15 octobre, 2012

De l’ineptocracie comme systéme de gouvernement

Il y a quelques mois, j’ai écrit un article pour notre IdL dans lequel je rappelais les trois justifications intellectuelles qui pouvaient être apportées au prélèvement de l’impôt.

 

L’impôt pouvait être levé pour payer des dépenses afférentes :

1.       Au défraiement des services Régaliens que l’Etat offre et qu’il peut SEUL offrir  (Défense, Justice, Police, Diplomatie…), ce qui correspond peu ou prou aux recommandations des Lumières à la fin du XVIII eme Siècle. Pas de discussion possible si ce n’est sur la façon la plus efficace de prélever ces impôts, c’est à dire sur celle qui gênera le moins possible le processus productif.

2.       Pour investir  dans des secteurs  ou le secteur privé ne peut ou ne veut aller. Ici l’on peut penser à des choses comme la construction d’infrastructures diverses et variées, pas immédiatement rentables au niveau de l’infrastructure elle même mais très rentables au niveau de la communauté en raison des externalités qu’elles comportent.  On peut penser aussi à des usines d’armement qui serviront à la Défense Nationale ou à l’école Polytechnique. Voila qui est déjà beaucoup plus discutable comme concept, mais enfin on peut en discuter entre gens de bonne compagnie.

3.      Pour faire régner la “Justice fiscale” et « l’EGALITE” (Voir le grand discours à ce sujet de notre nouveau Président) et la, on ne peut s’empêcher d’être inquiet, très inquiet. Hayek avait coutume de dire que plus de gens avaient été ruinés ou massacrés par des hommes politiques qui cherchaient cette “justice SOCIALE” que par n’importe quoi d’autre dans l’histoire  ( Savonarole à Florence, Robespierre, URSS, Chine de Mao, Vietnam, Cambodge, Ethiopie etc.), tant ce concept est fumeux, anti économique et s’appuie exclusivement sur le pire des sept péchés capitaux, l‘Envie . Tous les sociologues savent en effet qu’une Société ou  L’ENVIE se donne libre cours ne peut qu’exploser et en cela ils rejoignent l’un des dix commandements ” Tu n’envieras ni la femme ni la maison de ton voisin“.

Comme on faisait remarquer au Président Obama qu’une augmentation d’impôts qu’il préconisait allait amener à des recettes fiscales en baisse, il avait répondu:

“Je le sais, mais c’est une question de “justice sociale”.  Plutôt le chômage que l’injustice sociale telle que JE la définis”, telle est la pensée dominante des gens qui croient à cette calembredaine. L’on passe la comme chacun peut le voir d’une conception de l’impôt qui sert à payer les fonctionnaires  ou des investissements à une conception qui cherche à punir les ennemis politiques, ou le fait que l’on soit né laid et bête,  ou les deux à la fois et l’on quitte donc la Démocratie pour rentrer dans la Démagogie.

La France qui hésitait depuis bien longtemps entre la deuxième et la troisième conception vient de faire un pas décisif vers la troisième, et cela va être lourd de conséquences fort douloureuses tant pour notre Démocratie que pour notre Economie.L’un des signaux forts qui vient de nous être donnée de ce passage est le débat sur l’impôt sur  les plus values.

Je m’explique.

Les “plus values” étant  moins imposées que le “revenu”, cette différence est apparue comme une insulte à la réalisation de l‘égalité ex post, principe philosophique essentiel qui unit Pohl Pot, Castro, notre cher Président et bien d’autres bienfaiteurs de l’humanité.

Il faut dans leur esprit que tout soit taxé de la même façon… à revenu égal, impôt similaire et pourtant cette égale taxation est une insulte  à l’économie, à l’intelligence et en fin de parcours à …la Justice elle même  .

Prenons trois contribuables qui tous les trois gagnent 200.000 euro par an.

  • Le premier, monsieur Jospin par exemple, (ou monsieur Juppé) ont fait don de leur personne a la France et ont déchargé avec honneur  les responsabilités les plus importantes, Premier Ministres, Ministres , Inspecteurs des finances, Maire de telle ou telle grande ville, député, Président de Parti politique …Comme récompense, la République leur octroie à tous les deux une série de pensions de retraite dont j’imagine assez facilement que la somme cumulée ajoutée aux avantages en nature (voitures de fonction, appartements de fonction etc.) doit bien se monter à 200.000 Euro par an . Mentionnons de plus qu’en tant que Président de nombreuses commissions “Théodule” , du style de la commission sur l’éthique créée par monsieur Hollande , ils peuvent faire nommer des membres de leur famille à tel ou tel poste, rémunéré par la République, c’est a dire par nos impôts, ou bien faire attribuer un appartement  à des conditions tout à fait intéressante à l’un de leurs proches . Ces braves gens n’ont besoin de faire aucune épargne, puisque tous ces traitements sont garantis par l’Etat et indexés sur l’inflation. Leur 200.000 Euro correspondent donc à une RENTE à vie dont leur conjoint continuera à toucher une partie si par hasard ils venaient à mourir avant leur compagne, qui étant souvent la deuxième,  tend a être beaucoup plus jeune qu’eux.

 

  • Le deuxième, un cadre d’un niveau élevé est arrivé à ce haut niveau de rémunération à la force du poignet. Ce salaire lui est garanti tant qu’il n’est pas  viré, remplacé par un jeune Turc plus compétent et moins cher ou que sa société ne fait pas faillite, auquel cas il aura droit aux indemnités de chômage pendant assez peu de temps, ne pouvant retourner dans son “corps d’origine” comme nos chers fonctionnaires  lorsqu’ils sont battus aux élections. D’ou nécessité de se constituer une épargne, (un capital) pour pouvoir faire face a des situations dans le futur dont chacun d’entre eux  sait pertinemment qu’elle peut devenir très dangereuse à tout moment , Ce cadre , après avoir payé des impôts sur le revenu devra payer des impôts sur le capital, sur les revenus du capital et sur les plus values éventuelles qu’il aura réalisé sur ses investissements, ce qui rend la constitution de ce capital quasiment impossible.

 

  • Le troisième est un entrepreneur qui a créé et dirige une entreprise. Apres avoir payé tous les salaires, couvert toutes les charges, réglé tous les impôts (toutes depenses CERTAINES), à partir d’un chiffre d’affaire qui lui est totalement INCERTAIN (les clients ne vont chez lui que parce qu’ils le veulent bien, il ne peut pas envoyer les gendarmes pour les forcer a acheter chez lui), il lui reste a la fin de l’année au titre des profits 200000 euro, qui pourront être 400000 l’année suivante ou 0 , voir une perte l’année d’après. Il lui faut donc mettre en réserve la plus grosse partie de ces 200000 euro pour pouvoir faire face à une ou plusieurs années déficitaires au cas ou cette possibilité  se présenterait .

Si monsieur Hollande dans sa recherche de l’égalité décide de taxer ces trois hommes de la même façon, je soutiens que c’est à la fois injuste, idiot et que cela va amener notre économie dans un désastre sans précédent.

 

 

  • Injuste, parce que messieurs Jospin et Juppé sont CERTAINS de toucher leurs 200.000 euro jusqu’a la fin des temps, ce qui est loin d’être le cas des deux autres.

 

  • Dangereux, parce que si le cadre sait qu’il peut être viré à tout moment et qu’il ne peut pas se constituer une épargne de précaution pour faire face à cette éventualité, il va vouloir aller se faire taxer ailleurs, sous des cieux plus cléments (a Londres ou a Hong-Kong) et cette épargne ne sera plus recyclée en France. Comme sur le long terme , l’épargne est égale à l’investissement (i=s), cette baisse du taux d’épargne va déclencher une baisse du taux d’investissement et donc une baisse structurelle du taux de croissance et une hausse toute aussi structurelle du chômage.

 

  • Désastreux, parce que, si notre entrepreneur ne peut mettre en réserve que 100.000 euro  (taux d’imposition à 50%) à la place des 200.000 qu’il avait gagné, lors de la prochaine récession, son entreprise ne pourra peut être faire face à la baisse du chiffre d’affaire et il devra déposer le bilan mettant à la porte non seulement notre cadre mentionné plus haut mais aussi tous les autres employés.

Considérer donc que ces trois revenus doivent être imposés de façon équivalente est à la fois, injuste, inefficace dangereux et stupide.Dans un pays normal, c’est à dire dans un pays non gouverné par des fonctionnaires qui gèrent bien sur à l’avantage exclusif des… fonctionnaires, messieurs Jospin et Juppé seraient taxés à 50 % au moins, notre cadre à 25 % au plus et notre entrepreneur pas du tout surtout si et quand il revend son entreprise dans laquelle il a investi tout son capital et tous ses efforts depuis toujours.

Un système fiscal qui ne prend pas en compte pour la détermination du revenu le RISQUE pris par les agents économiques est à la fois monstrueux économiquement et profondément immoral.Un tel système ne peut qu’amener le pays qui le suit à la ruine et à des troubles sociaux gigantesques.

 

Voila ou nous emmène CERTAINEMENT la politique de monsieur Hollande.

Voila qui m’attriste énormément.

En fait la France est en train de devenir une Ineptocracie, telle que définie par une scientifique anglaise
” L’ineptocracie est un système de gouvernement où les moins capables de gouverner sont élus par les moins capables de produire et où les autres membres de la société les moins aptes à subvenir à eux-mêmes ou à réussir, sont récompensés par des biens et des services qui ont été payé par la confiscation de la richesse et du travail d’un nombre de producteurs en diminution continuelle. ”

On en rit de peur d’en pleurer.

Auteur: Charles Gave

Economiste et financier, Charles Gave s’est fait connaitre du grand public en publiant un essai pamphlétaire en 2001 “ Des Lions menés par des ânes “(Éditions Robert Laffont) où il dénonçait l’Euro et ses fonctionnements monétaires. Son dernier ouvrage “Sire, surtout ne faites rien” aux Editions Jean-Cyrille Godefroy (2016) rassemble les meilleurs chroniques de l'IDL écrites ces dernières années. Il est fondateur et président de Gavekal Research (www.gavekal.com).

1 Commentaire

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  • Serge Lamielle

    29 octobre 2012

    Cher Monsieur,
    Je partage tout à fait votre point vue. Je pense depuis longtemps que si les pensions de retraites, et notamment celles des fonctionnaires, qui sont calculées sur leurs derniers mois d’activité, étaient traitées comme des rentes futures,et prises pour leur montant actualisé dans le calcul de l’impot sur la fortune, il y aurait longtemps que celui-ci aurait été abrogé. Par ailleurs la démocratie de l' »envie » comme corollaire de la pensée socialiste, a été très bien décrite déja au XIX éme siècle par Nietzsche.

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