5 juillet, 2016

Bruxelles tient Londres par les bourses…

L’idée que le peuple pense mal revient en force. Seule l’élite serait habilitée à penser.  Ceux qui on voté pour le Brexit sont « des nains de jardin » (Bernard-Henri Lévy), « les bobos qui regardent Downtown Abbey » (Alain Minc) , « le soi-disant peuple qui prend des décisions irréfléchies » (Jacques Attali). En un mot ce sont des abrutis incultes qui n’auraient pas compris la portée de leur vote. Une telle posture a déjà permis avec succès à de nombreuses institutions européennes de contourner le vote des peuples…

 

La démocratie directe existe, on ne peut pas mépriser en permanence le « Tiers Etat ». Il ne faut pas enterrer les Nations et les Peuples. C’est bien ce qui a été fait sur les billets de banque en Euro sur lesquels on a remplacé « les grands hommes » par des aqueducs et des ponts. Si les élites sont devenues illégitimes, c’est qu’elles ne proposent aucune vision. Il faudrait de vrais  débats : un sur le type d’Europe que nous voulons (marché ou politique), un autre débat sur le type de croissance, un débat enfin sur la place des nations en Europe. Le rêve de Jean Monnet « d’une course sans retour vers les Etats Unis d’Europe » a vécu. L’Europe n’est pas binaire, Il n’y a pas que l’intégration  et ou le fédéralisme…

 

La politique monétaire déclenchée depuis de nombreux mois n’a qu’un effet marginal sur la croissance économique. Tout le monde l’a constaté. Les politiques keynésiennes se caractérisent par le fait que si quelque chose ne donne pas les effets escomptés, au lieu d’arrêter, il faut en faire encore plus. Le Brexit va donc fournir le prétexte à la BCE pour acheter des papiers de moins bonne qualité. Cela va devenir utile pour refinancer les banques italiennes. Il semble que les fonds de pension des pays du nord pourraient bientôt emprunter de l’argent à taux quasi zéro pour l’investir en obligations souveraines des pays du sud de l’Europe. Des fonds de pension qui empruntent de l’argent c’est l’inverse de l’épargne longue. C’est la conséquence des taux zéro où le futur devient plus certain que le présent. On n’avait jamais vu cela !

 

La loi Travail devient un monstre législatif. La France de François Hollande est à deux doigts de l’embrasement. On est au bord de la guerre civile. La France est secouée par une insurrection sociale ponctuée de grèves hebdomadaires avec des actes de violences et de vandalisme. La CGT a basculé dans le terrorisme syndical. Il y a dans « l’ultra gauche » une montée de violence quasi armée dont les grands médias rendent assez peu compte.

 

Le CICE n’a pas permis « d’inverser la courbe du chômage ». Dans la perspective des élections présidentielles, François Hollande utilise maintenant l’arme de la démagogie à tous les étages avec l’annonce de nombreuses promesses qui ne sont pas financées. Les mesures électoralistes pour les fonctionnaires (dégel du point d’indice, nouvelles grilles salariales, hausse des effectifs…)  vont coûter extrêmement cher. Au moment où l’endettement  de la France atteint désormais 97,5% du PIB, ce sont des mesures absolument irresponsables…

 

Brouillard sur la manche, le continent est isolé 

 

L’économie britannique devrait terminer l’année dans le rouge. Il va se produire un choc déflationniste important.  L’avenir radieux annoncé par les partisans du Brexit  se traduit pour le moment par une dégradation financière du Royaume Uni par les agences de notation comme  Fitch, pour qui la note a été abaissée à « AA avec perspectives négatives ». Le Congrès du parti conservateur se réunira en octobre à Birmingham. Theresa May semble la mieux placée pour devenir le prochain premier ministre. Elle  sera obligée de  proposer un modèle moins éloigné du « Remain ». Le Royaume Uni est pour le moment le troisième contributeur net au budget de l’UE à hauteur de 4,9Md€ après l’Allemagne (15,5) et la France (7,1).

Elle fera tout pour que les marchés restent à Londres et que les sociétés implantées au Royaume Uni continuent de bénéficier du « Passeport Européen ». Comme le disent avec humour les traders londoniens, « Bruxelles tient Londres par les bourses ».

 

Si le Brexit ne se produit pas certaines  actions anglaises sont attractives. notamment celles qui exportent le plus vers l’Europe continentale sont devenues attractives dans l’hypothèse où les futures négociations permettront à la Grande Bretagne de conserver au moins en partie l’accès au marché unique. Dans cette perspective, il faut mieux choisir des sociétés spécifiques plutôt que d’acheter des ETF qui répliquent un indice. Dans le cas de l’indice FTSE 100 par exemple, il y a trop de banques et de sociétés de matières premières. On peut retenir en revanche :  Shanks Group (74% du chiffre d’affaire en Europe), Man Group (66%), Thomas Cook Group (65%), Vodafone (58%), Bodycote (57%), Computacenter  (54%), Kingfisher (40%), Imperial Tobacco (40%), WPP (34%).  Mais la baisse de la Livre n’est pas terminée….

 

Auteur: Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est diplômé de l’École Supérieure de Commerce de Bordeaux, titulaire d’une licence en droit de l’Université de Paris X. Il a été successivement fondé de pouvoir à la charge Sellier, puis associé chez Nivard Flornoy, Agent de Change. En 1987, il est nommé Executive Director chez Shearson Lehman Brothers à Londres en charge des marchés européens et membre du directoire de Banque Shearson Lehman Brothers à Paris. Après avoir été directeur général associé du Groupe Revenu Français, et membre du directoire de Aerospace Media Publishing à Genève, il a créé en 1996 Concerto et Associés, société de conseil dans les domaines de le bourse et d’internet, puis SelectBourse, broker en ligne, dont il a assuré la présidence jusqu’à l’ absorption du CCF par le Groupe HSBC. Il a été ensuite Head of Strategy de la société de gestion Montpensier Finance.

5 Commentaires

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  • sassy2

    6 juillet 2016

    Ca me fait penser a suez : l expedition a avorté car les americains ont defoncé la livre et le franc. Cette fois cela sera different. L anglo est courageuse: elle a osé devancer le debut de la fin de la fed et le blockchain et la contraction voire implosion des banques credit monnaie. Cela m a fait penser a un autre truc aussi, notamment apres avoir lu metivet et assisté a la retro indicielle: la drole de guerre. Plus que jamais, ne vous en deplaise MAGA!!!! Let s build the f*cking wall, and attali minc bhl hollande and merkel are gonna pay for it!

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  • Darlcity

    6 juillet 2016

    Il se pourrait bien que Londres est prête à affronter de mauvais temps pour un objectif plus profond, « la Libertad!! ». Depuis quand donne-ton la gouvernance, via referendum, au peuple « le plus réticent d’Europe », après la leçon du NON du peuple français en 2005 ??
    Depuis que l’on souhaite s’affranchir de toute le monde, et notamment de son partenaire, la une grosse sangsue, les USA. Pendant que Tony blair en remet une couche avec ces regrets de mensonges de la guerre d’irak 15ans plus tard, message indirect au peuple : « forcé par les USA »,
    la City fait les yeux doux à la monnaie chinoise.
    Je me demande quelle est ville qui est actuellement la plus furieuse de Brexit,
    Berlin ou Washington.

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    • Jean

      8 juillet 2016

      Oui mais Deutsche Boerse vien d’acheter LSE, et essaie de ramener le London Stock Exchange à Francfort, et on dirait que après les contrat signés il y a quelque jour par les Allemand avec les Chinois pour la Route de la Soie, c’est Berlin qui va gagner et devenir le Hub du Yuan en Europe.

  • Leon Brumet

    6 juillet 2016

    Cher Monsieur,

    Excellent article comme toujours. Petite question: Comment expliquez-vous cette déflation ? Je n’arrive pas à trouver la logique.

    Merci beaucoup.

    LB

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  • nolife

    5 juillet 2016

    « Il va se produire un choc déflationniste important.  »

    Ils vont nous exporter de la déflation ? Est-ce si mal que ça ? Ils nous donnent de la déflation et on leur donne de l’inflation, personnellement, je suis preneur.

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