16 octobre, 2014

Hong Kong est devenue la capitale mondiale du capitalisme

La forme de la manifestation des étudiants de Hong Kong contre les autorités chinoises est déconcertante pour un français. Tous ceux qui s’expriment le font après avoir assisté à leurs cours et en plus, ils procèdent régulièrement au ramassage des papiers et autres détritus en procédant au tri sélectif. En se promenant parmi les manifestants comme je l’ai fait cette semaine, au pied des immeubles du gouverneur de Hong Kong qui sont à côté de ceux de l’armée et de la police, on comprend bien que la sortie du conflit ne sera pas facile. Pour le moment le Parti Communiste Chinois parie sur un pourrissement de la situation, ce qui est loin d’être acquis. Toute intervention trop musclée, en revanche, risquerait d’entrainer les mêmes manifestations à Shangai ou à Canton. Cela réduirait aussi les chances de la Chine de voir Taiwan rejoindre un jour l’Empire du Milieu. Pour le moment, la démocratie ne doit pas empêcher le capitalisme de continuer à se développer. Hong Kong est devenue la capitale mondiale du capitalisme. C’est tout de même plus enthousiasmant que d’être comme Paris la capitale mondiale du pessimisme…

 

Sur le plan mondial, les banques centrales sont nerveuses, car la baisse des marchés de la semaine dernière a créé des turbulences qui mettent de la pression sur les banquiers centraux réunis au FMI à Washington. Depuis des mois, ils pensent beaucoup plus à empêcher les marchés actions et obligations de baisser, que de s’occuper de l’économie réelle. Redisons une fois de plus, qu’une politique de taux d’intérêt ne s’apprécie pas dans l’absolu, mais par rapport au taux de croissance sous-jacent d’une économie. Personne ne peut avoir durablement envie d’emprunter de l’argent à 5,3% (taux d’une obligation Baa américaine) pour investir et créer de nouveaux emplois quand l’économie US croit en dessous de 4%. Le seul investissement que les entreprises font volontiers c’est d’acheter un peu plus de robots pour réduire encore le nombre d’emplois.

La fameuse ZIRP (Zero Interest Policy) ne bénéficie donc qu’aux détenteurs d’actif qui achètent beaucoup plus d’immobilier et d’oeuvres d’art. Sur ces deux classes d’actif on est dans une bulle préoccupante…

 

Heureusement la baisse du pétrole de 18% depuis la mi-juin est l’équivalent d’une baisse d’impôts pour les consommateurs. Une baisse de 10$ du baril revient selon Andrew Kenningham de Capital Economics à augmenter de 0,5% la croissance mondiale et l’augmentation de la demande dans les biens et services de 0,2% à 0,3%.

 

La baisse de l’Euro contre dollar va constituer une bouée d’oxygène pour les exportateurs des pays du sud de l’Europe dont la France.

 

Par contre la hausse du dollar va entraîner une amélioration de la balance des paiements courants américaine est préoccupante. Chaque fois que cela s’est produit dans le passé, on a assisté à une crise de liquidités. Les pays producteurs de pétrole qui sont confrontés simultanément à une baisse du baril et à une hausse du dollar sont dans une situation très difficile. Parmi les pays les plus vulnérables, selon Tristan Abet de Cross Asset Strategy le premier est l’Algérie car elle besoin d’un baril à 124$ pour équilibrer son budget, Barhain (117$), Iran (117$), Lybie (98$), Irak (94)…

 

En Europe les derniers chiffres de l’économie sont mauvais. Le rythme de croissance a été revu en baisse, ce qui n’est pas une surprise. Même l’Allemagne aussi a des difficultés. Le marché allemand a baissé de 2,4% vendredi dernier. La production industrielle a reculé de 2,8% sur un an, contre une hausse de 2,5% en Grande Bretagne qui n’est pas dans la zone Euro. Elle avait pu beaucoup exporter dans les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine , Afrique du Sud) quand la dynamique des matières premières était positive. Les exportateurs allemands sont confrontés aux exportateurs japonais qui eux profitent de la forte baisse du Yen pour gagner des parts de marché. L’opposition à une politique de QE (Quantitative Easing) menée par la BCE grandit.

La France est en récession. Le CAC 40 a vécu sa pire semaine depuis deux ans.

Même si elle obtient de justesse son délai supplémentaire pour ajuster son déficit, cela ne résoudra aucun des problèmes de fonds de l’économie française qui passent par des réformes de structures courageuses dont la liste a déjà été établie des centaines de fois.

 

Au Japon, les derniers chiffres sont mitigés. La dernière enquête Tankan montre que les entreprises sont plutôt optimistes sur les exportations. Les carnets de commande dans la machine outil augmentent ce qui explique une grande partie de la baisse des exportations allemandes. Le Yen a baissé de 5,3% contre dollar depuis trois mois.

 

Le ralentissement de la Chine est modeste. Il est du pour l’essentiel au recul du secteur privé et de l’immobilier. La croissance devrait être de 7%.Toutes les banques chinoises se traitent en dessous de leur actif net comptable. Les actions chinoises offrent des niveaux de valorisation attractifs dans un marché qui se comporte normalement.

 

Les Etats Unis sont pour beaucoup le seul refuge. Le prix des matières premières baisse, le dollar monte dans le cadre d’une « militarisation du dollar »comme si la « Pax Americana » qui était assurée auparavant par l’armée américaine, avait été remplacée par le dollar. Toute institution, banque ou sociétés utilisant le billet vert peut se retrouver devant des juges américains pour avoir utilisé le dollar comme monnaie de transaction. Cette tendance lourde ne fera que précipiter la montée en puissance du Renminbi…

 

Vladimir voudrait faire remonter le baril de pétrole à 200$

 

En Russie les interventions sur le Rouble deviennent importantes ce qui est en général un très mauvais signe. Beaucoup d’oligarques souffrent. La baisse du pétrole est une mauvaise nouvelle pour le pays qui réalise l’essentiel de ses exportations avec le pétrole et le gaz. En Russie la population est musulman sunnite dans une proportion de 18%. Les interventions en Tchétchénie ont montré que Vladimir Poutine ne voulait pas les laisser prendre plus d’importance. C’est pourquoi sa stratégie de défense de « L’arc chiite » consiste à déstabiliser autant qu’il le pourra les pays sunnites comme l’Arabie Saoudite ou le Quatar…

 

La cybersécurité va connaître un développement encore plus important

 

Dans un environnement plein d’incertitudes, jamais les attaques informatiques contre les entreprises ou les institutions n’ont été aussi importantes. Selon la dernière étude réalisée par le Ponemon Institute, aux Etats Unis, elles ont coûté en 2013 une moyenne de 12,7M$ aux sociétés américaines. Le coût comparable est de 8,1M$ en Allemagne, de 6,9M$ au Japon et de 6,4M$ en France. Les attaques réalisées avec succès ont progressé de 144% depuis 2010. Elles deviennent de plus en plus sophistiquées et prennent beaucoup plus de temps à résoudre.

 

Les deux pays aux avant postes de la guerre électronique sont la Chine où l’unité 61398 de l’Armée Populaire de Libération est chargée de la surveillance permanente des messages électroniques, de l’analyse des informations fournies par les satellites, le travail de décodage…

Le deuxième pays est Israël où l’unité informatique de Tsahal est baptisée C41. Elle est chargée de la cybersécurité des systèmes de l’armée. Elle est entrainée à penser différemment et à chercher dans des endroits où on ne regarde pas habituellement. Le meilleur exemple de la capacité des israéliens dans ce domaine est le fait que IBM ait racheté Trusteer pour 630M$. Cela constitue la dixième acquisition de la société américaine dans le pays.

 

Un certain nombre de sociétés sont très actives pour faire évoluer le vieux système « login/password » à partir de l’identification biométrique notamment. Personne ne peut changer ses empreintes digitales, ses yeux, son visage…

 

L’univers d’investissement comprend de nombreuses sociétés notamment :

Aux Etats Unis : Aruba Networks (US), Barracuda (US) , Check Point (US/Israël), Cisco Systems (US),EMC Corp (US), Fire Eye (US), Hewlett Packard (US), IBM (US), Intel (US),), Fortinet (US), Palo Alto Networks (US), Splunk (US), Symantec (US), Vmware (US) ;

En Europe : Experian Group (UK), Gemalto (France), Hexagon AB (Sweden), Ingenico (France), Ultra Electronics (UK), Wirecard (Allemagne) , Worldline (France) ;

En Asie : Qihoo (China), Trend Micro (Japan), NTT Data (Japan),

 

 

Auteur: Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Bordeaux, titulaire d’une licence en droit de l’Université de Paris X. Il a été successivement fondé de pouvoir à la charge Sellier, puis associé chez Nivard Flornoy, Agent de Change. En 1987, il est nommé Executive Director chez Shearson Lehman Brothers à Londres en charge des marchés européens et membre du directoire de Banque Shearson Lehman Brothers à Paris. Après avoir été directeur général associé du Groupe Revenu Français, et membre du directoire de Aerospace Media Publishing à Genève, il a créé en 1996 Concerto et Associés, société de conseil dans les domaines de le bourse et d’internet, puis SelectBourse, broker en ligne, dont il a assuré la présidence jusqu’à l’ absorption du CCF par le Groupe HSBC. Il a été ensuite Head of Strategy de la société de gestion Montpensier Finance.

2 Commentaires

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  • Adrien

    17 octobre 2014

    Bonjour,
    Question peut être bête mais je ne comprends la phrase suivante: »Les pays producteurs de pétrole qui sont confrontés simultanément à une baisse du baril et à une hausse du dollar sont dans une situation très difficile ». En quoi la hausse du dollar est elle négative pour les pays producteurs de pétrole? Le pétrole étant traité en dollar, toute hausse de cette devise se traduit par une hausse des revenus en devise locale pour les pays producteurs, non?
    Cdt

    Répondre
  • Roger Duberger

    16 octobre 2014

    Cher Monsieur Netter,
    Merci pour ce cliché panoramique de l’économie mondiale et pour les pistes d’investissement. Les marchés sont un peu nerveux et cela pourrait s’aggraver d’ici la fin du mois. Beaucoup d’incertitudes pèsent : « des revendications salariales latentes en Chine », Hong kong avec des étudiants plein de civisme mais rebelles, les cours du pétrole qui vont faire du yoyo, le bourbier Ukrainien, la fin du quantitative easing, Ebola, la Grèce…Beaucoup de paramètres qui ne plaident pas en faveur d’une grande visibilité !
    Bien cordialement

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