23 novembre, 2017

Qu’est-ce que le choc des civilisations ?

 

Le livre de Samuel Huntington Le choc des civilisations (1996) est paru depuis vingt ans et il continue d’alimenter la réflexion. Généralement, le titre est cité pour être aussitôt démenti : « Il n’y a pas de choc de civilisation » s’exclame-t-on alors. Choc des civilisations, tonner contre, aurait pu dire Flaubert dans son Dictionnaire des idées reçues. Or la pensée de Samuel Huntington (1927-2008) est autrement plus complexe que ce titre slogan. Avant de réfuter l’ouvrage, comme le font certains, il convient d’abord de le lire et d’analyser la réflexion d’Huntington.

 

L’actualité des civilisations

 

Dès son introduction, Huntington rappelle que le paradigme de choc des civilisations est une notion actuelle, valable pour le monde post guerre froide, mais qui n’a pas de validité éternelle. Il s’agit bien de penser le monde qui a émergé de la chute de l’URSS, sans que ces réflexions aient une portée éternelle.

Huntington définit les civilisations comme des ensembles culturels qui disposent d’une culture, d’une histoire, d’une langue et d’une religion partagée. Appartenir à une civilisation, c’est se reconnaître d’elle et non pas d’une autre. C’est se reconnaître Chinois, Japonais ou Européens, être d’ici donc, plutôt que d’ailleurs.

Jusqu’en 1991, le monde était structuré par l’idéologie : le communisme d’un côté, le monde libre de l’autre. Ce paradigme ayant volé en éclats, ce sont les civilisations qui ont pris le dessus. On ne se bat plus pour défendre Marx, mais sa façon de vivre et sa terre. Les civilisations s’entrechoquent donc, et ce choc représente la principale menace pour la paix. Mais elles sont aussi le garde-fou de la paix mondiale. Vouloir effacer les civilisations au motif d’éviter le choc causerait donc un choc encore plus grand :

 

« Les chocs entre civilisations représentent la principale menace pour la paix dans le monde, mais ils sont aussi, au sein d’un ordre international désormais fondé sur les civilisations, le garde-fou le plus sûr contre une guerre mondiale. »

 

Huntington ne souhaite donc pas ce choc, mais il constate que la meilleure façon de l’éviter est de reconnaitre aux civilisations le droit d’exister. Dans le monde nouveau de la mondialisation, la politique globale est civilisationnelle, mais la politique locale est ethnique, nous dit-il. La civilisation à l’échelle du continent, l’ethnie au niveau local. C’est exactement ce que nous constatons dans plusieurs zones du monde, notamment en Afrique et au Moyen-Orient. Pour l’auteur, les conflits n’auront pas lieu entre riches et pauvre, entre groupes économiques, mais entre civilisations. C’est bien ce que fait L’État islamique aujourd’hui. À cette attaque civilisationnelle, nous devons donc opposer une réponse de civilisation.

 

La modernisation n’est pas l’occidentalisation

 

Huntington met en garde contre un danger dans lequel sont tombés de nombreux analystes. Ce n’est pas parce que des cultures se modernisent qu’elles s’occidentalisent. Se vêtir en jeans, boire du Coca et manger au McDo ne signifie pas pour autant acceptation de la civilisation occidentale. Il y a donc disjonction entre l’usage des biens créés par les Occidentaux et adhésion aux valeurs de l’Occident. Cette erreur de jugement a fait croire que parce que certains buvaient des boissons américaines ils allaient aussi accepter la démocratie libérale et les libertés occidentales. L’attentat du 11 septembre 2001 allait doucher ces illusions.

 

Dans le monde musulman, c’est même à un retour en arrière sur l’occidentalisation à laquelle nous assistons. Mustapha Kemal a voulu rejeter le monde ottoman et faire adopter de force l’Occident à sa population : interdiction des vêtements ottomans pour rendre obligatoire le port de vêtement occidental, nourriture, style architectural, droit, écoles, la nouvelle Turquie se devait d’être un copié-collé de l’Europe :

 

« Pour échapper à l’anomie, les musulmans n’ont pas le choix, car la modernisation requiert l’occidentalisation. (…) L’islam n’est pas une alternative en termes de modernisation. (…) On ne peut éviter la sécularisation de la société. La science et la technologie modernes requièrent de se fondre dans les processus de pensée qui vont de pair avec elles. De même pour les institutions politiques. Le contenu autant que la forme doivent être stimulés. Il faut donc reconnaître la domination de la civilisation occidentale de façon à pouvoir apprendre d’elle. On ne peut faire l’économie des langues et des structures d’enseignement européennes, même si ces dernières favorisent la liberté de pensée et le laxisme. Les musulmans pourront se moderniser et donc se développer seulement s’ils acceptent le modèle occidental. » Mustapha Kemal (cité p. 96).

 

La même logique est à l’œuvre en Perse où le Shah a épousé une Américaine. Admirateur de ce pays, il cherche à moderniser son royaume et à favoriser la mécanisation. Un processus similaire se manifeste dans les pays gouvernés par le parti Baas : Irak et Syrie.

Or aujourd’hui cette modernisation – occidentalisation est un échec : elle est largement rejetée par les peuples qui ont préféré un gouvernement islamiste, c’est-à-dire d’abord opposé à l’Occident. Le Shah est renversé en 1979, l’héritage d’Atatürk est en train d’être effacé par Erdogan, dont le parti gagne presque toutes les élections, l’Etat islamique cherche à prendre la place des mouvements laïques portés par le Baas.

Moins de 80 ans après les promesses d’Atatürk, le Moyen-Orient semble s’orienter vers une autre voie.

 

« Modernisation ne signifie pas nécessairement occidentalisation. Les sociétés non occidentales peuvent se moderniser et se sont modernisées sans abandonner leur propre culture et sans adopter les valeurs, les institutions et les pratiques occidentales dominantes. Il se peut même que la seconde soit impossible : quels que soient les obstacles que les cultures non occidentales dressent contre la modernisation, ils ne sont rien comparés à ceux qui sont dirigés contre l’occidentalisation. (…) La modernisation renforce les cultures et réduit la puissance relative de l’Occident. Fondamentalement, le monde est en train de devenir plus moderne et moins occidental. » (p. 103)

 

Ces lignes écrites en 1996 conservent une grande pertinence. On le voit, l’analyse d’Huntington est beaucoup plus subtile que les réductions qui en sont données.

 

 

L’essor de l’indigénisme

 

Ce qu’avait également bien vu Samuel Huntington, c’est l’émergence de la cause indigène. La mondialisation efface les cultures faibles, mais renforce les cultures qui veulent durer et qui du coup développent plus fortement leur identité, allant jusqu’à porter des revendications politiques. Le rejet de l’Occident s’accompagne ainsi d’un retour vers les cultures premières. La première génération d’indépendantistes était occidentalisée, formée dans les pays occidentaux, et défendant les valeurs de l’Occident, contre l’Occident lui-même, notamment la démocratie et la liberté des peuples. La deuxième génération est formée sur place, et non pas en Occident. Elle rejette d’autant plus l’Occident qu’elle ne veut pas de cette domination. Elle rejette ainsi les habits, la culture, la religion.

C’est à l’aune de ce retour de l’indigénisme qu’il faut aussi analyser le chavisme : la revanche (réelle ou mythifiée) des Indiens contre les Européens. Idem en Bolivie où Evo Morales s’habille à l’indienne et porte la revendication des populations de l’Altiplano.

C’est manifeste également en Afrique. Le mouvement Boko Haram est certes islamiste, mais la traduction de son nom est particulièrement explicite : « Rejet de l’Occident », une traduction faible d’ailleurs puisque haram signifie interdit, mauvais. C’est donc le rejet de l’Occident dans son fondement même.

En Asie aussi il y a une volonté explicite des élites de se démarquer de l’Occident et d’affirmer leur tradition culturelle. L’ironie étant que cette culture a souvent survécu grâce aux Occidentaux, notamment aux archéologues et aux historiens, qui ont assuré l’indispensable travail de recherche et de conservation.

 

Indigénisme d’un côté, essor des cultures locales de l’autre, cela me semble être la ligne de force motrice des relations internationales au cours des prochaines décennies. C’est un défi posé à l’Occident et à l’Europe qui devra ainsi se poser la question de savoir qui il est. C’est d’ailleurs le titre du dernier ouvrage d’Huntington : Who are we ? (2005).

 

La question de l’universalisme

 

L’Occident a souvent fait l’erreur de croire que ses valeurs étaient universelles et que les autres allaient les accepter sans broncher. La grande vague de démocratisation des années 1990 n’a pas dépassé les frontières de l’Europe. En Amérique latine, elle est mise en échec : les démagogues ont pris le pouvoir. En Afrique, la fragmentation ethnique rend impossible le fait démocratique, ce qui n’est d’ailleurs pas très grave. En Asie, la Chine ne semble nullement se préoccuper de ce problème. C’est pourtant encore avec le prisme démocratique que nous observons bien des problèmes du monde. Ainsi l’Occident est confronté à ce paradoxe : il ne croit plus en la supériorité de sa culture, mais il continue de vouloir imposer la démocratie au monde, au nom de l’universalisme, c’est-à-dire non pas au nom de la supériorité de celle-ci, mais de la supposée universalité de cet état social. Il y a là une difficulté manifeste à penser l’autre et surtout à penser et à comprendre la différence.

 

La réflexion de Samuel Huntington est donc aussi une analyse de l’Occident. À suivre la semaine prochaine.

Auteur: Jean-Baptiste Noé

Jean-Baptiste Noé est docteur en histoire économique. Il est directeur d'Orbis. Ecole de géopolitique. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages : Géopolitique du Vatican. La puissance de l'influence (Puf, 2015), Le défi migratoire. L'Europe ébranlée (2016) et, récemment, un ouvrage consacré à la Monarchie de Juillet : La parenthèse libérale. Dix-huit années qui ont changé la France (2018).

16 Commentaires

Répondre à Denis Monod-Broca

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  • Citoyen

    26 novembre 2017

    Intéressant …
    Sauf que Huntington n’aurait pas dû nommer son bouquin « Le choc des civilisations », mais « Le choc de civilisation », pour la simple raison, qu’il n’y a qu’une seule « civilisation » (l’islam … appelé ici civilisation, puisque par sa nature, il s’agit de bien autre chose qu’une simple religion), qui pose problème à toutes les autres (ces autres civilisations, n’ayant entre elles, aucun problème de cette nature).
    Huntington a raison sur un point bien précis (que « les occidentaux » ont souvent feint d’ignorer): que l’on apporte pas la démocratie sur un plateau, comme un cadeau, à un peuple qui n’en est pas en attente, ou ne le souhaite pas. Pour accéder à la démocratie, il faut le vouloir, s’en donner les moyens. Sinon, ça ne peut pas marcher. La modernisation qui va avec la mondialisation, n’implique pas obligatoirement la démocratie, même si c’est fortement souhaitable. Et les « autres civilisations » peuvent y trouver avantage sans s’occidentaliser. Il y en a qui y arrivent très bien. Sauf une, « civilisation », qui rejette le concept même de modernisation, pour elle et pour les autres. Et là, le contraire de la démocratisation peut conduire à la régression. L’après Mustapha Kemal, qui lui l’avait très bien perçu, montre que la modernisation n’est pas une garantie gravée dans le marbre.

    Répondre
  • Bernard SANZ

    26 novembre 2017

    L’ occident vit dans la paix, la démocratie et le confort matériel, il est donc rentré dans une période de torpeur.

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  • Denis Monod-Broca

    26 novembre 2017

    @ Steve

    « La prétention à l’universalisme, synonyme de totalitarisme par définition, vient se surajouter à l’avidité. »

    N’ayons pas honte de notre prétention à l’universalisme. Elle est consubstantielle à la recherche du savoir, de la justice, de la liberté…

    Mais ayons honte, en effet, de la façon dont nous la trahissons continûment, par notre ignorance et notre aveuglement, par notre cupidité et notre avidité, oui, par notre croyance en la force et nos recours à la violence…

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    • Steve

      28 novembre 2017

      @ Denis Monod Broca
      Je vous entend bien, il n’en reste pas moins qu’un univers signifie littéralement unis vers un. C’est la lecture d’Augustin Berque qui a attiré mon attention sur la différence entre un monde et un univers. L’univers type dans notre mythologie occidentale c’est celui de la tour de Babel. Ce qu’il y a de bien avec le corpus associé à ce mythe c’est que la recette pour ne pas s’y perdre est donnée dans la foulée: pas une seule langue, c’est à dire pas une seule pensée!
      Je crois que nous devrions bien garder à l’esprit qu’un de nos chefs d’oeuvre, que nous appelons « déclaration universelle des droits de l’homme », est aussi perçu dans d’autres cultures comme une invention purement occidentale aux fins d’oppression.
      Il est temps de se poser la question du rôle de notre uni-vers marchand et technologique, qui s’impose impitoyablement à travers le monde, dans l’émergence du radicalisme anti-occidental qui croît ici et là. Ni la philosophie, ni le juridique, ni la science n’ont pu proposer d’autres modèles vivables en remplacement des destructions des modèles sociaux détruits par le consumérisme à outrance. D’ailleurs, je proposerais bien le Black Friday comme jour de remémoration des sociétés détruites par le mercantilisme.
      Je préfère les multivers du poète John Cowper Powys. I am an obstinate cymric!
      D’ici là, je ne vois aucun inconvénient, bien au contraire, à chercher tous ensemble les invariants du cosmos! Pensée grecque et chinoise voguant de conserve, comme les trois licornes, théorème et algorythme ensembles.
      Cordialement.

    • durru

      28 novembre 2017

      @Steve
      Comme Citoyen le remarque plus haut, le rejet de la civilisation occidentale est plus le fait d’une civilisation en particulier que de l’ensemble des autres civilisations contemporaines.
      Si on regarde de plus près, on observe que cette civilisation (ou plutôt la religion sur laquelle elle repose, car l’ambiguïté est savamment entretenue) est elle-même porteuse de cet « universalisme » totalitaire que vous évoquez. Oumma, Islam, Coran incréé, vous voyez ce que je veux dire…
      La frustration de constater que son projet de domination mondiale est en train d’échouer est telle, renforcée par ces maudites évolutions technologiques occidentales qui font passer les informations à la vitesse de l’éclair jusqu’à la dernière des chaumières, que ceux à qui on a appris qu’ils sont les seuls à être dans le vrai et maîtres du monde de par la décision divine ne peuvent concevoir autre chose que la destruction totale et définitive de toute opposition à ce projet (divin, cela s’entend).
      Les résistances asiatiques, russes, sud-américaines, etc. ne se font pas sur le fond de l’évolution civilisationnelle, mais sur des structures de civilisation qui veulent rester en vie, ce qui est tout à fait louable et souhaitable. Ce sont des formes qui sont attaquées, des fois (souvent?) à juste titre, car dévoyées. Mais pas le fond de ce que la civilisation occidentale a apporté au monde. Tien An Men – on a tendance à oublier, mais cela a bien eu lieu. Faudrait se poser la question « pourquoi? »… Et ce n’est qu’un exemple.

  • Ockham

    25 novembre 2017

    Parmi beaucoup d’ idées, il y a Boko Haram. Le mot Boko signifie « l’alphabet en caractère latin » en Haoussa. Le diable, c’est cet alphabet latin , œuvre du diable blanc chrétien, l’interdit d’où Haram. Or ce mot est arabe. Donc Caractère Latin, interdit en arabe!
    Le titre du mouvement est très bien choisi et parle violemment à l’Africain. Depuis Diego Cao certains Africains cherchent à se défendre secrètement, donc dans des sectes, de toute influence des us et coutumes européens. Ces mouvements ne sont pas l’apanage unique de certains musulmans et ils combattent l’influence de l’Occident discrètement à leur manière. En clair ils proposent de retourner au sources de la pureté des ancêtres pour attraper le pouvoir. Ceci les amène assez souvent, et il s’agit là de faits avérés par tout connaisseur de l’Afrique profonde, à liquider dans l’épaisse nuit de la brousse le plus souvent par le poison un nombre non négligeable de jeunes gens particulièrement brillants et très doués en alphabet latin. Ainsi Boko Haram est un programme qui parle comme les fameuses trompettes de Jéricho à un Haoussa. IL annonce bien à l’Africain la résistance au Blanc/Occident d’où un recrutement facile de jeunes gens obsédés par ce diabolique « alphabet latin » en fait les méfaits occidentaux (en vrac la colonisation, l’alcool, l’esclavage, les belles voitures des Blancs …) au nom d’une certaine négritude dirait Senghor. De plus cet acte de résistance utilisant l’extrême violence est béni car il y a une sortie par la haut (die Aufhebung de Hegel) grâce l’universalité islamique qui absout et nie la négation violente et sauvage comme un simple passage de reconstruction et de conversion à la soumission, l’islam. De là sort l’efficacité redoutable de ce mouvement drainant tous les mécontents qui ne manquent pas. La racine étant wahhabite nul doute que l’islam plus modéré dans la région devrait plus intéresser Riyad que ces terroristes. Merci d’avoir permis de faire cette liaison entre cet irrédentisme africain et ce qui se passe actuellement avec Boko Haram à propose de conflit de civilisation.

    Répondre
    • Steve

      25 novembre 2017

      Bonsoir
      Il est certain que le consumérisme occidental a détruit nombre de structures traditionnelles sans proposer un autre modèle d’organisation sociale solidaire en remplacement. De plus, au moins dans les pays francophones, l’arrogance et l’ignorance des coopérants de base envoyés par Paris a généré beaucoup de rejets et de rancoeurs.
      Pourtant, les structures familiales solidaires des africains ne sont pas très éloignées des nôtres, du moins de celles de l’ancien régime: dans la maison des frères Montgolfier, vivaient une soixantaine de Montgolfiers, dont les cousins pauvres, que ceux pourvus de revenus trouvaient normal d’entretenir.
      Ainsi, ce que les mercantis reprochent aux africains, à savoir faire vivre leur famille étendue avec un seul salaire, au lieu d’acheter des trucs inutiles qui nourrissent le capitalisme essentiellement rentier qui est le modèle dominant en France, était considéré comme normal il n’y a pas si longtemps. Du moins jusqu’à l’introduction forcée du crédit à la consommation par la propagande.
      On n’a pas encore vraiment compris ce que nous a coûté, en terme d’humanité, la transformation des usines d’armement de 14 /18 en chaînes de productions de biens de consommation, pour le maintien des profits des actionnaires rentiers.
      Ce désir sans borne de rente, grattée sur les os de notre prochain( et qui va de pair chez certains avec le désir de particule et de vie de hobereau) assez français, déjà entrevu chez Dumas et longuement décrit par Balzac peut être vu comme un des facteurs à l’origine des mouvements de rejet de l’occident qui sont nés ici et là.
      La prétention à l’universalisme, synonyme de totalitarisme par définition, vient se surajouter à l’avidité.
      Pourtant, les libéraux comme Bastiat ne se sentaient aucun droit d’imposer leurs vues et leur modèle à d’autres cultures…..
      Cordialement.

    • Charles Heyd

      26 novembre 2017

      je voudrais répondre à #Steve;
      – je ne vois pas du tout ce que vient faire le « pour le maintien des profits des actionnaires rentiers » parmi les arguments de cette discussion; cela sent un peu la France Insoumise!
      Si les « bons sauvages » veulent vivre selon leurs rites immémoriaux, la cueillette et la chasse, personne ne les oblige à adopter le capitalisme qui en effet, lui aussi, peut être « sauvage » ! Mais il va falloir qu’ils trouvent une solution pour donner à manger à leurs huit enfants par femme (statistiques officielles pour le Niger l’an dernier);
      – mais je suis d’accord sur l’universalisme supposé de certains de nos concepts, à commencer par les doits de l’homme et du CITOYEN et qu’on essaye d’imposer au monde entier sans voir plus loin que le bout de notre nez, c-à-d ne pas voir qu’il y a en effet des civilisations autres que la notre et pour certaines aussi avancées que la notre; donc Macron a encore du pain sur la planche mais l’instant il s’occupe de la femme, autre sujet qui est traité bien différemment selon ces mêmes civilisations plus ou moins civilisées!

  • Denis Monod-Broca

    24 novembre 2017

    Merci pour le billet !

    Qui suis-je ?
    Qui sommes-nous ?
    Il faut, c’est sûr, commencer par là.

    Et, excusez-moi d’une vision sans doute réductrice ou nombriliste, mais qui sommes-nous en tant que Français ? Qui sommes-nous en tant que nous sommes la France à une époque où on nous serine que la France n’est plus rien et que nous sommes l’Europe ?…

    La croyance (quasi religieuse) en l’Europe paralyse toute pensée politique française, toute pensée française.

    Dans ces conditions, dans ce choc des civilisations, nous avons perdu d’avance.

    Répondre
  • idlibertes

    24 novembre 2017

    Bonsoir JB,

    j’ai une question sur la première ligne après l’essor de l’indigénisme. Je cite  » La mondialisation efface les cultures faibles, mais renforce les cultures qui veulent durer et qui du coup développent plus fortement leur identité, allant jusqu’à porter des revendications politiques ».

    Je pense qu’en amont, il faudrait peut être définir ce qu’est une culture faible et ou forte car, en effet, la force d’une culture justement n’est elle pas son potentiel à absorber les autres et donc à avoir le plus grand commun dénominateur. Ainsi, la culture par exemple Japonaise, n’est elle pas par sa richesse plus ardue à intégrer et donc de fait au niveau mondial moins attirante pour la masse? La nature humaine ayant tendance à aller vers la simplicité, la facilité, n’est ce pas la raison même du succès de la culture Américaine qui se trouve donc « forte » par sa redoutable facilité à absorber toutes les autres sans ou presque heurts?

    Répondre
    • Charles Heyd

      24 novembre 2017

      Je pense comme M. Noé, si je l’ai bien compris, que la problématique n’est plus, ou n’est plus seulement, celle du livre sur le choc des civilisations même si elle est encore parfaitement d’actualité, mais de savoir qui nous sommes (Who are we?);
      et cette question est particulièrement prégnante en France où on parle sans cesse « d’identité » mais sans bien définir ce concept et même sans savoir ou vouloir définir ce concept;
      parler ensuite de la force d’une civilisation n’est pas très utile car, ou la civilisation est forte et elle sait se défendre, ou elle est faible et elle s’écroule et disparaît!
      les Romains comme les Egyptiens ont bel et bien disparus même s’ils y a toujours des Italiens et des Egyptiens!
      La question encore une fois, est de savoir si on veut défendre notre civilisation mais pour cela il faut d’abord savoir à quelle civilisation nous appartenons;
      boire du coca ne fait pas de nous des américains (états-uniens) mais prouve simplement qu’on peut avoir les mêmes gouts! Ensuite, si nous (Français et Européens en général) nous nous coulons dans la civilisation américaine c’est tout simplement que nous avons les mêmes racines anglaises, allemandes, françaises, suisses, polonaise, etc.; les Américains états-uniens blancs sont en effet des descendants de colons européens et ont grosso-modo les mêmes religions et langues que nous autres Européens;
      mais les Japonais, Chinois en j’en passe, boivent aussi du coca et écoutent du rock mais ne sont pas occidentaux pour autant! Ce n’est pas parce qu’ils sont plus forts mais tout simplement parce qu’ils ont d’autres racines auxquelles ils tiennent; nous on n’a même pas eu le courage de défendre nos racines « chrétiennes » lors des discussions sur la constitution européenne!
      j’écoutais encore récemment Eric Zemmour et Alain Duhamel échangeant sur ce sujet (l’intégration ou l’assimilation dans un pays, la France dans le cas précis);
      pour faire court: Zemmour dit que les Arabes (musulmans) ne VEULENT pas s’intégrer alors que Duhamel disait qu’on n’a pas su refaire ce que l’on a fait pour les Italiens, Espagnols, Portugais et Polonais, qui ne posent aucun problème d’intégration en France (à la civilisation française ou à a civilisation européenne), c-à-d une éducation et un processus ad hoc;
      tout le monde peut constater aujourd’hui, hélas, que Zemmour a raison mais ce n’est pas parce que la civilisation musulmane est plus forte que la notre mais tout simplement parce que ces Arabes et musulmans ne veulent pas de notre civilisation (religion, habillement et langue et système politique – la démocratie pour faire court aussi).
      C’est à nous de défendre nos « valeurs » sinon nous disparaitrons non pas en tant qu’individus mais comme civilisation (européenne).

    • Jean-Baptiste Noé

      25 novembre 2017

      On pourrait dire qu’une « culture forte » est une culture qui se pense comme tel, qui se pense aussi supérieur aux autres (et notamment supérieur à son entourage) et qui refuse d’être assimilée par ses voisins ou ses occupants (cas de la Pologne pendant les nombreux partages ou les Arméniens dans l’empire ottoman).

      Une culture forte est une culture vivante et qui veut continuer de vivre. Elle ne cherche pas forcément à plaire ni à être copiée.

      Le cas du Japon est intéressant car il est en train de devenir attirant pour beaucoup de personnes. Le sumo par exemple, sport liée à la religion shintoïste, est aujourd’hui pratiqué en Egypte, Bulgarie et Mongolie alors qu’il est un peu délaissé au Japon, qui préfère le base-ball.

    • Aljosha

      25 novembre 2017

      Et le rrrrougby ?

  • Bruno

    23 novembre 2017

    Très intéressant, vraiment. Un tout grand merci pour cette analyse de Huntington.

    Répondre
  • Charles Heyd

    23 novembre 2017

    je ne peux m’empêcher de faire un rapprochement, même si cela est un peu « osé » entre le titre du dernier article de M. Netter et le votre, toujours brillant et d’actualité, M. Noé: « Le lénino-capitalisme devra évoluer pour permettre à la Chine de dépasser durablement les Etats Unis »!
    En effet, les « conseils » aux Chinois pour dépasser notre capitalisme indépassable, qui prouvent qu’ils sont pertinents? Et comment les Chinois en sont-ils déjà arrivés là où ils sont?
    Et notre déclaration (universelle) des « droits de l’homme et du citoyen » ils n’auraient pas un peu de plomb dans l’aile non plus? Je veux dire ailleurs que dans l’Europe de Bruxelles!
    Et même M. Macron, comment il va faire pour « refonder » l’Europe, avec, mais probablement sans « maman » (Mutter pour les germanistes distingués) Merkel?

    Répondre
    • sassy2

      28 novembre 2017

      bonjour,

      oui concernant l’article de M Netter:
      quand la russie ou la chine par exemple ont-elles été des démocraties dîtes à l’européenne?
      Jamais.
      Et elles ne le seront probablement jamais.

      Imaginez par exemple qu’un élu socialiste ou de la mairie de Paris ou Emarche prennent le pouvoir en Chine alors la Chine retombera forcément à l’âge de pierre.

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