25 avril, 2019

Chroniques de la fin de l’augmentation des dépenses publiques

 

 

Aucun effort sérieux de réduction des dépenses publiquesn’a été entrepris en France depuis cinquante ans.  Tout l’appareil productif a été mis en France au service du financement du secteur public et des dépenses sociales dans le cadre d’un système extrêmement dispendieux de redistribution peu contrôlé et sans véritable culture d’efficacité.

 

Plusieurs organismes ont été créés en plus de la Cour des Comptes ces dernières annéespour aider les gouvernements de droite et de gauche à gérer le problème. Le Conseil National des Finances Publiques était composé de personnalités indépendantes et disposant d’experts pour porter un jugement sur les dépenses de l’Etat et de la protection sociale. Il devait être bâti sur le modèle du “Congressional Budget Office” américain. Il a été remplacé par le Haut Conseil des Finances Publiques composé de 33 membres.  Il se réunit deux fois dans l’année. On ne peut pas dire que les résultats obtenus soient très marquants.

 

La France reste championne des dépenses socialeset la diminution des dépenses publiques imposerait de revisiter toutes les fonctions de l’état qui sont toutes sans exception moins onéreuses en Allemagne que chez nous. Les dépenses d’éducation, sont mieux gérées en Allemagne. Elle parvient à payer ses enseignants 35% de plus qu’en France alors qu’ils sont plus nombreux.

Le dossier des intermittents et techniciens du spectacle, a beau être dénoncé depuis des années pour ses dérives massives. Rien ne se passe alors que ce régime est lourdement déficitaire.

La pénurie de logement n’a jamais été comblée depuis l’abbé Pierre malgré mille dispositifs, dix mille décrets, cent mille déclarations de ministres et des dépenses publiques deux à trois fois supérieures à celle des autres pays…

 

Depuis dix ans la dérive des comptes publics s’est emballée, écrivait Michel Pébereau en 2006. La France à cette date était le pays de l’Union européenne dont le taux d’endettement avait augmenté le plus vite. Cette dérive était d’autant plus préoccupante que les dépenses accumulées n’ont pas servi à renforcer notre potentiel de croissance mais ont eu pour effet de reporter nos dépenses actuelles de santé et d’indemnisation du chômage sur les générations futures. Son livre « La France face à sa dette »avait connu un bon succès.  La dette publique était de 1 138 milliards d’euros en 2005, soit 41 000 euros par ménage, soit à l’époque 45 milliards d’euros d’intérêts à rembourser chaque année, ce qui représentait l’intégralité des recettes de l’impôt sur le revenu. Aujourd’hui elle a dépassé 2300 Md€ Pour lui, si la tendance se prolongeait sans aucun changement, il devenait tout à fait possible que l’on assiste à la banqueroute de la France….

 

La dépense publique française dépasse celle des 18 autres pays de la Zone Euro de 9 points de PIB et celle de l’Allemagne de 12 points de PIB. C’est un constat sans appel que dresse Christian Saint Etiennedans « Baisser les dépenses publiques et réindustrialiser la France ».Les dépenses de retraite atteignent 14 points de PIB. Il n’y aura donc pas de baisse de la dépense publique sans réforme des retraites.  Il conviendrait selon lui de ramener les 42 régimes de retraite existants à 3 régimes destinés aux fonctionnaires, aux salariés, aux indépendants. Une réforme des retraites permettrait d’économiser 25 Md€ sur 6 ans.

 

Comment baisser la dépense publique.La feuille de route a de nombreuses fois été expliquée par Agnès Verdier-Molinié, notamment dans Valeurs Actuelles. Elle prévoit cinq étapes :  1/ Décaler l’âge de départ à la retraite à 65 ans d’ici 2028 en reportant d’un quadrimestre pour tous les salariés à partir de 2020 (=10 Md€ d’économies); 2/Aligner les modes de calcul des pensions publiques et des régimes spéciaux sur le régime général (= 2Md€ d’économies); 3/ Supprimer le supplément familial de traitement que les fonctionnaires touchent en plus de leurs allocations familiales (=plus d’1 Md€ d’économies); 4/ Augmenter le temps de travail dans les trois fonctions publiques à 1718 h par an (= 6Md€ d’économies); 5/ Fusionner toutes les allocations sous condition de ressources en une allocation sociale unique et plafonnée (= plusieurs Md€ d’économies)

 

Désormais, la dette menace notre démocratie,car celui qui ne peut plus honorer sa dette perd la liberté de disposer de lui-même. Alain Lambertdans « Déficits publics. La démocratie en danger »explique  que chaque enfant nait, en France, surendetté. Alors que sa vie commence à peine, il doit déjà près de 20 000 euros à la société. Un constat brutal, mais bien réel tant les générations précédentes ont usé et abusé des finances publiques. Un tel bilan peut sembler excessif, mais lorsqu’il émane d’Alain Lambert, ancien ministre du Budget il mérite d’être écouté. Comment en est-on arrive la ? A qui la faute ? A la droite, a la gauche ? Aux politiciens ou aux administrations ? Aux cadeaux fiscaux ou a l’excès de dépenses ? La réponse se trouve dans une gouvernance kafkaienne de la France. Il montre aussi que des remèdes existent.

L’histoire montre bien que si l’endettement peut entraîner des effets positifs à la marge, il se solde la plupart du temps par une mise sous dépendance économique du débiteur. C’est ce que montrent bienThomas Flichy de La Neuville et Olivier Hannedans « L’endettement ou le crépuscule des peuples »

 

A force de s’attaquer aux « riches » du privé,on oublie souvent ceux qui s’enrichissent sur le dos de l’État et des contribuables : les politiques, les hauts fonctionnaires, certaines catégories d’agents du service public profitent pleinement des dépenses publiques faites par un État hors-contrôle. C’est tout ce que montre bien le livre de Jean Philippe Delsol et Nicolas Lecaussin« A quoi servent les riches ».Les riches servent-ils à quelque chose à part à être des boucs émissaires faciles dans des campagnes dont les arguments traînent au niveau du caniveau.  Cet essai cherche aussi à démontrer qu’à l’inverse de ce qu’énonce le discours politiquement correct, il faut récompenser l’initiative et favoriser la richesse pour réduire la pauvreté. Plus le nombre de riches augmente, moins on a de pauvres.

 

La France possède le trophée du nombre de fonctionnaires par habitant. Nicolas Lecaussindans « Ce n’est pas l’Europe qui est ultralibérale mais la France qui est ultraétatiste » estime qu’ Emmanuel Macron a eu tort de s’en  prendre à « L’Europe ultra libérale et ouverte à tous les vents », « Une Europe qui ne permet plus aux classes moyennes de bien vivre ». Il y a une Europe favorable à la concurrence et à la discipline budgétaire. Un chef d’entreprise français paye pratiquement 100% de charges sur un salaire net. Pour son équivalent slovaque ou roumain c’est la moitié. Quant à l’écart avec l’Allemagne il est de vingt points. Les contribuables français financent les dépenses publiques à hauteur de 57% contre 46% pour la moyenne européenne..

 

Avec 57% consacré à la dépense publique on est encore très loin du libéralisme. La liberté se nourrit d’un héritage, d’une langue, d’une éthique, dont la déconstruction qui a pourtant été opérée depuis cinquante ans au nom de l’émancipation individuelle ne peut mener qu’à une aliénation définitive. Le propre de cette génération c’est l’immense ingratitude qui se complait à déconstruire la culture dont elle a pourtant reçu toute sa liberté. François Xavier Bellamydans « Les déshérités ou l’urgence de transmettre »s’insurge contre cette ère de la déconstruction et en appelle à la culture l’autorité et à l’urgence de transmettre

 

Chaque augmentation d’impôt  de un Eurodevrait impérativement s’accompagner d’une baisse des dépenses égale à deux Euros. Telle est la recommandation de Denis Kesslerdans L’Expansiondepuis des années. Cela signifierait une petite rigueur pour le contribuable et une grande austérité pour les services publics. Sans cette potion amère, la France pourrait voir les taux des emprunts d’état augmenter de deux points et passer de 3 à 5% sur le total de la dette soit l’équivalent de l’impôt sur le revenu.

 

 

 

Auteur: Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Bordeaux, titulaire d’une licence en droit de l’Université de Paris X. Il a été successivement fondé de pouvoir à la charge Sellier, puis associé chez Nivard Flornoy, Agent de Change. En 1987, il est nommé Executive Director chez Shearson Lehman Brothers à Londres en charge des marchés européens et membre du directoire de Banque Shearson Lehman Brothers à Paris. Après avoir été directeur général associé du Groupe Revenu Français, et membre du directoire de Aerospace Media Publishing à Genève, il a créé en 1996 Concerto et Associés, société de conseil dans les domaines de le bourse et d’internet, puis SelectBourse, broker en ligne, dont il a assuré la présidence jusqu’à l’ absorption du CCF par le Groupe HSBC. Il a été ensuite Head of Strategy de la société de gestion Montpensier Finance.

10 Commentaires

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  • Ockham

    29 avril 2019

    Quand les enseignants se font braquer, c’est normal; quand une école devient un lieu de racket, c’est normal, quand un policier tape c’est une une faute bien que la manifestation soit interdite, que les voitures brûlent, que les magasins flambent; quand ….le policier se flingue. C’est normal la solution est claire il faut mettre une cellule de psychologie dans chaque commissariat! D’ailleurs le soldat, donc militaire armé, devant le Bataclan a eu l’interdiction de tirer (dixit le ministre socialo-communiste de l’époque) ! C’est normal. Donc tout est normal. Descendons encore une marche. Des fonctionnaires psychologues sont là ou vont être recrutés pour le maintien du moral des enseignants dédoublés, des forces non agressives du maintien de l’ordre augmentée et de forces militaires non agressives de protection des frontières. Déficit? C’est quoi! Encore un mot raciste, antisocial, peut-être même islamophobe. Incohérent? Oui.

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  • On se calme

    29 avril 2019

    Bonjour,

    on sait qu’Agnès Verdier-Molinié a une dent contre le SFT (supplément familial de traitement) : est-ce à dire qu’elle veut défoncer les familles (très) nombreuses de cadres, souvent militaires, ou autres, qui donnent actuellement au pays de rares citoyens éduqués et désireux de servir les autres ?

    Cordialement

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  • On se calme

    29 avril 2019

    Bonjour,

    vous n’imaginez pas combien de cadres du service public luttent contre la gabegie et sont entravés dans leur management, non pas par le statut des fonctionnaires (qui permet un sain management), mais par le simple manque de courage à haut niveau, et par les changements de politique.

    Vous ciblez les hauts fonctionnaires, mais lorsque ceux-ci seront encore plus sous-payés, à niveau égal de formation, que le privé, vous vous retrouverez avec des interlocuteurs qui vous en feront voir de pires que maintenant …

    C’est vraiment curieux de voir combien le milieu libéral est inapte au dialogue avec la sphère publique, et que son unique objectif est de l’amoindrir.

    Pourquoi mes commentaires ne sont-ils pas publiés ?

    Bien à vous

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  • marc

    27 avril 2019

    Pour parlez cru : c’est cuit.

    A part la guerre, la France ne remonteras pas, trop de socialo-communiste en France.
    En France tout le monde peste contre les riches, en Chine pays soit disant communiste, tout le monde veux devenir riche, y’a pas une personne qui peste contre les riches.

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  • Philippe

    26 avril 2019

    A votre 6eme paragraphe il faudrait ajouter le Patrimoine de l’ Etat.
    Selon une etude de 2004 Eric Pichet in Politiques et Management Public , no.23-2 p.119 il etait negatif de 1400 Mds (2500 Mds dettes – 1100 Mds actifs ) . Neanmoins comme personne n’ a l’ audace de sommer l’ Etat de cesser sa gabegie , nous pourrions ( les citoyens plutot que les creanciers qui eux sont déjà titrés en OAT ) lui retirer une tranche de son patrimoine , et la céder au plus offrant .
    Ce serait la reédition de la confiscation des Biens Nationaux du 2 novembre 1789.l’ Etat étant un nouveau clergé , abusant de son role , je ne vois que du bien a lui faire rendre gorge .

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  • Normandie

    26 avril 2019

    Vivement que le mur arrive!

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  • Jean DOREMIEUX

    26 avril 2019

    Je vous demande à vous tous aussi je vous demande, si cette occultation de la situation financière et fiscale de notre pays, que nous avons tous constaté lors du grand oral du 25 avril 2019, est véritablement voulue par le Président et par ses conseillers ou seulement évitée pour ce public de journalistes complices et peu formés à ces considérations ?

    Ou si, mais ce serait épouvantable, on peut soupçonner que MACRON, d’après son parcours scolaire, n’a pas reçu les bons conseils et une culture économique suffisante pour parler de ces sujets au poste qu’il occupe et dans la situation inédite de cette nouvelle sorte de conférence de presse ?

    Est-il conscient des effets catastrophiques d’une épargne effondrée par la disparition d’un véritable taux d’intérêt ? Quand l’épargne devient inutile pourquoi Monsieur MACRON demander « aux français de travailler plus et plus longtemps pour gagner … moins » ?

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    • Robert

      6 mai 2019

      Sans me faire l’avocat du diable, ce n’est pas Macron qui est responsable des taux d’intérêts négatifs ! Il fait suffisamment de dégâts en France, inutile de lui imputer une situation générée par la finance internationale…

  • Jean DOREMIEUX

    26 avril 2019

    Oui « La France reste championne des dépenses sociales et la diminution des dépenses publiques imposerait de revisiter toutes les fonctions de l’état qui sont toutes sans exception moins onéreuses en Allemagne que chez nous. J’y ai vécu 45 ans marié à une allemande ophtalmologiste. Je confirme et complète.

    Votre citation : « Les dépenses d’éducation, sont mieux gérées en Allemagne. Elle parvient à payer ses enseignants 35% de plus qu’en France alors qu’ils sont plus nombreux. » Je confirme : Mon fils y été élève, je confirme.

    Les assurances sociales sont mieux gérées : aucun déficit depuis 1882, des cotisations par tête de 15 % inférieures aux nôtres, des professionnels de santé deux fois mieux rémunérés en tiers payant trimestriel, des médicaments tous payés 100 % aux pharmaciens distributeurs, des Heilpraktiker (guérisseurs diplômés) payés par toutes les Kassen. Pas de ticket modérateur, donc pas d’assurance complémentaire santé. Le plus important étant que les affections sont traitées dès leur apparition, ce qui diminue les dépenses d’une façon considérable. Comment ? Pas besoin de rendez-vous, vous êtes pris dans la journée tous les examens nécessaires au diagnostic immédiat étant réalisés dans la séance, les médecins apprenant les actes complémentaires qu’ils prescrivent et les réalisant dans la journée sans aucune restriction de cumul d’actes.

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  • jean SEGUR

    26 avril 2019

    Bonjour,

    Non un réquisitoire sur un pays, mais sur un cercueil.

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