11 juin, 2013

La Chine serait-­elle en train de s’ouvrir au libéralisme

Le libéralisme a peut être du mal à se faire entendre en France, mais il semble aujourd’hui bien établi… en Chine ! Unirule a été fondé en 1993 par le

charismatique Mao Yushi, ancien dissident, économiste, et auteur de rapports très critique contre Mao Zedong. Auteur d’une quinzaine de livres

sur les avantages du libre-‐échange et de la privatisation, Mao Yushi a reçu l’année dernière le prestigieux Freedom Prize du Cato Institute. Son aura a

contribué à faire évoluer la pensée des décideurs politiques chinois vers l’économie de marché. On peut lire sur leur site des papiers (dûment traduits en

anglais) dénonçant les distorsions du marché dues aux grandes entreprises d’Etat, ou l’absence de garantie des droits de propriété des petits paysans.

Unirule a même traduit en chinois Frédéric Bastiat, qui encore aujourd’hui a tant de mal à s’imposer dans l’Université française ! Quand on demande aux

dirigeants d’Unirule comment ils ont pu mener un tel combat dans un pays encore officiellement communiste, ils citent l’exemple de l’école de Freibourg,

qui élabora la doctrine de l’ordolibéralisme allemand en pleine dictature nazie .

Aujourd’hui, Unirule semble être en passe de remporter son combat. Le nouveau Premier Ministre, Li Keqiang, l’a fait savoir dès sa prise de

fonction en mars dernier, en parlant d’une « mini-ˇrévolution » (terme lourd de signification en Chine) : il entend diminuer la taille de la bureaucratie

chinoise, poser des limites aux pouvoirs du gouvernement, réduire d’un tiers les procédures administratives, et même ouvrir le rail, l’énergie ainsi que le secteur

financier aux capitaux privés. Plus récemment, dans un discours aux cadres du parti, Li Keqiang s’est montré encore plus radical en affirmant que « le marché

est créateur de richesse social, et la source de tout développement économique », parlant ouvertement de dérégulation et de concurrence. Pour les investisseurs

étrangers, cette volonté réformiste devrait se traduire par l’ouverture du marchéintérieur aux capitaux étrangers et l’assouplissement du contrôle des changes

(un geste de détente dans la fameuse « guerre des monnaies »).

 

2 Les inquiétudes sur la croissance chinoise ne sont sans doute pas étrangères à cette volonté de changer de paradigme. Il n’empêche que,

pour la première fois, la privatisation de larges secteurs de l’économie n’est plus une question tabou au sommet de l’Etat. Li Keqiang est titulaire

d’un PhD en économie de l’Université de Pékin, ce qui tranche sur son prédécesseur, géologue, et plus largement sur la classe politique chinoise, de

formation plutôt scientifique. Il semble déterminé à ouvrir la Chine aux mécanismes de marché, à « libérer les forces créatives ». Tous les concepts du

« capitalisme », y compris la volonté de s’enrichir, sont légitimés – à condition de ne pas prononcer le mot.

Unirule exclut néanmoins toute ouverture politique de la part du régime et préfère ne pas s’étendre sur ces sujets. On ne saura donc pas comment ils se

positionnent dans le débat sur la « fin de l’histoire » lancé par Francis Fukuyama dans les années 90. Rappelons qu’aujourd’hui l’idée de fin de l’histoire est de

plus en plus mise en cause par le « consensus de Beijing », pour reprendre le titre du livre de Stefan Halper, universitaire et intellectuel américain. Autrement

dit : l’économie de marché ne conduirait pas nécessairement à la démocratie,comme le voudrait une vision hégélienne de l’histoire, mais pourrait fort bien

s’accomoder d’un régime autoritaire ou semi-‐autoritaire (ce que Halper appelle :le « market-‐authoritarianism »). Il s’agit d’un véritable défi lancé à l’idée

occidentale d’Etat de droit. Economiquement, la Chine menace de rattraper le PIB des Etats-‐Unis ; intellectuellement, le consensus de Beijing affronte celui de

Washington.En attendant que ce débat s’ouvre, la Chine semble en train d’accomplir sa« mini-‐révolution » culturelle sur le plan économique, et l’équipe actuelle,normalement au pouvoir pour une décennie, a été très loin dans la volonté de libéralisation.

 

 

 

 

 

 

Article soumit par notre ami Thibault Danjou

Article Original paru dans Génération Libre

 

Auteur: idlibertes

Profession de foi de IdL: *Je suis libéral, c'est à dire partisan de la liberté individuelle comme valeur fondamentale. *Je ne crois pas que libéralisme soit une une théorie économique mais plutôt une théorie de comment appliquer le Droit au capitalisme pour que ce dernier fonctionne à la satisfaction générale. *Le libéralisme est une théorie philosophique appliquée au Droit, et pas à l'Economie qui vient très loin derrière dans les préoccupations de Constant, Tocqueville , Bastiat, Raymond Aron, Jean-François Revel et bien d'autres; *Le but suprême pour les libéraux que nous incarnons étant que le Droit empêche les gros de faire du mal aux petits,les petits de massacrer les gros mais surtout, l'Etat d'enquiquiner tout le monde.

7 Commentaires

Répondre à jepirad

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  • Boris

    15 juin 2013

    🙂
    une petite correction nécessaire sur le lien pointant vers la page originale du texte.

    Répondre
  • Sirius

    12 juin 2013

    C’est parce qu’ils sont d’ardents lecteurs de Gavekal Research !! :-))

    Répondre
  • Marius

    11 juin 2013

    « l’économie de marché ne conduirait pas nécessairement à la démocratie,comme le voudrait une vision hégélienne de l’histoire, mais pourrait fort bien

    s’accomoder d’un régime autoritaire ou semi-‐autoritaire (ce que Halper appelle :le « market-‐authoritarianism »). »

    Oui Milton Friedman l’avait déjà écrit en 1960 dans « Capitalisme et Liberté », et c’est d’ailleurs très facile a concevoir, un Etat minimal peut tout à fait être une dictature militaire, il suffit d’une constitution genre droits de l’homme (la souveraineté de la majorité du peuple en moins) et c’est parti… Le régime n’a plus qu’a faire la police pour faire respecter quelques lois de droits simples. Nous serions peut-être bien plus heureux dans une dictature avec un Etat minimal que dans ne démocratie avec un Etat obése. Milton Friedman, pour autant, évidemment disait qu’il ne soutiendrait jamais une dictature même libérale, il disait qu’il devait convaincre les gens pas les forcer. Cependant, et a raison a mon avis, il disait que les gens étaient bien plus libre dans la dictature de Pinochet qu’en URSS. Il disait donc qu’entre une dictature communiste et une dictature capitaliste avec de la liberté économique, le moindre mal était la seconde. La liberté économique n’amène pas forcément la liberté politique, inversement la liberté politique n’amène pas forcément la liberté économique.

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  • jepirad

    11 juin 2013

    Vous avez dit libéralisme en Chine! Mais quel sens donnez-vous à cette doctrine? S’il s’agit du libéralisme économique, pourquoi pas.

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    • idlibertes

      11 juin 2013

      Cher Jepirad,

      Oui, il faut l’entendre au sens « eco » et non humaniste. Quoique, chine/Japon, on ne sait plus n’est ce pas :-))

  • Nocte

    11 juin 2013

    Et pendant ce temps-là, en France, on préfère creuser plus profondément dans la fange et le marasme (certes, en Chine, ça n’est pour le moment que des paroles, mais au moins, ont-elles été prononcées – et dans quel pays !… En France, celui qui aurait l’outrecuidance d’en émettre l’idée serait banni de toute tribune, sauf peut-être dans le cas d’une étude psychiatrique sur l’amour des libertés…)

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