31 octobre, 2013

Un pas en avant, deux pas en arrière et quoi d’autre ?

Pour une fois, je voudrais partager avec vous quelques propos un peu décousus à chaud au retour de 4 jours en Europe, Paris et Londres.Mais on ne séjourne pas impunément en Europe, et l’environnement vous saisit à la gorge.

Paris vit au rythme des couacs de la non Présidence. Les sujets sérieux sont écartés comme trop délicats à traiter, et surtout risqueraient d’indisposer telle ou telle chapelle de la « majorité plurale ».

J’ose affirmer et je sais que cette remarque déclenchera l’ ire de certains lecteurs, l’existence de similitudes avec les dernières semaines de la Présidence Morsi en Egypte, des décisions annoncées, puis aussitôt retirées, dans l’embarras.

Une impression de grand amateurisme, qui s’explique en partie par l’absence de « leadership »,un Chef de l’Etat, soucieux de n’indisposer en rien ses soutiens, mais qui irrite et désespère certains de ses plus proches fidèles.

Un gouvernement sans cohésion, ou les ambitions et les médiocrités s’affrontent sans respect ni déférence pour un premier ministre qui n’a pour lui que son passe de maire, puis président de groupe parlementaire, ce qui est clairement  insuffisant.

Comme je l’ai déjà écrit sur le site de l’IDL, je pense néanmoins que les socialistes garderont l’essentiel des leviers de contrôle, car il n’y a aucune alternative de gouvernement pour leurs être substituée. Les prochaines consultations électorales, municipales et européennes, les placeront sans doute derrière le Front National, et l’UMP, mais à ce stade, je ne vois aucune alternative à Francois Hollande pour la présidentielle de 2017.

Un retour difficile de Nicolas Sarkozy, avec nombre d’affaires non encore jugées, pour lesquelles ses proches sont mis en examen, ou ont un statut de témoin assiste, la guerre des petits chefs et l’ambition des quadras, décrédibilisent à ce stade un schéma un retour de l’UMP aux affaires.

Et un centre autour de Borloo, Bayrou parait bien ringard.

Bref l’opposition dite républicaine doit  se reconstruire en terme de projet, et d’individus, et je doute qu’elle le fera d’ici à 2017 compte tenu de son passe et de ses divisions.

Donc on se prépare un 2002 inverse avec un second tour Hollande Le Pen et la reconduction du sortant. Le cycle économique devrait aider avec une amélioration cosmétique de l’emploi.

Je n’envisage pas à ce stade une « Grécisation » de la France pour une échéance aussi proche, mais je reconnais que c’est une hypothèse que je ne peux écarter totalement.

Notamment du fait des non rentrées fiscales attendues, de l’incapacité de cette majorité à agir sur les dépenses, et du rapport dette sur PNB maintenant à 96%, financée pour les deux tiers par des investisseurs institutionnels étrangers, qui peuvent aisément et rapidement changer de perception.

En 2014, il faudra emprunter au moins, pour la dette de l’Etat, hors Sécurité Sociale, Euros 190 milliards….

Comme les sujets fondamentaux ne sont pas traités, le public, nourri par des media à la recherche d’audience, du fait de la concurrence des réseaux sociaux, se satisfait de débats surréalistes sur la légitimité de l’expulsion d’une adolescente en situation irrégulière.

Et on bloque sur le travail dominical, qui n’a plus de justification que religieuse…

Et le Premier ministre de l’ancienne majorité ne peut désormais être audible qu’en marquant sa différence avec le Nicolas Sarkozy, ou en faisant à l’ infini de la paraphrase sur ses paroles malheureuses à propos du sectarisme en politique.

Incidemment j’apprends que le Club Démocratie 2012 – anime par des très proches du Président Hollande – organise fin Novembre un colloque sur l’attractivité et les atouts de la France. Qu’ils se reportent a l’enquête annuelle Bain American /Chamber of Commerce en France, auprès des investisseurs directs, hors opérations de portefeuille, avec 84% d’opinions négatives, sur les rigidités sociales, la fiscalité, et bien sur le recours quasi systématique a la rétroactivité des mesures législatives et règlementaires, , pratique détestable à laquelle la majorité sortante se livrait également..

Le contraste est frappant avec la Grande-Bretagne.

Le gouvernement de coalition s’est attaqué aux dépenses publiques avec des résultats certains, les effectifs de la fonction publique ont été réduits sensiblement. Et la Banque d’Angleterre mène une politique monétaire sans les contraintes de l’appartenance à la zone Euro.

Je garde le plus préoccupant pour la fin, la montée de l’incivisme .Il ne s’agit pas selon moi que d’un problème de criminalité, d’insécurité.

A lire toutefois « la France Orange mécanique » qui recense bon nombre d’incidents graves et préoccupants dont les causes profondes ne sont ni analysées ni remédiées même partiellement.

Mais la méfiance vis-à-vis de l’autre, la non intégration de l’immigration, la ghettoïsation de zones importantes des périphéries urbaines, et l’absence d’ascenseur social, se combinent et s’accentuent pour développer un non vécu en commun alors même que la philosophie officielle à droite comme à gauche préconise le non communautarisme laïc et républicain.

Face à ces phénomènes, ce que j’appréhende est bien une radicalisation des comportements, des désespoirs qui pourraient mener à la violence de rues du fait de l’absence de solutions politiques dans un cadre institutionnel décrédibilisé.

 

 

 

 

 

 

 

Auteur: Jean-Claude Gruffat

Jean Claude Gruffat est depuis Avril 2020 Managing Director chez Weild and Co, banque d’affaires indépendante présente dans plus de 20 États aux États Unis. Après une carrière dans la banque internationale chez Indosuez, puis Citigroup. Jean Claude Gruffat est le Chairman de Competitive Enterprise Institute, et un board member de Atlas Network, toutes deux think thanks libertariennes domiciliées à Washington DC. Il est également gouverneur de L’American Hospital de Paris. Titulaire d’un doctorat en droit public, et d’une maîtrise de science politique de l’Universite de Lyon, ainsi que ancien participant au Stanford Executive Program, GSB, Stanford University, CA.

18 Commentaires

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  • Jules

    4 novembre 2013

    Mr Gruffat, votre analyse très juste nous rappelle ce que tout un chacun veut oublier, mais que l’Histoire de France révèle : l’incivisme chronique et l’inconscience morale chevillée au corps de tout un chacun. Aggravés d’une violence à peine contenue du citoyen lambda. Ce qui a conduit au paradoxe du collectivisme forcé. Notre peuple est un grand schyzophrène, notre système politique une machine à détruire toute cohésion sociale, les politiques orientant leur discours à prétendre le contraire (sic!). L’actualité montre qu’une fois de plus il n’y aura aucune réforme, et que le changement, ce n’est jamais « maintenant », mais toujours après-demain, dans le désordre, le sang et les larmes. Vive la France … L’entreprise d’IDL qui consiste à réformer les esprits puisse-t-elle réussir à combattre cette récurente inversion des valeurs qui transforme les forces vives de feu la Nation en cerfs modernes au service de la petite bourgeoisie fonctionnaire.

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  • Nicolas

    1 novembre 2013

    François Hollande comme toute sa clique ne sont, selon les mots de Depardieu, que des « petits fonctionnaires socialistes » http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20130111.OBS5199/gerard-depardieu-ce-que-cache-son-coup-de-sang.html

    Il n’y a chez eux nul ambition pour la France, ni pour son peuple millénaire, ni même pour l’Etat.. La médiocrité le dispute à la stupidité et à l’idéologique. Alors qu’il faudrait des réformes, vigoureuses mais Justes, entre sauver la France et sauver les Socialistes, Hollande à choisie. L’Histoire de l’URSS montre que ce n’est pas forcément un bon choix..

    Seul de vraies réformes de DIMINUTION de la fonction public et autre allocation à ActU, et donc de l’impôt sur le K et autre peuvent marcher. Cameron à réduit le pois de l’Etat de plus de 3%/PIB, et créée (ou plutôt permis au marché de créer) UN MILLION d’emplois depuis son arrivé -chiffres que le Labor ne conteste pas.

    Quand au FN, c’est en grande partie des gens de l’UMP déçu, des gens de Mai 81 trompés. Je souhaite que le FN évolue sur les questions économiques. Marine Lepen semble intelligente : qu’elle apprenne l’économie.

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    • Duff

      3 novembre 2013

      Justement elle cherche à se rendre crédible économiquement et son positionnement n’est pas uniquement tactique, il suit le discours du père du 21 avril 2012 : Économiquement de droite, socialement de gauche, ce qui est délirant mais ce que la fille cherche à crédibiliser.

      Puisque ce parti est incapable de nouer des alliances je pense surtout que ses principaux membres se contentent fort bien des émoluments confortables de conseillers municipaux, territoriaux, député européen et tout ce qu’on peut glaner en faisant 20% des voix.

      Ce n’est pas pour rien que le FN ne propose aucune réforme territoriale sérieuse du mille-feuille français…

  • BA

    1 novembre 2013

    PricewaterhouseCoopers (exerçant sous la raison sociale de PwC) développe des missions d’audit, d’expertise comptable et de conseil. Dans un nouveau rapport alarmant, PwC étudie les actifs pourris que les banques européennes ont dans leurs livres.

    Selon lui, les banques européennes avaient dans leurs livres 514 milliards d’euros d’actifs pourris en 2008.

    Fin 2012, elles avaient dans leurs livres 1187 milliards d’euros d’actifs pourris, et ce chiffre va continuer à augmenter dans les années qui viennent !

    Selon PwC, le portefeuille de créances douteuses que les banques européennes devraient chercher à revendre ou à passer en pertes se monte à 2400 milliards d’euros !

    En clair :

    Les banques européennes sont en faillite.

    Les banques européennes sont des banques-zombies.

    Mardi 29 octobre 2013 :

    La valeur des prêts à risque des banques européennes a doublé en 4 ans pour atteindre 1.187 milliards d’euros.

    http://www.express.be/business/fr/economy/la-valeur-des-prets-a-risque-des-banques-europeennes-a-double-en-4-ans-pour-atteindre-1187-milliards-deuros/197795.htm

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    • Nicolas

      1 novembre 2013

      Je vous aime bien BA : toujours de charmante nouvelles !

      Et oui, les banques française sont en faillites.. Risque majeur pour la planète..

  • Libre

    31 octobre 2013

    Ce qui m’inquiète est le peu de sérieux de leurs propositions économiques qui sentent la naphtaline des années 70 avec le programme commun de la gauche (et l’effondrement monumental qui a suivi avec possiblement à la clé l’émergence d’un mouvement réellement d’extrême droite comme « Aube dorée » ou le NPD Allemand)).Le seul point intéressante est la restriction de l’immigration mais la encore je crains que l' »aile dure » ultra-nationaliste prenne le dessus (antisémite et réellement raciste notamment)maintenant il est vrai comme que le niveau culturel et intellectuel de la plupart des électeurs et responsables de ce parti est disons relativement limité.Il y a une chose à ne pas négliger est que ce parti est actuellement l’un des rares a laisser une place réelle à la jeunesse.Moi je ne vois pas une victoire du F.N mais d’extrême justesse sauf si bien entendu les événements dérapaient ( attentat, effondrement de l’euro…).

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  • Roger Duberger

    31 octobre 2013

    Cher Mr Gruffat,
    Merci pour cette analyse très pointue et très juste.
    Il n’y a que pour le second tour des futures présidentielles que je suis en désaccord. Il n’est pas sûr que le FN serait battu et ce qu’écrit David Jeames un peu plus haut est très vrai.
    bien cordialement

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  • jcgruffat

    31 octobre 2013

    Merci pour ces commentaires qui tous contribuent au debat.
    Je n’exagere pas le risque FN, si l’on considere les clivages politiques depuis l’apres Seconde Guerre mondiale, le vote protestataire a toujours oscille entre 25 et 30%.
    Le phenomene nouveau etant que pour certains electeurs, le non programme de gouvernement de Marine le Pen devient une alternative non pas credible mais envisageable.
    Et cei est bien le resultat des echecs et gestion calamiteuse tant de l’ancienne que de la nouvelle majorite.

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    • Nicolas

      1 novembre 2013

      Effectivement, depuis que nous sommes passé de l’Ombre à la Lumière, le FN est apparu.. Brillant Bilan du tout Etat, des délire sur le Métissage et autre solidarité avec un flingue sur la tempe..

  • BA

    31 octobre 2013

    Chômage en septembre 2013 :

    Grèce : 27,6 % de chômage.
    57,3 % de chômage chez les jeunes de moins de 25 ans.

    Espagne : 26,6 % de chômage.
    56,5 % de chômage chez les jeunes de moins de 25 ans.

    Croatie : 17,2 % de chômage.
    52,8 % chez les jeunes.

    Chypre : 17,1 % de chômage.
    43,9 % chez les jeunes.

    Portugal : 16,3 % de chômage.
    36,9 % chez les jeunes.

    Slovaquie : 14 % de chômage.
    31,1 % chez les jeunes.

    Irlande : 13,6 % de chômage.
    28 % chez les jeunes.

    Italie : 12,5 % de chômage.
    40,4 % chez les jeunes.

    Un article à pleurer de rire :

    http://www.liberation.fr/economie/2012/12/10/hollande-la-crise-de-la-zone-euro-est-derriere-nous_866519

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  • Sirius

    31 octobre 2013

    Cher JCG,
    Parfaitement d’accord avec votre diagnostic !
    Quant à l’issue de tout cela, difficile de dire ou on en sera… en 2017.
    En tout cas, rien à attendre de notre classe politique, incapable de penser « out of the (frenchy french) box ».
    Bien à vous,

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  • Poutine7

    31 octobre 2013

    Bonjour,

    Quelques remarques :

    – 1 Faudrait-il que François Hollande et son gouvernement tiennent jusqu’en 2017 ? Au rythme de décomposition du pouvoir, on peut en douter,
    – 2 Le FN a une fonction politique utile : pousser l’UMP à revoir son programme,
    – 3 Ce terme de « pacte républicain » est vraiment de la novlangue, il s’agit juste d’un cartel d’intérêts minables vu le peu de résultats obtenus par nos grands « républicains » depuis 1974 car ils n’ont pu enrayer le déclin de la France

    Répondre
  • Gerald Muller

    31 octobre 2013

    Concernant le FN, il y aura bien un moment où l’UMP, tout calamiteux qu’il soit, saura démontrer que le programme du FN ressemble comme deux gouttes d’eau à celui de Miterrand en 1981: nationalisations, étatisations, rasage gratis (augmentations de toutes sortes non financées, et surtout pas par une diminution des dépenses).
    Il ne reste plus qu’une chose pour le FN: sa position sur l’immigration partagée par la majorité des français.
    Même la sortie de l’euro est très minoritaire.
    Pour le moment le vote FN, faute d’un parti libéral, est la seule façon qu’ont les français, exaspérés, et par la nullité de Hollande et par la cacophonie de l’UMP, de dire qu’ils en ont assez.
    S’il parait évident que ce vote risque de refaire passer la nullité actuelle, on peut espérer un sursaut.

    Répondre
    • Poseidon

      31 octobre 2013

      le programme et les hommes qui composent le « FN » ont bien changé… seule une base « dure » minoritaire perdure.

  • Poseidon

    31 octobre 2013

    Bonjour,

    article et point de vue interessant et partagé Mr Gruffat.
    Je suis néanmoins plus nuancé que vous sur l’issue…. nous irons oui probablement vers un PS/FN en 2017 mais quelle en sera l’issue ! rien n’est sur…. comme vous le disiez une radicalisation que l’on peut aujourd’hui parfaitement comprendre pourrait changer ce qui semble écrit.

    c’est unpeu comme une partie de poker ou la donne va être determinante.

    Répondre
  • David Jeames

    31 octobre 2013

    Je suis globalement d’accord avec vous. Il y a cependant une de vos certitudes que je ne partage pas. Le résultat d’un second tour de la présidentielle Hollande-Le Pen est loin d’être joué d’avance. Et ceux pour plusieures raisons :
    1. Les nouveaux électeurs du FN sont surtout des anciens électeurs de l’extrême-gauche. C’est donc autant de soutiens en moins au deuxième tour pour Hollande.
    2. A droite, des ténors politiques ont déjà annoncé la fin du pacte Républicain contre le FN. S’ils se permettent de dire cela, c’est qu’ils ont analysé que leur électorat se sent plus proches du FN que du PS. Les électeurs de droites seront donc surtout des soutiens au FN au second tour.
    3. Les électeurs du centre, après avoir soutenu Hollande en 2012, seront plus difficile à persuader de refaire de même en 2017. Ils risquent donc de s’absenter.
    4. Il y aura bien quelques abstentions du premier tour qui viendront renforcer le camp du FN au second prônant le «Maintenant ou jamais».
    5. La dédiabolisation du FN aura comme conséquence d’imposer un débat entre Hollande et Le Pen entre les 2 tours – débat que nous n’avons pas eu en 2002 et où Hollande se fera massacrer par Le Pen.
    Hollande va donc se trouver avec le PS déçu, mais s’accrochant comme un seul homme à leur bouée de sauvetage, les écolos refroidis par ce quinquennat, l’extrême-gauche vampirisé par le FN et quelques apparatchiks du centre. Le Pen aura le reste. C’est donc loin d’être gagné.
    Ce qui semble certain par contre, c’est que l’abstention batterra des records.

    Répondre
    • Roger Duberger

      31 octobre 2013

      Bonjour,
      Entièrement d’accord avec votre analyse
      Cordialement

  • Fred

    31 octobre 2013

    Bof. Vouloir instrumentaliser le vote FN pour être sûr de se faire réélire peut parfaitement se retourner contre son auteur. Je ne crois pas une seconde qu’Hollande puisse être réélu…

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