17 décembre, 2014

La forte chute du prix du pétrole accroit le risque d’accident financier

La chute du pétrole en dessous de 60$ est pourtant une bonne nouvelle pour les pays importateurs. Elle s’analyse comme une diminution de la fiscalité payée aux pays pétroliers qui bénéficient de la rente pétrolière. Pour les Etats Unis, cela représenterait l’équivalent d’une hausse du pouvoir d’achat pour les ménages en année pleine de 45Md$. En France, le chiffrage effectué pour les entreprises montre que l’impact pourrait être le double de celui du CICE. Rappelons que ce sont des chocs pétroliers à l’envers qui ont provoqué les fortes reprises économiques de la fin des années 80 et 90….

La baisse du pétrole serait en revanche pour de nombreux investisseurs, le signe d’une baisse de la demande, ce qui fait entrer les marchés dans une phase de forte turbulence. L’indice S&P 500 Energy représentatif des valeurs pétrolières américaines est en baisse de plus de 50% par rapport à son plus haut de juin dernier ; Le CAC a ainsi perdu près de 10% en six jours ; les obligations High Yield US, fortement exposées au secteur de l’énergie offrent maintenant un rendement supérieur à 9%, car les faillites vont augmenter fortement ; la rouble russe s’est effondrée, obligeant la banque centrale de Russie à augmenter son taux de base de 10% à 17% dans la journée ; la hausse du dollar déstabilise les pays émergents dont les sociétés auront du mal à rembourser leurs emprunts contractés dans la devise américaine.

L’ Europe est entrée dans une phase de reflation lente selon François-Xavier Chauchat de GaveKal à Paris. La BCE a accordé 130Md€ de prêts à 0,15% sur quatre ans à 306 établissements. C’est la moitié du chiffre qui pouvait être alloué. Comme les montants empruntés par les banques ont été faibles, la BCE sera obligée d’annoncer de nouvelles mesures l’année prochaine. Jens Weidman président de la Bundesbank a une fois de plus expliqué ses réticences à l’égard d’une nouvelle offensive monétaire voulue par Mario Draghi le président de la BCE. Si aucune mesure n’est prise, il serait dangereux que les Etats, les entreprises, les ménages et les marchés ne croient plus dans la capacité de la BCE à faire remonter l’inflation à 2% à moyen terme.

En France, l’économie détruit toujours des emplois. Plus de 55 000 postes ont été encore supprimés entre juillet et septembre. La vague de faillites reste à un niveau historiquement élevé (63 000 en 2014 contre 50 000 en 2007). La production industrielle s’inscrit en baisse de 1% sur les douze derniers mois. La baisse du pétrole n’est pas suffisante pour compenser un marché du travail qui est structurellement malade. L’année 2015 est partie pour être encore une année noire.

La Loi Macron ne sera pas suffisante pour relancer l’économie. C’est un ensemble de mesures qui vont dans la bonne direction, car tout ce qui peut redonner de l’espoir aux jeunes générations et aux entrepreneurs est positif. Toutefois, la vision pragmatique du ministre de l’économie est en opposition frontale avec celle de Martine Aubry maire de Lille,   qui souhaite mettre en avant un socialisme français dans lequel « la société est gentille et tout le monde est gentil, car la vraie vie se situe forcément hors du travail »…..

Une fois n’est pas coutume Dominique Saint Georges de Carmignac, pense que les réformes à la française de la Loi Macron pourraient produire des résultats….

La Grèce a retrouvé le chemin d’une croissance positive, mais les porteurs de dette grecque sont inquiets de la situation politique. L’élection présidentielle avancée en décembre pourrait encore renforcer le pouvoir du parti d’extrême gauche SyrizaEn Italie, La production industrielle est en baisse en octobre de 3% sur un an. Le taux d’endettement de l’Etat représente maintenant 134% du PIB, soit le même niveau que celui de la Grèce en 2009. Les banques italiennes ont désormais 440Md€ d’encours sur l’Etat italien… Les mauvaises créances des banques ont augmenté de 20% sur un an.

C’est probablement après la Grèce le pays le plus fragile de l’Union.

En Belgique, on assiste aux débuts chaotiques du gouvernement. La contestation sociale et le nationalisme flamand mettent la coalition de droite en difficulté.

Grand succès électoral de Shinzo Abe

Au Japon, après deux années de politique économique baptisée « Abenomics », le pays est en récession et la baisse de la confiance des consommateurs s’est encore détériorée en novembre. Pourtant, aux dernières élections Shinzo Abe le premier ministre a vu sa confiance largement renouvelée. Pour Joyce Poon de GaveKal à Hong Kong, Il faut s’attendre à une poursuite de la baisse du yen.

Parmi les valeurs qui profitent de la baisse du yen on peut retenir : Astellas Pharma, Shinetsu Chemical, Toyota. Les valeurs composant l’indice MSCI Japon réalisent 40% de leur chiffre d’affaires en dehors du Japon.

Les américains vont pouvoir dépenser plus

Aux Etats Unis, les ventes de détail ont progressé en novembre. Les ventes de Noël devraient être bonnes. On assiste à une forte hausse de la consommation due à la création d’emplois et à la chute du pétrole. Tout cela pousse les américains à la dépense.

Will Denyer de GaveKal à Hong Kong reste encore favorable sur les valeurs de consommation discrétionnaire qui sont nettement moins sensibles à une remontée des taux d’intérêts. Dans l’univers investissable on trouve : Ralph Lauren, Tiffany, Richemont

Les matières premières agricoles n’échappent pas aux turbulences.

Pour le riz, l’Iran a décidé de cesser d’importer du riz d’Inde et de Thailande. Pour les producteurs de riz indiens, l’Iran achetait 1/3 de leur récolte de riz basmati, celui qui est de meilleure qualité. Parmi les sociétés indienne concernées par cette évolution figurent : REI Agro, Kohinoor Foods . La production de noisettes turques a baissé de 70% cette année, ce qui a pour conséquence que le prix de la noisette vient de doubler en un an à 6,27$ le kilo. Parmi les sociétés concernées on peur citer bien sûr Nutella en Italie et Hershey aux Etats Unis. La production de Châtaignes est aussi affectée par un insecte japonais, le cynips qui attaque les arbres. Il a fait chuter la production de 30% en Ardèche. La production mondiale de châtaignes est de 1,9MT dont 1,6M en Chine suivie par Corée du Sud, Turquie, Italie, Portugal et Espagne. La France est n°10 avec 10 000T produites en Ardèche, Corse, Périgord Limousin. La situation du sucre est aussi complexe avec un prix américain supérieur en ce moment de 58% au cours mondial. Quand au marché du coton il les producteurs chinois et américains croulent sous les subventions, 6,5b$ pour la campagne 2013-2014 (ICAC 10/12/2014). Cela pénalise fortement les affaires de la Sofitex au Burkina Faso: pour qui c’est la première exportation du pays représentant 30% du PIB. La CMDT et Biotex au Mali sont aussi dans une situation difficile. Enfin, en Zambie, le coton fait vivre 21% de la population or le prix actuel n’est plus suffisant pour assurer la pérennité des exploitations. A suivre….

Auteur: Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Bordeaux, titulaire d’une licence en droit de l’Université de Paris X. Il a été successivement fondé de pouvoir à la charge Sellier, puis associé chez Nivard Flornoy, Agent de Change. En 1987, il est nommé Executive Director chez Shearson Lehman Brothers à Londres en charge des marchés européens et membre du directoire de Banque Shearson Lehman Brothers à Paris. Après avoir été directeur général associé du Groupe Revenu Français, et membre du directoire de Aerospace Media Publishing à Genève, il a créé en 1996 Concerto et Associés, société de conseil dans les domaines de le bourse et d’internet, puis SelectBourse, broker en ligne, dont il a assuré la présidence jusqu’à l’ absorption du CCF par le Groupe HSBC. Il a été ensuite Head of Strategy de la société de gestion Montpensier Finance.

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