à mi-chemin entre le SMS et les réseaux sociaux sont une activité qui intéresse beaucoup les grands acteurs de la technologie. Il s’agissait pour Facebook de récupérer les 450 millions d’utilisateurs des services de la start up. Cela lui a couté 36$ par utilisateur. Rakuten au Japon avait racheté Viber une société israélienne qui détenait 300M d’utilisateurs sur la base de 9$ par utilisateur.

Christopher Wood stratégiste de CLSA à Hong Kong,  est inquiet sur le marché action américain. Il préfère recommander en priorité le Japon et ensuite l’Europe.

 

Le Japon, lest plus que jamais un sujet de débat parmi les stratégistes. La consommation ne repart pas vraiment. La balance commerciale reste médiocre ce qui pourrait remettre en cause l’ensemble du programme économique de Shinzo Abe. Pourtant, certains stratégistes veulent toujours croire au rebond japonais. Selon Richard Bernstein de Richard Bernstein Advisors on a plus de chances de trouver  au cours des prochaines années de la croissance au Japon que dans les marchés émergents. D’après Anatole Kaletsky de GaveKal à Londres le marché est entré dans une zone de risque.

 

En Inde, on est peut être à l’aube d’une « contre révolution » qui irait dans le bon sens estime Udith Sikand de GavaKal Dragonomics. Narendra Modi candidat du BJP, Gouverneur du Gujarat est le favori des prochaines élections. Raghuram Rajan le nouveau Gouverneur de la Banque Centrale, très proche des idées de Paul Volcker ex Gouverneur de la Federal Reserve dans les années 70, a fait de la lutte contre l’inflation sa priorité. Il a relevé les taux d’intérêts trois fois malgré une croissance de l’économie qui retombait autour de 5%.

 

En Chine, le débat sur l’effondrement de l’économie chinoise a été relance par Andy Rothman économiste de CLSA à Shangai. Pour lui, le Parti Communiste qui contrôle effectivement toutes les institutions financières continue de ralentir la distribution de crédit. Cela a pour conséquence de ralentir progressivement la croissance. Les salaires des classes moyennes continuent néanmoins de monter ce qui n’empêche pas les sociétés privées d’avoir des marges supérieures à celles contrôlées par le gouvernement. L’inquiétude demeure sur le « Shadow banking (= financement organisés en dehors des banques commerciales). La dette du gouvernement est gérable et surtout la dette extérieure est une des plus basses du monde.  La hausse des exportations chinoises sur les douze derniers mois ressort à 10,6% mais la production industrielle recule à un plus bas depuis sept mois. Les investisseurs qui ne croient pas à un accident en Chine peuvent s’intéresser au fonds  Comgest Growth Greater China.

 

En Israël, la production industrielle a augmenté de 13% en rythme annuel au quatrième trimestre 2013. Ces chiffres prennent en compte le début de la commercialisation  du champ de gaz de Tamar exploité par Noble Energy.  Ce qui est remarquable, c’est également le bond de la production de technologie en hausse de 32% sur la même période. Un pays qui ose exploiter ses ressources en gaz et qui connaît un grand développement en matière de technologie est vraiment une situation à faire pâlir d’envie Arnaud Montebourg Ministre du Redressement Productif. Parmi les dernières sociétés financées par Avi Hasson qui porte le titre de « Chief Scientist » figurent : LifeWatch (permet d’effectuer des tests médicaux sur son smartphone), iDTV (applications pour contrôler une télévision à distance), Facetune (programme d’amélioration des photos), MtCheck (paiment de notes de restaurants avec son smartphone), Magisto (outil d’édition pour video). C’est grâce à cette politique de prise de risque intelligente que Israël est devenue une « start up nation ». Une des sociétés aidées à son départ par Avi Hasson, Waze a été revendue récemment à Google pour 1Md $. Pendant ce temps Arnaud Montebourg crée la Compagnie Nationale des Mines !

 

Dans les pays émergents, les actions sont devenues bon marché mais pas les obligations pense Michael Hartnett stratégiste de Bank of America Merrill Lynch.

Au cours de la réunion du G20, les ministres des Finances réunis à Sydney ont eu beaucoup de mal à donner une explication du tassement de la croissance et de la fuite des capitaux.

 

Dans le secteur automobile, le feuilleton de la recapitalisation de Peugeot s’est finalement conclu cette semaine avec l’entrée au capital de l’Etat français et du chinois Dong Feng. On peut se poser la question de savoir s’il n’aurait pas été possible de réaliser une augmentation de capital dans le marché, sans faire entrer l’Etat et avoir des réserves sur la difficulté de gérer « Un lion à trois têtes ». Il faut souhaiter que l’opération qui sera lancée prochainement se passe bien, ce qui devrait être le cas.

 

Le secteur de l’énergie donne des signaux d’achat. L’ETF SPDR Oil & Gas Exploration and Production a bien rebondi sur sa moyenne mobile 200 bourses. Exxon a annoncé une forte baisse de ses résultats en 2013,  due pour l’essentiel à la pression sur ses marges de raffinage. Les fonds d’investissement sont particulièrement sous exposés sur cette classe d’actif.  Les grandes capitalisations du marché américain sont les suivantes :

Exxon Mobil, Anadarko Petroleum, Apache Corporation, Chesapeake Energy, ConocoPhillips, Devon Energy, EOG Resources, Hess, Marathon Oil Company, Murphy Oil, Noble Energy, Occidental Petroleum, Pioneer Natural Resources

Auteur: Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Bordeaux, titulaire d’une licence en droit de l’Université de Paris X. Il a été successivement fondé de pouvoir à la charge Sellier, puis associé chez Nivard Flornoy, Agent de Change. En 1987, il est nommé Executive Director chez Shearson Lehman Brothers à Londres en charge des marchés européens et membre du directoire de Banque Shearson Lehman Brothers à Paris. Après avoir été directeur général associé du Groupe Revenu Français, et membre du directoire de Aerospace Media Publishing à Genève, il a créé en 1996 Concerto et Associés, société de conseil dans les domaines de le bourse et d’internet, puis SelectBourse, broker en ligne, dont il a assuré la présidence jusqu’à l’ absorption du CCF par le Groupe HSBC. Il a été ensuite Head of Strategy de la société de gestion Montpensier Finance.

2 Commentaires

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  • Stefano

    27 février 2014

    Vous écrivez que le PIB est revenu à son niveau de 2008.
    Mais pour reprendre une distinction fondamentale faite par M. Gave, quelles sont les évolutions relatives dans ce PIB des secteurs public et marchand ?
    Par ailleurs la « richesse » nationale nette annuelle produite est à diminuer de l’augmentation annuelle de la dette.
    En réalité la « richesse » réelle annuelle produite de la France (l’équivalent de la variation du Net Assets) est depuis nombre d’années négative.
    Cela recoupe le graphique de la production industrielle, en chute libre depuis une dizaine d’années, et que ne compense pas la croissance des services, ainsi que l’évolution du commerce extérieur.

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  • Roger Duberger

    26 février 2014

    Cher JJ Netter,
    Merci pour ce tour d’horizon.
    Je ne crois pas que la France affronte l’avenir, nos hommes politiques manquent de courage et se laissent aller dans le train de l’Europe. Depuis une vingtaine d’années, il y a eu des réformes dans notre pays et elles provenaient de l’Europe. Les politiques proclamaient « Ce n’est pas nous, c’est l’Europe…! » (bien contents que l’Europe ait apporté un peu de libéralisme et de concurrence.
    Néanmoins l’Europe est un vilain attelage avec des pur-sangs, des percherons, des ânes et des vaches. On voit mal comment ça peut avancer et encore moins pour combien de temps ?
    Comme en France, on n’est pas si malin qu’on le prétend, on pourrait s’inspirer des lois de petits pays qui marchent bien : je pensais à la Suisse (main d’œuvre qualifiée, pays organisé, propre, à la pointe dans des domaines techniques, et chimiques, petit code du travail etc). ça va sans doute faire rouspéter nos bons socialistes….
    Bien cordialement

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