2 septembre, 2015

La date et l’amplitude de la remontée des taux US est au centre de toutes les préoccupations.

Pour tous ceux qui n’ont pas suivi l’actualité des marchés de près cet été, la rentrée va être compliquée. Pendant les mois de juillet et d’août, on est passé de la crise grecque à un krach des actions chinoises. Dans le sillage de Shangai (-20% en deux mois), Francfort a baissé de -8%, New York de 6% et Paris de 4,2%. La baisse de la devise chinoise et des statistiques économiques décevantes ont entrainé une véritable panique des investisseurs qui s’est traduite par une baisse des actions chinoises de 16% au cours des séances des 24 et 25 août.

 

Voilà un résumé de la situation 

La croissance mondiale ralentit, c’est d’abord la conséquence de la baisse de la croissance chinoise. Heureusement les derniers chiffres américains ont été plutôt bons.

Le réajustement monétaire du Renminbi était un pas vers une cotation déterminée plus par les marchés que par la Banque Centrale de Chine. Il a été interprété comme le début d’une dévaluation massive du Renminbi. Pour nous cela ne semble pas à l’ordre du jour ne semble pas à l’ordre du jour.

Les nouvelles régulations bancaires qui ont été mises en place ont pour résultat, que dans les moments difficiles, il n’y a plus de contrepartie acheteur en face de vente massive d’actions. Les banques ne procurent plus la liquidité nécessaire aux marchés, qui doivent donc encaisser de forts moments de volatilité…

La baise des matières premières n’est probablement pas terminée. Elle cessera avec la faillite d’un des grands acteurs du secteur avec les consolidations qui suivront.

 

Les marchés ont maintenant les yeux rivés sur la Federal Reserve américaine. Si elle remonte ses taux trop rapidement, on pourrait assister à une hausse du dollar qui mettrait en situations difficile toutes les sociétés qui se sont endettées excessivement en dollar, sans avoir le cash flow correspondant en face. Certains pays comme le Brésil ont maintenant un déficit combiné (budget + commerce extérieur) qui atteint 13,2% du PIB. L’histoire économique nous a appris que quand un pays dépassait les 10%, il entrait dans une phase de forte turbulence. Parmi les sociétés françaises qui ont une forte exposition au Brésil on peut citer : Aperam , Edenred , Casino et Vallourec

 

Les 35 heures ont fait beaucoup de mal à l’économie française, tout le monde le sait

 

En France, les échanges de petites phrases sur les 35 heures pourraient faire rire si le problème n’était pas aussi grave.

Emmanuel Macron Ministre de l’Economie a dit devant les entrepreneurs du MEDEF « La gauche a pu croire il y a longtemps, que la France pourrait aller mieux en travaillant moins ». En rappelant qu’elle avait eu tort, il n’a fait qu’énoncer une vérité qui correspond à la réalité.

En effet, la loi sur les 35 heures de Martine Aubry et Dominique Strauss Kahn, s’appuyait sur l’idée fausse que comme la quantité de travail était stable, elle pouvait être répartie . L’effet a été totalement inverse. La Réduction du Temps de Travail, la fameuse RTT, a créé comme chacun le sait, l’effet « Remets Tes Tongs ». En tuant le goût du travail, on a tué le goût du risque. Comme on a en plus rajouté la taxation du capital au même niveau que le travail, tout cela a eu pour conséquence d’arrêter tout investissement privé en France.

Bien évidemment les 700 000 emplois qui devaient être créés n’ont pas été au rendez vous. La loi sur les 35 heures en a en fait détruit, selon les calculs de l’OCDE. Par contre l’enveloppe de financement qui devait représenter au début 10 Md€ de l’époque, a explosé, payée par de l’argent emprunté par l’état. Au total, la valeur cumulée actualisée du coût des 35 heures représenterait au moins 10% de la dette publique actuelle. Pour compléter le tableau, on voit très bien que   le décrochement de la compétitivité de la France coïncide très exactement avec la généralisation des 35 heures imposées par la loi à toutes les entreprises. Le coût excessif du travail, lesté de charges supplémentaires a rogné les marges des entreprises qui sont tombées à des niveaux historiquement bas. Insuffisamment rentables, elles manquent de munitions pour investir et préparer l’avenir.

 

Manuel Valls Premier Ministre qui est pourtant convaincu de la nocivité des 35 heures a été obligé de « recadrer »  son ministre pour donner le change aux membres du PS réunis à La Rochelle.

 

Les socialistes français , contrairement à leurs cousins sociaux-démocrates allemands et travaillistes anglais, ne sont pas encore devenus adultes. Pour eux, l’idéologie prime toujours sur la réalité. Elle impose donc de ne pas toucher à une « conquête sociale » même si elle est ruineuse pour l’économie.

 

Quant aux frondeurs, on a l’impression qu’ils jouent à la politique budgétaire sur Play Station. En voulant maintenant remettre en cause le CICE, ils montrent qu’ils vivent dans un monde où la dette publique est virtuelle et où la croissance se décrète en appuyant sur un bouton.

 

Au delà de la polémique idéologique il vaut toujours mieux regarder la réalité. Facom était une société française performante spécialisée dans l’outillage, qui avait une petite filiale aux Etats Unis. Lorsque la gauche revient au pouvoir en 1997, le tournevis Facom avait un coût de revient équivalent qu’il soit produit en France ou aux Etats Unis. Mais après que Lionel Jospin eut instauré les 35 heures et la loi de modernisation sociale, les prix de revient bondissent. A parité monétaire égale, le tournevis qui revenait à 100 au début du gouvernement Jospin coûtait 120 à la fin, tandis qu’aux Etats Unis, il avait baissé à 80. Le grand concurrent américain de Facom, Stanley pouvait vendre ses outils en France à des prix inférieurs de 41% à ceux de Facom. Tandis que la différence de prix condamnait Facom, la Chine adhérait à l’OMC, ce qui ouvrait le marché français à l’invasion de ses produits. Facom perdait de l’argent et des parts de marché. En 2005, son concurrent américain rachète Facom et ferme ses usines françaises. Voilà un exemple à méditer par tous les petits boutiquiers d’une gauche qui rappelle plus la SFIO de Guy Mollet que les Travaillistes britanniques ou le SPD allemand d’aujourd’hui…

 

Les chiffres du chômage sont toujours malheureusement mauvais. Le nombre de chômeurs ne baisse pas et ce malgré l’embauche massive de contrats aidés qui atteindront 500 000 à la fin de l’année.

 

Une reprise modérée se dessinait pourtant après le trou d’air du printemps. Elle ne devait absolument rien aux mesures prises par le gouvernement. La baisse du pétrole donnait un peu d’air aux industriels. Le cours a baissé de 30% à 42$ depuis le début du mois de juillet. Conforté dans sa conviction selon laquelle« La reprise, elle est là » Il n’en a pas fallu plus pour qu’il annonce une baisse des impôts sans en avoir parlé, semble-t-il à ses ministres.

 

Aux Etats Unis, le rebond de l’économie est plus fort que prévu au deuxième trimestre.

 

Cela incite à renforcer dans son portefeuille les sociétés européennes les plus exposées en terme de chiffre d’affaire. Voilà une liste : Fiat (50% du CA), Tate and Lyle 55%), Anheuser-Busch-Inbev (40%), Essilor (43%), Fresenius Medical Care (64%), Grifols (60%), Novo Nordisk (49%), Roche (43%), Shire (67%), MTU Aero Engines (60%), Aegon (55%), Publicis (46%), Luxottica (60%), Husqvarna (42%), Delhaize (73%), Sodexo (40%)

 

 

Auteur: Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Bordeaux, titulaire d’une licence en droit de l’Université de Paris X. Il a été successivement fondé de pouvoir à la charge Sellier, puis associé chez Nivard Flornoy, Agent de Change. En 1987, il est nommé Executive Director chez Shearson Lehman Brothers à Londres en charge des marchés européens et membre du directoire de Banque Shearson Lehman Brothers à Paris. Après avoir été directeur général associé du Groupe Revenu Français, et membre du directoire de Aerospace Media Publishing à Genève, il a créé en 1996 Concerto et Associés, société de conseil dans les domaines de le bourse et d’internet, puis SelectBourse, broker en ligne, dont il a assuré la présidence jusqu’à l’ absorption du CCF par le Groupe HSBC. Il a été ensuite Head of Strategy de la société de gestion Montpensier Finance.

2 Commentaires

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  • Nono

    5 septembre 2015

    Tout à fait d’accord avec vous Messieurs NETTER et « JIMMIE »,

    – Côté entrepreneurs, les 35h ont rigidifié l’organisation du travail, fait exploser les charges, réduisant la compétitivité et entraînant des fermetures massives.

    – De l’autre côté, les salariés ont vu leurs conditions de travail se dégrader : pour l’employé les cadences s’accélèrent, pour les cadres l’amplitude horaire et le stress s’accroissent.

    Résultat le tissu économique s’atrophie peu à peu, laissant des zones saccagées où le seul espoir de salut réside dans les promesses d’un vote extrême où dans les emplois de la sphère publique (copinage, piston et retours d’ascenseur avec de l’argent public …)

    La société est désormais scindée entre la classe laborieuse qui travaille ou tente d’entreprendre et la sphère publique où l’emploi à vie permet de conserver ces « chers » acquis sociaux en menant des carrières politiques et syndicales.

    Les médias et les enseignants pour la plupart de gauche véhiculent la « bonne parole » permettant de maintenir leur caste au pouvoir.

    Malheureusement je ne vois aucune issue au marasme français puisqu’il n’existe aucun parti véritablement libéral capable d’inverser la tendance.

    Les politiques assimilés à la droite n’ont jamais eu le courage de réformer et ne l’auront probablement jamais.

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  • jimmie19

    2 septembre 2015

    Tout à fait d’accord sur votre analyse de la calamité 35H.

    J’y rajouterai une conséquence que vous ignorez peut-être : l’explosion des TMS (Troubles Musculo Squelettiques) concomitent, principalement les tendinites qui font souffrir les ouvriers et ruinent la sécu. En effet, le passage de 39 à 35H s’est accompagné du maintient du salaire (en partie compensé par la distribution d’argent public par définition réparti de façon inefficace). Les entreprises ont été contraintes de faire faire le travail de 39H en 35H d’où la suppression des pauses et l’augmentation des cadences à l’origine de la dite explosion.

    Sur un autre plan je rappelle que l’excellente mauvaise idée de taxer les revenus du capital comme ceux du travail, mais sans les avantages sociaux (droits à l’assurance maladie, retraite…) est due à Nicolas Sarkozy.
    Hélas!

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